Dans son discours mardi, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a abordé la crise du carburant, proposant comme solution aux pénuries que l’État libanais importe des stocks d’Iran payables en livres, une suggestion qu’il avait déjà évoquée à plusieurs reprises. Le plus frappant, cependant, a été le ton employé par le numéro un du parti chiite, qui a appelé l’État à s’affranchir de sa « peur » des États-Unis, affirmant sur un ton de défi que si « l’État cesse d’assumer ses responsabilités et que l’humiliation se poursuit, nous, au sein du Hezbollah, irons en Iran, négocierons avec le gouvernement iranien (...) achèterons des navires d’essence et de mazout, et les ramènerons au port de Beyrouth ». « Et que l’État libanais (ose) empêcher l’acheminement d’essence et de mazout au peuple libanais! » a-t-il ajouté. Beaucoup d’observateurs ont noté ce ton de défi, voire de menaces, à l’encontre de l’État Libanais. Khalil Hélou, général à la retraite et militant politique proche du mouvement de contestation, répond aux questions de « L’OLJ » sur cet aspect du discours.
Que dénote le ton employé par le secrétaire général du Hezbollah à l’encontre des décideurs pour annoncer l’intention de son parti d’importer de l’essence d’Iran ?
Cela est d’autant plus absurde que lui-même est le plus grand décideur du pays. À mon avis, ce message de menace n’est pas principalement adressé à l’État qui, lui, ne demanderait pas mieux que de voir de l’essence affluer sur le marché libanais, ce qui aurait pour effet de réduire l’impact de la crise. Les propos de Hassan Nasrallah, d’après moi, visent plus directement le secteur privé qui hésite jusque-là à traiter avec l’Iran de peur des sanctions. Sans compter que les sanctions internationales frappent déjà plusieurs personnalités et banques libanaises. Ces propos leur font comprendre qu’ils doivent obtempérer, d’autant plus que les informations qui parviennent des pourparlers de Vienne sur le nucléaire iranien font état d’une progression dans le sens d’un nouvel accord entre l’Iran et l’Occident. Mais cela ne nous dit pas qui va pratiquement importer cette essence : des sociétés écrans du Hezbollah ou d’autres entreprises libanaises ? Quelles banques seront engagées dans le processus et avec quel argent cette essence sera-t-elle payée ?
Je pense que cette essence pourrait bien être un cadeau iranien au Hezbollah en l’absence du soutien financier qu’il lui assurait auparavant et qui n’est plus possible en temps de crise. Un moyen de financement détourné du Hezb qui pourrait ainsi vendre cette essence en livres et en profiter pour acheter des dollars. Mais pour l’instant, ce ne sont que des suppositions.
Comment expliquer le silence des autorités concernées sur cette partie du discours spécifiquement ?
Il est scandaleux qu’il ne se soit trouvé aucun responsable – ni le président de la République Michel Aoun, ni le Premier ministre (sortant) Hassane Diab, ni aucun des ministres – pour répliquer au ton adopté face à l’État dans son ensemble. Ça en dit long sur l’assujettissement de l’État au Hezbollah. Quelle que soit la proposition proprement dite, ne s’est-il trouvé personne pour répondre aux menaces inhérentes au discours, rien que pour sauver la face? Pour affirmer au secrétaire général du Hezbollah que même s’il a une proposition à faire en ce sens, elle doit d’abord être discutée avec les officiels ?
À quel public s’adressait le discours de Hassan Nasrallah ce jour-là et quel impact a-t-il eu ?
Je pense personnellement que le secrétaire général du Hezbollah s’adressait à tous les publics et a lancé des messages dans toutes les directions. Il parlait d’abord au public qui lui est acquis, et qui souffre, comme tous les autres, de la crise économique et des vexations quotidiennes. Il voulait le rassurer sur le fait qu’il détient une solution. En même temps, on ne peut ignorer les menaces contre les autorités. Et ce qui ne fait aucun doute, c’est qu’il s’adresse aussi au public qui lui est hostile en réaffirmant sa stature sur la scène locale. Enfin, il délivre un certificat de bonne conduite à l’Iran, auquel il prête une intention salutaire. En d’autres termes, bien que le sujet soit en relation avec un problème de vie quotidienne, le message est hautement politique. Et à mon avis, Hassan Nasrallah était sérieux dans sa proposition : on verra probablement de l’essence iranienne affluer sur le marché, même si pas en quantités suffisantes pour satisfaire les besoins locaux.
commentaires (19)
ceux qui n'ont pas encore realise que l'accord de mar mikhael fev 2006 fut le debut de nos malheurs, ceux qui n'ont pas encore realise que l'accord de meerab x 2 fut la suite qui devait aider a provoque nos malheurs, ceux qui n'ont pas encore realise que les compromis geagea-hariri-aoun/pti gendre n'ont pas sonne l'ahhali de notre pays sont aveugles et des naifs devant l'eternel.
Gaby SIOUFI
17 h 10, le 11 juin 2021