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Idées - Point de vue

La Nakba n’a jamais cessé

La Nakba n’a jamais cessé

Photo d’illustration : des Palestiniens inspectent leur maison détruite par des raids israéliens à Rafah, dans la bande de Gaza, le 16 mai. Saïd Khatib/AFP

Bien que je sois laïque, il y a deux célébrations religieuses auxquelles je ne manque jamais de participer chaque année dans la Vieille Ville arabe de Jérusalem-Est : le samedi saint (« sabt el-nour ») à la veille des Pâques orthodoxes, au Saint-Sépulcre, et la nuit du destin (« laylat el-qadar »), au Haram ech-Charif. Mais cette année, la nature festive et pacifique de ces événements a été transformée en champ de bataille par les provocations des colons juifs zélotes et l’agression de l’armée israélienne contre les participants palestiniens.

Alors qu’on lui demandait pourquoi il avait empêché les musulmans de se rendre à la mosquée al-Aqsa lors de la nuit la plus animée du ramadan, Mir Barakat, l’ancien maire de Jérusalem, a répondu : « Dès lors que nous avions interdit l’accès du mont du Temple aux colons juifs, nous avons dû en faire de même pour les musulmans ! » L’audace de cette réponse laisse présager qu’Israël ne tardera pas à changer le statu quo au Haram ech-Charif et à en prendre totalement le contrôle.

Nettoyage ethnique

Jamais autant de facteurs ne s’étaient entremêlés pour aboutir au bain de sang auquel nous avons assisté dans la bande de Gaza ces deux dernières semaines. Certes, nous y avons été déjà témoins de massacres similaires (en 2008, 2012 et 2014). Et nous allons malheureusement en voir sans cesse de nouveaux, à moins que le monde, particulièrement les États-Unis et les pays européens, ne consentent enfin à traiter le fond d’un problème qu’Israël ne cesse d’aggraver afin d’avoir une excuse de plus pour ne pas parvenir à une solution politique, et parachever sa politique de nettoyage ethnique et de judaïsation. De fait, les « accords d’Abraham », et la normalisation des relations entre Israël, les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc ont profondément choqué les Palestiniens. Cela leur a aussi rendu plus que jamais évidente la nécessité de ne compter que sur eux-mêmes. D’autant que, jusqu’à présent, nous n’avons pas vu de véritable renversement de la politique de Trump par l’administration Biden.

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Il est pourtant temps que la communauté internationale reconnaisse qu’Israël est devenu un pays raciste d’extrême droite dominé par les partis religieux et des groupes de colons zélotes, comme Ahava, qui jouent un rôle essentiel dans la terreur subie quotidiennement par la population palestinienne. C’est bien l’agression des colons juifs extrémistes soutenus par l’armée israélienne qui a récemment provoqué et aggravé l’escalade de ces deux dernières semaines. Le fait que plus de 600 000 ou 700 000 colons juifs vivent dans des colonies construites sur des terres palestiniennes volées en Cisjordanie n’est plus seulement une question territoriale (Israël contrôle plus de 60 % des terres de Cisjordanie et 90 % de son eau), mais constitue aussi une véritable menace pour la sécurité des Palestiniens. L’expulsion des 28 familles de Cheikh Jarrah, à Jérusalem-Est, n’est ainsi qu’un exemple et une dernière illustration du nettoyage ethnique auquel se livre Israël depuis la Nabka en 1948 : de Cheikh Jarrah à Wadi el-Joz, en passant par Silwan – sans compter les 22 000 expulsions supplémentaires déjà planifiées –, la dépossession des Palestiniens et leur sentiment que la « Catastrophe » n’a jamais cessé se perpétuent indéfiniment.

La participation active des citoyens palestiniens d’Israël à « l’intifada du ramadan 2021 » est un autre facteur qui distingue cette dernière des précédentes – et inquiète sans doute davantage Tel-Aviv que sa lutte inégale contre le Hamas. La révolte des Palestiniens absorbés depuis 1948 a exposé plus que jamais la nature raciste de l’État d’Israël, qui se définit comme « l’État-nation du peuple juif », et sa politique d’apartheid contre ses citoyens arabes qui constituent 20 % de la population. Or, bien que le nœud du problème découle de 53 ans d’une occupation cruelle et de 73 ans d’apartheid, Israël tient plus que jamais à en faire une affaire religieuse. N’était-ce pas le but de Netanyahu en s’attaquant aux 70 000 fidèles, lors de la nuit la plus sacrée du ramadan, dans la mosquée al-Aqsa ? Quant à la parade d’une trentaine de milliers de colons juifs, elle a mis le feu aux poudres en franchissant ce que le Hamas a considéré comme une ligne rouge. Comment en serait-il autrement de la part du Hamas dès lors que les colons célébraient « l’unité de Jérusalem », et donc l’occupation des quartiers musulmans de la Vieille Ville ? Il faut garder à l’esprit que l’interdiction de l’accès à leurs lieux saints des grecs-orthodoxes à Pâques ainsi qu’aux musulmans à la mosquée al-Aqsa a été imposée pendant tout le mois de ramadan, avant que la situation ne s’embrase avec l’invasion de la mosquée par des milliers de soldats israéliens et des colons scandant le slogan « Mort aux Arabes ».

Impasse

Dès lors, le Hamas a été entraîné dans la guerre, ou a-t-il voulu accroître encore sa popularité en faisant la démonstration de nouvelles capacités militaires ? La question reste posée. Toujours est-il que sa popularité ne cesse de croître auprès des jeunes Palestiniens depuis les derniers événements : contrairement à ce qu’Israël souhaite, le lourd tribut payé par la population de Gaza n’a pas porté atteinte à la légitimité du Hamas durant ces dernières années, pas plus que cela n’avait affecté la légitimité de l’OLP pendant les années 1970-1980. De fait, les attaques et les massacres aveugles contre les populations civiles innocentes ne font que créer plus de rage et de haine. Le Hamas aurait-il de cette manière réussi à réaliser cet objectif qui lui a été refusé par l’annulation des élections, malheureusement décidée par le président Abbas (avec le soutien en coulisses des États-Unis et des pays de l’UE) ? Priver d’élections les 250 000 Palestiniens vivant à Jérusalem-Est a certainement exacerbé la situation, mais utiliser cela comme prétexte a ôté tout espoir au peuple palestinien de surmonter les divisions, entre le Fateh et le Hamas, qui paralysent la société palestinienne. D’autant que cela aggrave le sentiment des Palestiniens d’être dans une impasse : d’un côté, les puissances occidentales souhaiteraient des élections libres et démocratiques et, de l’autre, ces mêmes puissances n’accepteraient jamais de traiter avec le Hamas si le verdict populaire lui était favorable.

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Le résultat en est l’affaiblissement inexorable du président Abbas qui a perdu toute crédibilité auprès de son peuple – et de la communauté internationale, comme en témoignent les négociations indirectes menées par les États-Unis et les pays européens qui négocient indirectement un cessez-le-feu avec le Hamas par le truchement du Qatar et de l’Égypte...

Faudrait-il en conclure que le Hamas tout comme Netanyahu sortiront tous deux, et chacun à sa manière, vainqueurs d’une guerre dont les populations civiles palestiniennes sont les victimes ?

En attendant, tant que les États-Unis et certains pays européens continueront de s’opposer à la saisine de la Cour internationale de justice, les crimes de guerre répétés et continus commis par Israël contre les civils palestiniens, comme à Cheikh Jarrah ou à Gaza, resteront à l’abri du droit international.

Écrivaine et architecte. Fondatrice de Riwaq, un centre consacré à la conservation du patrimoine architectural palestinien à Ramallah, et ancienne membre de la délégation palestinienne aux discussions de Washington qui ont précédé les accords d’Oslo de 1993.

Bien que je sois laïque, il y a deux célébrations religieuses auxquelles je ne manque jamais de participer chaque année dans la Vieille Ville arabe de Jérusalem-Est : le samedi saint (« sabt el-nour ») à la veille des Pâques orthodoxes, au Saint-Sépulcre, et la nuit du destin (« laylat el-qadar »), au Haram ech-Charif. Mais cette année, la nature festive et...

commentaires (1)

Un article tellement tendancieux. Jamais les Israelien n'ont interdit l'acces aux musulmans, par contre les juifs sont interdit d'acces. Les musulmans ont commence a attaquer les juifs de Jerusalem en enregistrant sur tiktok leur action, ce qui a pousse les juifs a y repondre. Quant a Sheikh Jarrah, c'est une question de paiement de loyer. Les 28 familles palestiennes n'ont pas payer de loyer. Donc eviction est normale. Les musulmans ont tujours provoque les Israeliens ont faisant du grabuges et en stockant des pierres et autres artifice sur le parvis de la mosque. La police intervient lorsque les faits le precisent.

IMB a SPO

12 h 05, le 22 mai 2021

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Commentaires (1)

  • Un article tellement tendancieux. Jamais les Israelien n'ont interdit l'acces aux musulmans, par contre les juifs sont interdit d'acces. Les musulmans ont commence a attaquer les juifs de Jerusalem en enregistrant sur tiktok leur action, ce qui a pousse les juifs a y repondre. Quant a Sheikh Jarrah, c'est une question de paiement de loyer. Les 28 familles palestiennes n'ont pas payer de loyer. Donc eviction est normale. Les musulmans ont tujours provoque les Israeliens ont faisant du grabuges et en stockant des pierres et autres artifice sur le parvis de la mosque. La police intervient lorsque les faits le precisent.

    IMB a SPO

    12 h 05, le 22 mai 2021

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