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Moyen-Orient - Entretien express

« Aux États-Unis, le lobby pro-israélien sait qu’il est en train de perdre la bataille de l’opinion publique »

Lubna Qutami, professeure assistante à la University of California, Los Angeles (UCLA), répond aux questions de « L’Orient-Le Jour » sur la montée d’un discours beaucoup plus favorable aux Palestiniens au sein du Parti démocrate américain.

« Aux États-Unis, le lobby pro-israélien sait qu’il est en train de perdre la bataille de l’opinion publique »

À Los Angeles, des manifestants agitant des drapeaux palestiniens devant le consulat israélien le 11 mai. Ringo Chiu/AFP

La dernière séquence politique et militaire dans les territoires occupés et à l’intérieur des frontières d’Israël a donné plus d’importance qu’auparavant dans le débat américain à la question de la colonisation israélienne des terres palestiniennes d’une part et au soutien de Washington à son principal allié au Moyen-Orient d’autre part. Le mouvement de solidarité avec la Palestine dans les rues et, surtout, sur les réseaux sociaux a par ailleurs dévoilé des évolutions significatives au sein d’une opinion publique, côté démocrate, traditionnellement pro-israélienne mais de plus en plus critique de la politique menée par l’État hébreu. Selon un sondage conduit par l’institut Gallup en mars, près de 53 % des sympathisants démocrates affirmaient être favorables à mettre plus de pression sur Israël pour mettre fin au « conflit israélo-palestinien ». C’est 10 points de plus qu’en 2018 et 20 de plus qu’en 2008. Lubna Qutami, professeure assistante au département d’études asiatiques-américaines de la University of California, Los Angeles (UCLA), répond aux questions de L’Orient-Le Jour sur les racines de cette nouvelle dynamique alors que de manière inédite, deux résolutions, l’une portée par la membre du Congrès Alexandria Ocasio-Cortez mercredi, l’autre par l’ancien candidat aux primaires démocrates le sénateur Bernie Sanders jeudi, ont tenté de bloquer une vente d’armes de 735 millions de dollars à Israël approuvée par l’administration Biden.

Quels sont selon vous les principaux facteurs qui ont permis ces dernières années de développer un mouvement de solidarité avec la Palestine plus fort et plus visible aux États-Unis ?

Ce mouvement n’est pas né du jour au lendemain. Mais au cours des dernières années, il est devenu plus fort à travers un mouvement étudiant et de jeunesse bourgeonnant, grâce à des dizaines de campagnes « Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) » et grâce à la montée en puissance des réseaux sociaux comme moyen de partage d’informations alternatives que les grandes sociétés de médias ont longtemps censuré.

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À cela s’ajoute le fait que les Palestiniens et ceux qui luttent avec eux se sont investis dans un travail particulièrement significatif visant à relier le combat pour une Palestine libre aux diverses luttes et causes dans le pays, montrant ainsi le caractère interdépendant des systèmes d’oppression aux États-Unis et en Israël d’une part et les liens intimes de solidarité entre les Palestiniens et les groupes opprimés dans le pays d’autre part. Cela a permis à une variété de mouvements et de causes de reconnaître la libération palestinienne comme étant liée à la leur, ce qui, en retour, a placé la Palestine au centre de l’agenda progressiste. Cela s’applique par exemple aux relations de solidarité entre les Palestiniens et les luttes autochtones pour la souveraineté foncière ou la lutte contre la violence raciste d’État – en particulier à travers la coalition The Movement for Black Lives (Le mouvement pour la vie des Noirs, NDLR).

Tous ces développements sur le terrain ont fait de la Palestine une question-clé pour nos générations. D’autant plus que le plaidoyer et l’activisme pour la justice en Palestine se sont par ailleurs accrus aux États-Unis en même temps que les conditions se sont détériorées pour les Palestiniens dans leur patrie, notamment par l’accroissement des pertes de terres, l’expansion des colonies, l’intensification de la violence d’État et des colons, un siège impitoyable et des guerres sans fin sur la bande de Gaza. Ces conditions ont vraiment poussé les gens à agir, à considérer qu’il faut rendre des comptes pour une telle catastrophe affectant un peuple depuis bien trop longtemps avec un sceau d’approbation et un soutien militaire, financier et économique des États-Unis.

Jamais autant qu’aujourd’hui les questions de la colonisation et de l’occupation israéliennes n’ont mené à de vrais débats au sein du Parti démocrate. Dans quelle mesure pensez-vous que cela peut avoir un impact ?

Cette évolution au sein du Parti démocrate est le fruit de décennies d’engagement des Palestiniens de la diaspora et de ceux qui les soutiennent. Le parti est conscient du fait que les mouvements populaires soutiennent la liberté des Palestiniens, même si les organisations sionistes exercent encore un pouvoir et une influence considérables à Washington. Une équipe de jeunes dirigeants très courageux au sein du Congrès est en train de répondre aux appels de la base. Il ne s’agit pas uniquement de la Palestine. Pendant bien trop longtemps, le Parti démocrate n’a fait qu’apporter un soutien de façade aux communautés qui tiraient la sonnette d’alarme concernant la violence et l’oppression systémiques, qu’elles soient raciales, de genre, sexuelles ou économiques. Des gens ordinaires aux États-Unis se sont élevés contre les courants dominants au sein du Parti démocrate. C’est précisément la raison pour laquelle Bernie Sanders a conduit deux campagnes aussi importantes en 2016 et en 2020, avec un soutien populaire aussi fort.

Quels sont les principaux obstacles à ce vent nouveau ?

Les organisateurs sur le terrain sont profondément conscients que le lobby pro-israélien fait tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin au débat politique ouvert et libre et à l’échange intellectuel sur ce sujet. Il a tenté de faire passer des législations qui criminalisent BDS, la liberté d’expression et la liberté académique sur la Palestine. Il a tenté d’assimiler à tort l’antisionisme à de l’antisémitisme à travers la loi. Il a tiré parti de son pouvoir et de l’influence sur les grandes entreprises technologiques comme Zoom, YouTube, Facebook, Eventbrite et Instagram, les exhortant à censurer les défenseurs de la justice en Palestine. Il n’a pas hésité à mener des campagnes de calomnie, à harceler et à traquer des porte-paroles, des militants, des figures politiques et universitaires qui défendent les droits des Palestiniens. Toute cette répression prouve que ce lobby pro-israélien ne veut pas que les gens puissent remettre en question ce qui se passe, précisément parce qu’il sait qu’il est en train de perdre la bataille devant l’opinion publique. Cela dit, les militants de terrain reconnaissent à quel point il a été difficile pour les membres du Parti démocrate de changer le statu quo sur ce sujet.

La dernière séquence politique et militaire dans les territoires occupés et à l’intérieur des frontières d’Israël a donné plus d’importance qu’auparavant dans le débat américain à la question de la colonisation israélienne des terres palestiniennes d’une part et au soutien de Washington à son principal allié au Moyen-Orient d’autre part. Le mouvement de...

commentaires (3)

Mais madame de quoi parlez vous ?! Si Israël a arrêter c’est qu’elle a déjà eu gain de cause si je peux m’exprimer ainsi ... sur autre chose !! Car c’est finis ça peuple palestinien ou non il y a déjà eu jurisprudence en la matière avec la Syrie

Bery tus

06 h 47, le 23 mai 2021

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Commentaires (3)

  • Mais madame de quoi parlez vous ?! Si Israël a arrêter c’est qu’elle a déjà eu gain de cause si je peux m’exprimer ainsi ... sur autre chose !! Car c’est finis ça peuple palestinien ou non il y a déjà eu jurisprudence en la matière avec la Syrie

    Bery tus

    06 h 47, le 23 mai 2021

  • Est ce que Israel paye ses armes ? J'en doute???

    Eleni Caridopoulou

    19 h 03, le 22 mai 2021

  • est ce pour cela que Biden et beauoucp d'autres promettent de renforcer la puissance militaire israelienne-entre autre rendre plus efficace le dome de fer- ET faire de sorte que hamas ne puisse pas renforcer son arsenal militaire ? hmm! drole de gain pour les palestiniens et aussi drole que cette perte du lobby pro israel pas vrai ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 51, le 22 mai 2021

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