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Idées - L’économie Ponzi

Sayrafa et le remboursement des dépôts en dollars : de nouveaux tours de magie ?

Sayrafa et le remboursement des dépôts en dollars : de nouveaux tours de magie ?

Photo d’illustration ANI

Étant actuellement en voyage, avec plusieurs heures de décalage par rapport à Beyrouth, mon meilleur baromètre des développements importants au Liban est le nombre d’appels manqués que je vois au réveil. À 8 heures du matin, alors que je commençais à écrire ces lignes, j’avais une douzaine d’appels manqués... Et ce n’était même pas mon anniversaire ! En fait, tous venaient de journalistes et de chaînes de télévision et portaient sur les deux événements économiques du mois au Liban : le lancement de la nouvelle version de Sayrafa, la plateforme de change de la banque centrale (BDL), et, plus surprenant encore, l’annonce faite le 9 mai par la BDL consistant à demander aux banques de commencer à verser des dollars « frais » à leurs clients à partir de juillet.

Les paiements en dollars réels (ou les transferts de routine à l’étranger) ayant cessé il y a plus d’un an et ayant été remplacés par des retraits en livres (au taux de l’ancienne plateforme : 3 900 LL/USD), les déposants ont subi un « haircut » déguisé d’environ 68 %. Bien sûr, cette décote est volontaire, dans le sens où une banque peut toujours vous dire que si vous êtes patient, elle vous rendra votre argent en totalité à un moment non identifié dans le futur... Peut-être lorsque les Prix Nobel de la commission parlementaire des Finances – les mêmes qui ont torpillé une distribution beaucoup plus équitable des pertes il y a un an (le fameux plan Lazard) – auront fini de « reconstituer les dépôts » dans leur laboratoire souterrain...

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Dans sa dernière annonce, la BDL promet de recommencer à verser jusqu’à 25 000 dollars « frais » par personne selon un calendrier qui reste à déterminer. D’après un document ayant fuité l’an dernier, cela est théoriquement possible : si les comptes de moins de 50 000 dollars valaient environ 12 milliards de dollars à l’époque, ils valent beaucoup moins aujourd’hui. Par conséquent, étalé sur 10 ans, cela coûterait quelques centaines de millions de dollars par an. Du coup, la vraie question serait plutôt : selon quelles règles? Par exemple, la nécessité d’une « couverture légale » de l’opération offre une échappatoire juridique de taille. Autre problème de taille potentiel : certaines sources fiables m’affirment que chacun se verra soustraire de ce « quota » de 25 000 dollars le total des montants qu’il a retirés à l’ancien taux de la plateforme (3 900). Si cela se confirme, cela exclut à peu près toutes les personnes que je connais, à l’exception de quelques retardataires, comme les expatriés vivant à l’étranger qui n’ont pas pu profiter de la circulaire n° 151.

Mais plus important encore que les règles : qui va financer l’opération ? Les banques, par le biais des 3 % de leurs dépôts en dollars frais qu’elles étaient censées rapatrier via la circulaire 154 ? Ou la BDL, en utilisant les réserves restantes (les fameuses « réserves minimales obligatoires »), qui représentent 15 % du total des dépôts ? Les 3 % précités représentent environ 3 milliards de dollars ; cependant, en raison d’une exemption qui n’a pas fait l’objet d’une grande attention dans les médias, la BDL a permis aux banques d’utiliser leurs eurobonds au prix du marché (environ 15 % de la valeur nominale) pour répondre aux exigences de la circulaire

n° 154. Ainsi, en réalité, les banques n’ont qu’environ 1,5 milliard de dollars à payer. Sauf qu’elles ont juré haut et fort aux clients qui ont été assez gentils pour se prêter au jeu que « cette fois, c’est promis, on ne fera rien de stupide avec votre argent » (comme l’utiliser pour rembourser les anciens déposants – en d’autres termes, relancer le schéma de Ponzi). On s’achemine donc vers une bataille médiatique avec la BDL, avec pour scénario principal un dialogue de sourds : « Remboursez ! » / « Non, c’est à vous de le faire ! »

Mais là est le hic : même en ajoutant les réserves de la BDL et les avoirs des banques dans leurs banques de dépôt, le maximum de fonds potentiels disponibles est d’environ 18 milliards de dollars – quasiment moitié moins que lorsque les paiements en dollars ont cessé. Alors, comment, avec bien moins de liquidités disponibles, ce qui était jusque-là impossible deviendra aujourd’hui réalisable ?

Notez qu’il ne s’agissait que d’une annonce, qui a beaucoup moins de poids qu’une circulaire – même s’il y en a tant eu au cours de l’année écoulée qu’elles sont devenues une sorte de café matinal à Starbucks avant la dévaluation... De fait, la présence de clauses telles que la nécessité « d’autorisation légale » ou de « négociations » montre tout le chemin qui reste à parcourir avant une mise en œuvre éventuelle. Je ne peux donc m’empêcher de penser que le seul but d’une telle annonce relève du marketing ou de l’effet d’optique : bref, un moyen de plus pour gagner du temps, semer la confusion et détourner l’attention.

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De même, le lancement de la nouvelle version de Sayrafa ne semble pas très différent de celui de la précédente plate-forme l’année dernière. Celle-ci avait commencé avec l’objectif louable de rembourser les petits déposants (ceux qui ont moins de 3 000 dollars), pas parce que ce sont des gens bien, mais pour neutraliser le segment de la population le plus susceptible de manifester et d’envoyer tout valser. Ces comptes ont été remboursés à 3 200 LL/USD à un moment où le marché parallèle était de 3 400, c’est-à-dire que leur perte était minime. En fait, selon le même document fuité l’an dernier, ces comptes représentaient 62 % du total des comptes : cela fait beaucoup de personnes à éloigner des manifestations potentielles contre les banques et la BDL, et ce pour un coût très faible. Pour une raison quelconque, la plateforme est restée en place, mais le taux a été ajusté à la hausse, passant de 3 200 à 3 900, ce qui a donné l’impression aux 38 % qui sont en haut de l’échelle qu’ils recevaient une augmentation, alors que leur perte s’aggravait progressivement à mesure que le taux de la livre sur le marché parallèle se détériorait.

A priori, cette nouvelle version de la plateforme devrait donner un résultat similaire. Il y a quelques mois, un responsable m’a confié que son intention était de fixer le taux à 10 000. Au lieu de cela, ils l’ont annoncé hier à 12 000, abandonnant ainsi déjà leur objectif initial, tout comme ils ont abandonné les 3 200 auparavant. Bref, en extrapolant à partir de leur dernière tentative, le seul résultat que je peux anticiper pour cette opération (après avoir brûlé futilement d’autres réserves), c’est de nous aider à nous rapprocher des prévisions alarmistes sur le taux de change publiées en juillet 2020 par Merrill Lynch...

Dan Azzi est un ancien directeur de banque et chroniqueur à L'Orient-Le Jour.

Étant actuellement en voyage, avec plusieurs heures de décalage par rapport à Beyrouth, mon meilleur baromètre des développements importants au Liban est le nombre d’appels manqués que je vois au réveil. À 8 heures du matin, alors que je commençais à écrire ces lignes, j’avais une douzaine d’appels manqués... Et ce n’était même pas mon anniversaire ! En fait, tous venaient...

commentaires (2)

DE NOUVEAUX GALAS GALAS DES HYPER MAFIEUX DE LA COSA NOSTRA DEVENUS PLUS QU,INTERNATIONAUX POUR DEVALISER COMPLETEMENT LES DEPOSITAIRES DANS LES BANQUES DE LEURS ECONOMIES D,UNE VIE. ET DIRE QU,ILS SONT TOUS LIBRES ET CIRCULENT AU LIEU D,ETRE INCARCERES ET TOUTES LEURS PROPRIETES ETR BCOMPTES CONFISQUES. MAIS CA C,EST LA PRETENDUE JUSTICE DANS CE PAYS. VOLER LES ECONOMIES DU PEUPLE.

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 46, le 24 mai 2021

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Commentaires (2)

  • DE NOUVEAUX GALAS GALAS DES HYPER MAFIEUX DE LA COSA NOSTRA DEVENUS PLUS QU,INTERNATIONAUX POUR DEVALISER COMPLETEMENT LES DEPOSITAIRES DANS LES BANQUES DE LEURS ECONOMIES D,UNE VIE. ET DIRE QU,ILS SONT TOUS LIBRES ET CIRCULENT AU LIEU D,ETRE INCARCERES ET TOUTES LEURS PROPRIETES ETR BCOMPTES CONFISQUES. MAIS CA C,EST LA PRETENDUE JUSTICE DANS CE PAYS. VOLER LES ECONOMIES DU PEUPLE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 46, le 24 mai 2021

  • En d autres circonstances moins dramatiques la situation serait risible. Mais aujourd’hui elle est triste et catastrophique. À force de rédiger des circulaires on n y comprend plus rien. Ils méritent effectivement le prix Nobel de l embrouille Pauvre Liban Dr Fadi LABAKI

    fadi labaki

    12 h 34, le 22 mai 2021

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