
Une ultime médiation est menée par M. Berry auprès de MM. Hariri et Joumblatt d’une part, et du Hezbollah, allié de Michel Aoun, d’autre part. Ici, une ancienne réunion au domicile de M. Joumblatt à Clémenceau, avec MM Berry et Hariri. Photo d’archives Marwan Assaf
L’annonce par la France de mesures additionnelles contre des personnalités libanaises de divers camps, pour cause de blocage gouvernemental, semble avoir produit quelques effets. Mais sans aucune garantie jusqu’ici quant à leur aboutissement.
C’est dans ce cadre qu’entre la redynamisation ces derniers jours de l’initiative de sauvetage lancée conjointement, en mars dernier, par le chef du PSP Walid Joumblatt et le président du Parlement, Nabih Berry, pour tenter de débloquer la situation. Cette proposition-compromis, qui consistait en un cabinet de 24 ministres sans tiers de blocage, avait alors été étouffée dans l’œuf. C’est donc cette formule que M. Berry tenterait aujourd’hui de ressusciter, en accélérant les contacts aussi bien avec son allié chiite, le Hezbollah, que ses partenaires politiques privilégiés, le PSP et le courant du Futur.
Ce sursaut est survenu à l’heure où la France, par le biais de son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a brandi, lors de sa visite à Beyrouth jeudi et vendredi derniers, une arme redoutable pour la classe politique, celle des prochaines échéances électorales que Paris s’engage à suivre de près et à s’assurer de leur tenue en temps voulu.
« La rencontre de Jean-Yves Le Drian avec les formations de la société civile est un message clair lancé à l’establishment politique lui signifiant que Paris ne table plus sur la classe dirigeante actuelle mais sur les nouvelles élites que l’Occident se prépare à soutenir », constate ainsi une source proche de M. Berry.
Ultime médiation
Mais c’est surtout les informations distillées dans les milieux haririens sur une possible récusation du Premier ministre désigné qui aurait incité Nabih Berry et Walid Joumblatt à tenter une ultime médiation. De toute évidence, ces deux derniers préfèrent à ce jour Saad Hariri à tout aventurisme qui risque de réitérer le scénario du chef de gouvernement sortant, Hassane Diab.
« Si Hariri se récuse, c’est le retour à la case départ et une perte de temps », fait valoir un proche de M. Joumblatt. D’ailleurs, ajoute-t-il, la solution ne changera guère avec le nouveau venu. Le compromis avec Michel Aoun restera incontournable.
Le moteur des pourparlers a ainsi été remis en marche et les contacts se sont intensifiés. D’une part entre le Hezbollah et M. Berry, et d’autre part entre le président du Parlement et MM. Hariri et Joumblatt. L’idée est que le chef du Parlement puisse convaincre son partenaire chiite de pousser le chef de l’État, Michel Aoun, et son camp à faire preuve de souplesse.
À ce jour le Hezbollah répétait, à qui veut l’entendre, qu’il n’a aucun moyen de pression sur le président. D’ailleurs, s’il le pouvait ou s’il le souhaitait, pourquoi le parti chiite ne l’aurait-il pas fait plus tôt? « Nous soutenons toute médiation parrainée par M. Berry pour rapprocher les points de vue », se contente de répondre le porte-parole du parti chiite, Mohammad Afif Naboulsi. « Je ne crois pas que M. Berry pourra faire quoi que ce soit. Le Hezb ne fera pas pression sur MM. Aoun et Bassil », commente une source proche du parti de Dieu.
Dialoguer ou se récuser
M. Naboulsi se dit convaincu que la solution commence par la restauration de la confiance entre Baabda et la Maison du Centre. Une lapalissade que partagent également des sources proches du camp aouniste. Celles-ci considèrent que M. Hariri devrait se rendre à Baabda pour soumettre au président une mouture de 24 qu’il pourra alors avaliser, refuser ou accepter d’en discuter. Autant de détours et de suggestions qui ont déjà été envisagés mille et une fois, en vain. Alors, pourquoi reprendre les mêmes solutions pour obtenir les mêmes résultats ?
Dans les milieux joumblattistes on avance l’argument du facteur temps qui, dit-on, n’est ni en faveur de Saad Hariri ni en faveur du chef de l’État. Le contexte régional, qui se modifie rapidement avec un double rapprochement entre la Syrie et l’Arabie saoudite et cette dernière avec l’Iran, presse M. Hariri à faire des choix rapides. De son côté, le chef de l’État ne souhaite pas voir son mandat se terminer sur une situation explosive, notamment avec la levée des subventions le mois prochain, fait valoir une source joumblattiste.
Selon un analyste proche du Hezbollah, Saad Hariri n’a vraiment plus le choix : soit il accepte de faire un compromis et de dialoguer avec MM. Aoun et Bassil, soit il se récuse. « Au bout du compte, tout le monde sera perdant », dit l’analyste. Un avis que partage également une source proche de Aïn el-Tiné qui affirme que le camp aouniste semble malheureusement disposé à poursuivre la guerre d’usure jusqu’au bout, quitte à défier toute forme de sanctions.
L’annonce par la France de mesures additionnelles contre des personnalités libanaises de divers camps, pour cause de blocage gouvernemental, semble avoir produit quelques effets. Mais sans aucune garantie jusqu’ici quant à leur aboutissement. C’est dans ce cadre qu’entre la redynamisation ces derniers jours de l’initiative de sauvetage lancée conjointement, en mars dernier, par le...
commentaires (6)
Quand on compare ce groupe et celui de l’opposition réunie, la messe est dite.
Bachir Karim
06 h 54, le 12 mai 2021