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Politique - Décryptage

La France a tenu ses promesses, qu’en est-il des Libanais ?

Faute de véritable actualité politique, la visite du ministre français des Affaires étrangères au Liban continue de susciter différentes interprétations. Annoncée quelques jours avant sa tenue, cette visite a immédiatement fait la une des médias d’autant qu’elle a été précédée par deux tweets « musclés » de Jean-Yves Le Drian lui-même. Le patron du Quai d’Orsay promettait ainsi d’utiliser un langage très ferme avec les responsables du blocage gouvernemental et brandissait la menace de sanctions contre eux.

Du fond du gouffre dans lequel ils se débattent, les Libanais ont donc commencé à penser que cette visite pourrait déclencher un processus de solution ou alors un mécanisme de punition avec un effet positif sur le cours des événements. Mais non seulement le ministre français n’a fait aucune déclaration tout au long de sa visite, se contentant d’un rapide point de presse, mais, de plus, les échos parvenus aux oreilles des Libanais montrent qu’aucun déblocage n’est en vue. D’ailleurs, dans le cadre de sa rencontre avec les forces de l’opposition, Jean-Yves Le Drian leur a conseillé de se préparer pour les législatives de 2022... Comme s’il n’y avait rien d’important à attendre d’ici là sur le plan politique.

Sans aller jusqu’à cette conclusion, des sources qui ont suivi cette visite précisent qu’elle avait pour objectif de montrer aux Libanais que la France a tenu ses promesses, tout en demandant aux autorités libanaises d’en faire de même. Les responsables français qui suivent de près les développements internes libanais savaient donc que, dans les circonstances actuelles, il y a bien peu de chances d’opérer une percée dans le dossier gouvernemental, surtout après le refus du président du Conseil désigné, Saad Hariri, de rencontrer le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, à l’Élysée, comme il en a été question à un moment donné.

Que les entraves soient uniquement internes ou qu’elles aient une dimension régionale et autre, le constat est le même : dans le contexte actuel, aucun déblocage n’est en vue. Selon cette logique, Jean-Yves Le Drian serait donc venu à Beyrouth pour transmettre aux responsables libanais un ultime message dans lequel il constate leur incapacité à tenir leurs promesses. En même temps, il a voulu aussi réaffirmer la solidarité des responsables français avec le peuple libanais et ouvrir une fenêtre d’espoir en concentrant les efforts sur les prochaines élections qui devraient se tenir dans un an. De même, selon des sources diplomatiques, il s’agit aussi pour Le Drian de dresser un dernier rapport sur les efforts français au Liban, en vue des prochaines campagnes électorales en France. En effet, à partir du mois prochain, la France entre en période préélectorale. Le Liban étant un thème qui importe aux Français, il fallait donc pouvoir dire aux électeurs en toute clarté : nous avons fait le maximum, mais c’est la classe politique libanaise qui n’a pas saisi cette occasion. De la sorte, le Liban ne sera pas utilisé comme un thème de campagne.

Selon ces mêmes sources, c’est ce souci de montrer que tout a été fait du côté français qui a poussé le chef de la diplomatie française à adopter pratiquement le même scénario pour ses trois rencontres officielles. Une demi-heure en tout et pour tout et aucune déclaration, à chaque étape. Si ses rendez-vous avec le chef de l’État et le président de la Chambre avaient été annoncés, sa rencontre avec le Premier ministre désigné est restée incertaine jusqu’au bout. Ce qui a été interprété comme un message de mécontentement à l’égard de Saad Hariri.

De plus, au cours de ces trois entretiens, Le Drian a écouté ses interlocuteurs plus qu’il ne leur a parlé, refusant même d’entrer dans les détails du blocage gouvernemental. Il s’est contenté d’évoquer des sanctions, mais sans préciser les noms des personnes qui seraient susceptibles d’être sanctionnées.

À ce sujet, les sources diplomatiques précitées précisent que les autorités françaises maintiennent sciemment le flou, d’abord pour susciter un climat d’inquiétude chez les responsables libanais, et ensuite parce que le mécanisme est difficile à mettre en place. S’il faut recourir aux sanctions européennes, celles-ci exigent l’accord de tous les membres de l’UE, ce qui n’est pas assuré jusqu’à présent. S’il s’agit de sanctions purement françaises, il n’y a pas en France les mêmes législations qu’aux États-Unis qui permettent d’agir dans ce contexte. De plus, la France a elle-même souffert de l’impact des sanctions américaines sur, par exemple, certaines de ses banques, comme la BNP et le Crédit agricole, et elle ne souhaite donc pas recourir au même procédé. Il a été, à un moment donné, question de sanctions tripartites : américaines, britanniques et françaises, mais, là aussi, le projet a besoin de se concrétiser et chacun de ces pays a une approche et une évaluation différentes du dossier libanais.

En fin de compte, il semble que la France songe essentiellement à imposer des restrictions sur les déplacements sur son territoire des personnalités libanaises visées par les sanctions... Autrement dit, les sanctions, aux yeux des Français, ne sont pas un outil efficace pour pousser les responsables libanais à former un gouvernement. Mais, pour l’instant, il n’y en a pas d’autres...

Neuf mois après le lancement de ce qu’on a appelé « l’initiative française pour le Liban », annoncée par le président français Emmanuel Macron lors de sa première visite à Beyrouth le 6 août 2020, la France constate qu’elle n’a pas les outils suffisants pour pousser les parties libanaises concernées à former un gouvernement. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir tenté d’adapter son initiative au contexte libanais. Elle avait donc commencé par la désignation de Moustapha Adib pour former le gouvernement. Ce dernier s’est désisté au bout d’un mois et il a été remplacé par Saad Hariri, désigné le 22 octobre 2020. Depuis, il y a eu des tractations, des menaces et même des tentatives de réunir Hariri et Bassil, en vain. Le blocage reste le même et le fossé s’agrandit entre les différents protagonistes.

Les Libanais sont plus que jamais otages de leurs divergences et des développements régionaux.

Faute de véritable actualité politique, la visite du ministre français des Affaires étrangères au Liban continue de susciter différentes interprétations. Annoncée quelques jours avant sa tenue, cette visite a immédiatement fait la une des médias d’autant qu’elle a été précédée par deux tweets « musclés » de Jean-Yves Le Drian lui-même. Le patron du Quai d’Orsay...

commentaires (7)

Quelles promesses? Depuis quand la France respecte-t-elle le peuple libanais?

Politiquement incorrect(e)

11 h 31, le 16 mai 2021

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Commentaires (7)

  • Quelles promesses? Depuis quand la France respecte-t-elle le peuple libanais?

    Politiquement incorrect(e)

    11 h 31, le 16 mai 2021

  • La France va jeter l'éponge ???

    Eleni Caridopoulou

    20 h 22, le 11 mai 2021

  • En fait le peuple connaît toutes les analyses de part et d‘autre. On s‘y entend entre-temps même dans les finances. Un camp dit que la chute est intentionnée et voulue pour un jour célébrer Bassil en tant que sauveur. L‘autre camp prône son intégrité et commence un combat jusqu’à présent non entamé contre la corruption avec les résultats inachevés qu‘on connaît depuis longtemps. Cela va durer. Personne ne lâche prise. Tout a été dit. Jusqu’à la prochaine catastrophe. Je suis abonnée. Je le reste jusqu’à prochaine échéance. Après je pourrais texter moi-même les „actualités „.

    Khazzaka May

    11 h 49, le 11 mai 2021

  • Les libanais sont otages de leurs dirigeants politiques incompétents, corrompus et pourris jusqu’à l’os. Tous bords confondus et je n’exclus personnes. Tous les politiciens ont pillé, volé et ruiné le peuple libanais en paupérisant l’ensemble des citoyens sauf les initiés et protégés qui ont sorti leur épargne du pays avant, pendant et après la crise. Tous ces dirigeants politiques doivent comparaître devant une véritable justice pour vol en bande organisée et destruction systématique du pays et je dis bien TOUS quelque soit leur bord politique. Déjà que la France leur interdise l’octroi du visa Schengen est une première victoire pour la population, ces pourris devront rester chez eux à contempler leur fortune sans pouvoir mettre le nez hors du Liban

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 53, le 11 mai 2021

  • cet article n'apporte rien de nouveau : du remplissage

    Tabet Ibrahim

    06 h 59, le 11 mai 2021

  • Un décryptage pour une fois acceptable et qui aspirait, semble t-il, à dire les trois vérités sauf qu'en fin de compte il lui lui a manqué un p'tit bout; "Les Libanais sont plus que jamais otages de leurs divergences et des développements régionaux" il fallait nommer ces divergences et ces devs régionaux: ahed et son maître hezb...

    Wlek Sanferlou

    02 h 52, le 11 mai 2021

  • quelles bavardages cet article ....parler pour rien dire.....elle n'a pas consulté ses nombreuses sources cette fois ci Mme Scarlette.

    Gebran Eid

    01 h 52, le 11 mai 2021

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