La première juge d’instruction de la Békaa, Amani Salamé, a ordonné la saisie conservatoire des biens de banques libanaises et de leurs PDG, dans le cadre de procédures lancées par un groupe d’avocats, il y a une dizaine de jours, au nom de déposants dont la plupart portent plainte contre des branches situées dans la Békaa (selon un des avocats du groupe de plaignants).
Cette mesure, qui intervient alors que les déposants libanais souffrent depuis près de deux ans de restrictions bancaires aléatoires et illégales, a été prise par la juge Salamé suite à une plainte déposée par des avocats du groupe de la société civile « Le peuple veut la réforme du régime », qui représente des déposants contre de nombreuses banques libanaises et leurs PDG ou anciens PDG. La plainte a notamment été déposée pour « fraude, fuite de capitaux, blanchiment d’argent, enrichissement illicite et violation de la Constitution », précise le groupe d’avocats dans un communiqué. Le texte ajoute que la saisie conservatoire s’applique aux biens immobiliers de ces banques et PDG ainsi qu’aux parts détenues par ces derniers dans diverses entreprises. Le communiqué souligne que cette mesure pourrait s’étendre, au fur et à mesure de l’instruction, à d’autres personnes « influentes ». « Vous avez confisqué les dépôts des gens, nous allons confisquer, légalement, vos biens et vos fonds », commente le groupe d’activistes dans son communiqué.
Selon le texte de la décision de la juge d’instruction, les PDG, anciens PDG, membres de conseils d’administration et actionnaires suivants sont visés par cette mesure :
– Walid Raphaël, PDG en activité de la Banque libano-française (BLF)
– Adnane Kassar, PDG en activité de la Fransabank
– Raymond Audi, président d’honneur de la Banque Audi depuis qu’il a quitté ses fonctions de PDG en 2017
– Salim Sfeir, président de l’Association des banques du Liban (ABL) et PDG de la Bank of Beirut
– Ghassan Assaf, PDG de la Bank of Beirut and the Arab Countries (BBAC)
– Nadim Kassar, PDG de la Banque libanaise pour le commerce (BLC)
– Ramsey el-Khoury, PDG de la Banque de Syrie et du Liban (BSL)
– François Bassil, président du groupe Byblos Bank
– Samer Itani, PDG de la Lebanese Gulf Bank (LGB)
– Tarek Khalifé, PDG de la CreditBank
– Antoun Sehnaoui, PDG de la Société générale de banque du Liban (SGBL)
– Raya el-Hassan, PDG de BankMed
– Naaman el-Azhari, président d’honneur de la BLOM Bank depuis qu’il a quitté ses fonctions de PDG en 2020
– Mohammad el-Etrebi, PDG de la Banque Misr Liban
Pour chacun d’eux, la magistrate précise les biens immobiliers et actifs saisis de manière conservatoire. La juge Amani Salamé est également la présidente du Club des juges, une association de magistrats réformateurs.
« Ce n’est qu’un début »
À l’heure de mettre sous presse, hier soir, l’ABL n’avait pas publié de communiqué officiel au sujet de cette mesure.
Une source bancaire proche du dossier estime pour sa part « normal » que des déposants entament une action en justice contre les banques, dans le contexte actuel en l’absence d’une loi sur le contrôle des capitaux. Elle s’étonne toutefois des noms cités, notamment du fait que certains n’ont été nommés que relativement récemment membres de conseils d’administration de certains établissements tandis que d’autres ne sont plus à la tête des banques citées depuis plusieurs années, à l’image de François Bassil ou Raymond Audi. La source souligne que les banques et personnes visées auront la possibilité de présenter des recours pour casser cette décision.
Interrogé par L’OLJ, l’avocat Hassan Bazzi, qui fait partie du groupe « Le peuple veut la réforme du régime », qualifie « d’importante » cette décision de la juge Salamé parce qu’elle a « une portée politique non négligeable ». « Cette saisie conservatoire est une garantie pour la suite des événements, dit-il. Dans le principe, la juge peut la lever si son enquête montre que les personnes visées ne sont pas en cause, mais dans la pratique, un juge ne prend pas de telles décisions (la saisie conservatoire, NDLR) s’il n’a pas une intime conviction de la culpabilité des individus concernés. » Contrairement à la source bancaire précitée, Me Bazzi estime que « suivant un autre avis juridique, cette décision est d’ordre administrative et ne fait pas partie de celles sujettes à recours ». Dans tous les cas, il affirme que « ce n’est qu’un début », et que son groupe « compte réunir d’autres plaignants et poursuivre l’action contre le reste des banques ».
Dans un tweet, la procureure générale près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, au centre d’un bras de fer à rebondissements avec le procureur près la Cour de cassation Ghassan Oueidate, qui l’a dessaisie des dossiers relatifs aux crimes financiers, a félicité la juge Salamé, déclarant avec pompe « rallier le Club des juges ». Les déposants libanais subissent, depuis la fin de l’été 2019, des restrictions bancaires unilatérales et illégales sur leurs retraits et transferts, du fait de l’absence d’une loi sur le contrôle des capitaux. Dans ce cadre, une loi sur le contrôle des capitaux devrait être étudiée par la commission parlementaire du Budget et des Finances après le congé de la Pâques orthodoxe, soit mardi prochain. Le contrôle des capitaux fait partie des textes réclamés par le FMI lors de ses négociations – interrompues en juillet 2020 – avec les responsables libanais.
La loi sur le capital control des capitaux aurait dut être imposé par les gouvernants et avalisée par les membres du parlement libanais au lendemain de la soi disante révolution du 17 Octobre 2019 cela juste avant l ouverture des établissements de crédits ... Prions que les Présidents et membres des conseils d administration des Banques qui ne sont pas encore déclarés en faillite ou placés sous administration judiciaire, mais qui regardent leurs biens personnels saisis en saisie conservatoire , continuent malgré ces conséquences de recevoir leur clientèle et ne petent pas un plomb suite aux acharnements , pressions populaires et juridiques .... Il se pourrait qu à tout moment ils pourraient décider en collégialité de mettre la clef sous le paillasson et de fermer boutique à tout va , faisant face au pire ... C est à ce moment là que nous constaterons les dégâts parmi les dépôts des déposants qui s arracheront les cheveux .... Enfin Ce n est pas le moment de promener des éléphants dans la maison de verre .... Un bon plan de sauvetage et tout peut encore rentrer dans l’ordre ....
19 h 07, le 29 avril 2021