Le Liban fait l’expérience d’une crise existentielle due à des diversités non réconciliées. Ce diagnostic rapide effectué par le chef de l’Église catholique au retour de son voyage à Bagdad, sur le vol qui le ramenait à Rome le 8 mars, mérite commentaire. Il montre à l’évidence que le pape suit de près les développements de la crise libanaise.
« Le Liban est un message (…), il a la faiblesse de ses diversités, certaines pas encore réconciliées (…), le Liban est en crise, mais une crise – je ne veux pas offenser – une crise de vie », a dit très exactement le chef de 2,5 milliards de catholiques.
Les propos du pape peuvent recevoir plusieurs interprétations, mais le chef de l’Église maronite, qui a tout fait pour engager le chef de l’État, Michel Aoun, et le Premier ministre désigné, Saad Hariri, à s’entendre sur un gouvernement, l’a très bien résumé tout récemment encore. Le chef de l’État et le Premier ministre « ne sont pas en mesure de s’asseoir ensemble pour aborder les points de discorde qui se sont accumulés », a-t-il affirmé dimanche, pour justifier sa demande d’une conférence internationale spéciale, sous les auspices des Nations unies. « Ils ne se parlent pas. Ils ne se regardent pas dans les yeux », a-t-il risqué à plusieurs reprises devant ses visiteurs et en public.
Le Liban est aux antipodes de son « message »
Les propos du patriarche sont graves, car ils donnent l’impression que le Liban est aujourd’hui aux antipodes du Liban du saint pape Jean-Paul II. En 1989, le pape avait ainsi affirmé que « le Liban est plus qu’un pays : c’est un message de liberté et un exemple de pluralisme pour l’Orient comme pour l’Occident ».
« Peut-on continuer à parler de Liban-message si le vivre-ensemble des Libanais commence à être leur principale difficulté ? » déclare le nonce apostolique en commentant la situation actuelle. À plus de trente ans d’écart, en effet, une nouvelle phase de la vie politique au Liban semble s’être ouverte. Aujourd’hui, c’est au nom de « la récupération des droits des chrétiens », dont ils estiment qu’ils ont été spoliés ou confisqués par l’establishment sunnite sous la gouvernance du chef du gouvernement assassiné Rafic Hariri, que prétendent agir le chef de l’État, ainsi que le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil. « Le Liban a déjà été visité par les papes Jean-Paul II (1997) et Benoît XVI (2012) », reprend le nonce, tandis que le pape François avait fait savoir fin décembre 2020 qu’il comptait se rendre au Liban « dès que possible ». « Mais les contextes historiques ont changé. Le message qu’adressera François aux Libanais, quand l’occasion de tenir sa promesse de leur rendre visite se présentera, ne sera sans doute pas celui de Jean-Paul II », poursuit le nonce. Pour le professeur Antoine Messarra, titulaire de la Chaire Unesco d’étude comparée des religions à l’Université Saint-Joseph, « le vivre-ensemble est en rupture avec les mutations actuelles dans le monde : individualisme forcené, émergence d’identités meurtrières, fanatisme de religions idéologisées, populisme aux dépens de la citoyenneté vigilante et de la chose publique transcommunautaire, extension de guerres par procuration dans des États fragiles ou fragilisés, régression de l’autorité de l’État, terrorisme d’organisations transétatiques soutenues et alimentées par des États voyous qui pratiquent la diplomatie du chantage ».
Le discours du CPL s’est malheureusement approprié certains de ces thèmes propres à la doctrine politique de l’alliance des minorités, et les Libanais sont entrés de plain-pied dans ce nouveau temps historique, sans avoir fait leur examen de conscience, après une guerre (1975-1990) dont certains refusent encore d’admettre qu’elle était guerre civile. Les Libanais se sont amnistiés des atrocités qu’ils ont commises sans avoir purifié leurs mémoires et leurs consciences et assumé, en toute responsabilité, les souffrances infligées et reçues, demandant et recevant le pardon qui accompagne l’aveu, et cherchant à réparer les liens rompus, comme toute vie sociale véritable l’exige, et comme d’autres nations, comme la nation arc-en-ciel, l’Afrique du Sud, l’ont fait.
Le blocage des structures du dialogue au Liban sont « en crise » pour d’autres raisons aussi. Car les « droits des chrétiens », le Courant patriotique libre a décidé de les « défendre » en s’alliant avec… le Hezbollah, sans savoir vraiment ce qu’est le Hezbollah. Avec ce courant, en effet, nous ne sommes pas seulement en présence d’un parti, mais d’un projet de société, voire d’un projet d’État islamique, même si ses dirigeants ont assuré à un moment que la structure communautaire du Liban est incompatible avec l’établissement d’une république islamique, telle qu’ils l’envisageaient.
Or il est évident qu’avec le Hezbollah, il y a un problème d’ajustement existentiel, culturel, anthropologique à faire. On est là aussi en présence de « diversités non réconciliées », pour reprendre l’expression du pape. Mais si ces diversités restent culturelles, leur réconciliation dans l’extraordinaire creuset de vivre-ensemble qu’est le Liban est toujours possible. C’est seulement si ces diversités sont politiques qu’elles deviennent problématiques, dans la mesure où elles conduisent à une confrontation entre une société démocratique et un projet totalitaire incompatible avec le pluralisme et la liberté d’expression ; un projet totalitaire qui doit s’adapter au réel libanais, faute de quoi le Liban en paiera le prix au niveau de ses libertés, de son appartenance et de ses alliances, comme il le fait aujourd’hui.
Une visite qui vient trop tard ?
« Le pape François s’est présenté en pèlerin et en pénitent, a poursuivi le nonce apostolique. Il a demandé pardon au nom de l’humanité, aussi bien aux chrétiens qu’aux yézidis, pour les souffrances, les spoliations de biens, l’exode, la cruauté humaine et l’intolérance idéologique dont ils ont soufferts. » Pourtant, des sentiments d’amertume, d’aigreur même, se sont quand même exprimés à l’occasion de la visite du pape. Certains pensent en effet que sa visite à l’Irak est « venue trop tard » et que le mal avait déjà été fait. De fait, de 6 % de la population, les Irakiens de religion chrétienne sont tombés en 20 ans à 1 %. D’autre part, certains disent tout haut qu’après le départ du pape, rien n’a changé.
À ces derniers, le nonce propose l’épisode de l’Évangile où Jésus chasse les marchands du Temple. Commentant ce récit spectaculaire, Mgr Joseph Spiteri affirme : « On ne peut pas forcer les gens à changer de mentalité du jour au lendemain. Quelques heures ou quelques jours après la sainte colère de Jésus, les marchands d’animaux et les tables des changeurs renversées on dû probablement réapparaître. Pourtant, le geste prophétique du Christ a revêtu une fois pour toutes sa signification permanente, son sens définitif : il ne faut pas exploiter la religion à des fins commerciales ou politiques et transformer la maison de Dieu en caverne de voleurs ». « Jésus change les cœurs, mais les structures prennent bien plus de temps à évoluer », commente le nonce.
Il en va de même au Liban, ajoute Joseph Spiteri : « Il faut donner du temps au temps, comme on dit. Entre rester et partir, les cœurs des jeunes hésitent. La visite du pape en Irak et ses appels sont des paroles et des gestes prophétiques qui établissent un modèle de conduite et peuvent insuffler de nouveaux espoirs aux jeunes et les encourager à rester dans leur patrie, même s’ils ne s’accompagnent pas d’effets visibles immédiats. Ils touchent les cœurs. Les changements prennent du temps, mais ils finiront par venir. »
La promesse d’une visite au Liban
Enfin, au sujet de sa promesse de consacrer au Liban une visite pastorale, le nonce affirme qu’il la tiendra certainement. « Mais le désir du pape est une chose, et l’organisation de son voyage une tout autre chose, ajoute-t-il. Une visite pastorale du pape est connue des mois à l’avance. Sa préparation est minutieuse et elle est tributaire, qu’on le veuille ou non, de la situation interne du pays. »
Et le nonce de se scandaliser de ce que l’on a fait au Liban de l’initiative française et de « l’engagement personnel » du président Emmanuel Macron, après l’explosion d’août 2020 au port de Beyrouth. « Mais le pape sait ce que représente le Liban en lui-même et pour les chrétiens du Moyen-Orient, et il ne manquera pas de tout faire pour le raffermir afin qu’il ait, comme il l’a dit, la force des cèdres, celle d’un grand peuple réconcilié. »
Le CPL a décrété que les chrétiens sont sous sa protection. Depuis les chrétiens sont dans la dèche et quand ils ne sont pas pauvres ils immigrent en suivant les conseils du créateur de ce maudit parti qui a détruit le peu de privilèges que les chrétiens ont obtenu à force de guerres et de souffrances. Alors continuer à parler chrétiens et musulmans dans ce pays alors que le peuple entier est en train de chavirer dans la même direction est un aberration que nul ne veut admettre à commencer par le peuple lui même qui continue à croire que si un maronite est président et que le PM est sunnite et, et, et on n’est pas prêts à sauver notre nation. Il nous faut une identité unique ou n’importe quel citoyen se dit libanais un point c’est tout. La religion doit rester dans leurs murs et dieu ne sera que plus clément et plus présent pour bénir le travail accompli. En son nom on détruit et on tue alors que dieu, qui qu’il soit se veut amour dans toutes les confessions.
19 h 52, le 16 mars 2021