Les coupures de routes à travers le Liban par des manifestants en colère contre la crise économique se sont poursuivies samedi pour le cinquième jour consécutif, ce qui a enfin fait réagir le Premier ministre sortant, Hassane Diab, qui a prévenu que le Liban était "au bord de l'explosion".
Selon le Centre de contrôle du trafic routier (TMC), la voie rapide dite du Ring, à Beyrouth, a été coupée dans les deux sens. L'Agence nationale d'information (Ani, officielle), rapportait qu'une équipe de la chaîne MTV a été agressée sur place, sans préciser par qui. Les journalistes ont été empêchés de couvrir le sit-in.
"Salamé démissionne !"
Une marche a également eu lieu entre la place Riad el-Solh et le siège de la Banque du Liban, dans le quartier de Hamra, à l'appel du collectifs "Révolutionnaires du 17 Octobre", en référence à la date du début du soulèvement populaire déclenché en 2019. Devant la BDL, un groupe de protestataires a enlevé la pancarte portant le nom de l'institution, avant de la piétiner et la brûler, aux cris de "Riad Salamé démissionne !". Un sit-in a également été signalé un peu plus loin, devant le siège du ministère de l'Intérieur, afin de réclamer la libération de militants anti-pouvoir détenus par les autorités après les émeutes à Tripoli en janvier dernier.
Toujours à Beyrouth, le tunnel Salim Salam a été fermé, et l'autoroute au niveau de la Cité sportive ainsi que le rondpoint Cola au sud de la capitale, ont eux aussi été bloqués. De même pour la route principale dans le quartier de Moucharrafiyé, dans la banlieue sud de Beyrouth en soirée. Un peu plus au sud, à Choueifat, un automobiliste a renversé plusieurs contestataires qui bloquaient la route. Selon notre correspondante Sarah Abdallah, qui cite une source sécuritaire, le conducteur a été arrêté.
L'axe situé au niveau du croisement de Nahr el-Mott-Jdeidé a pour sa part été partiellement bloqué, plus au nord. La-bas, selon l'Ani, l'un des manifestants affirmait que "les mouvements populaires sont le seul moyen de faire entendre notre voix". Il a également appelé les députés des partis qui se disent contre le pouvoir en place à démissionner. Dans le Kesrouan, des contestataires ont bloqué l'autoroute de Zouk en début de soirée.
Dans la Békaa aussi, la route de Masnaa-Rachaya a été coupée, et des militaires se sont déployés sur place.
Dans le Chouf, un groupe de protestataires munis de drapeaux libanais a coupé la route au niveau de Damour. A Aley, un groupe se faisant appeler "Les révolutionnaires de la Montagne" a coupé la voie publique à Aabadiyé, en direction de Beyrouth.
Dans le Sud, à Saïda, des manifestants ont aussi brûlé des pneus sur la place Elia, selon notre correspondant, Mountasser Abdallah. L'armée est intervenue après quelques échauffourées avec les protestataires et a pu rouvrir la route. Des sit-in ont également été signalés devant des bureaux de change. Au Liban-nord, la route de Halba, dans le Akkar, a été fermée, tout comme plusieurs axes routiers à Tripoli.
La livre bat un nouveau triste record
Les rassemblements aujourd'hui ont eu lieu à l’heure où le taux de change de la livre libanaise par rapport au dollar battait un nouveau record, en gravitant autour de 10.450LL sur le marché noir.
Le Liban connaît depuis l'été 2019 une grave crise économique et financière, marquée par la dépréciation de la monnaie nationale et une inflation galopante. Un marasme encore aggravé par les mesures de confinement sanitaire mises en place pour lutter contre la pandémie de coronavirus et la double explosion meurtrière au port de Beyrouth, en août de l'année dernière. A ces crises s'ajoute un blocage politique avec l'incapacité des protagonistes à former un gouvernement, depuis près de sept mois.
Réagissant pour la première fois aux dernières manifestations, le Premier ministre sortant, Hassane Diab, a estimé que le Liban était "au bord de l'explosion". Lors d'un discours adressé aux Libanais, il s'est également dit disposé à s'abstenir de remplir ses fonctions si cela contribue à la formation d'un gouvernement, "même si cela va à l'encontre de mes convictions".
commentaires (3)
La revolution devra etre contre le confessionalisme politique sinon elle n’aboutira a rien...
nabil zorkot
20 h 01, le 06 mars 2021