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Moyen-Orient - Iran

Échanger des prisonniers avec Téhéran : le dilemme des pays occidentaux

L’emprisonnement d’étrangers par le régime des mollahs est devenu une pratique récurrente ces dernières années.

Échanger des prisonniers avec Téhéran : le dilemme des pays occidentaux

L’opposant Rouhollah Zam, qui s’était exilé en France, a été pendu samedi en Iran. Ali Shirband/AFP/Mizan News Agency

C’est un dilemme devenu récurrent pour de nombreux gouvernements occidentaux : comment assurer la libération de leurs ressortissants détenus en Iran sans pour autant céder à la diplomatie des « otages » dont est accusé Téhéran par des militants des droits de l’homme ?

L’emprisonnement d’étrangers ou de ressortissants binationaux par le gouvernement iranien est devenu une pratique récurrente ces dernières années, selon les défenseurs des droits qui estiment que ces incarcérations reposent sur des charges fictives.

L’objectif selon eux ? Forcer les gouvernements occidentaux à négocier, parfois pendant des mois ou des années, pour libérer en échange des prisonniers iraniens.

La libération de l’Américain Xiyue Wang en décembre 2019 ou celle du Français Roland Marchal en mars 2020, toujours en échange de détenus iraniens, en sont des illustrations.

Et la libération de la chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert le mois dernier, dans un échange apparent avec trois Iraniens détenus en Thaïlande pour une attaque à la bombe manquée contre des diplomates israéliens à Bangkok en 2012, n’a fait que renforcer les inquiétudes.

Car ce type d’échanges pourrait inciter l’Iran à accélérer la détention d’étrangers et à fixer un prix encore plus élevé pour leur libération, alertent les militants.

« Ces dernières années, il est clair que ce que nous observons n’est rien d’autre que de la prise d’otages », dénonce Haidi Ghaemi, directeur exécutif du Centre pour les droits de l’homme en Iran, basé à New York. « Ce genre de négociations ne va qu’encourager et renforcer la prise d’otages par le gouvernement iranien », ajoute-t-il.

Des accusations balayées par Téhéran qui assure que ces prisonniers sont détenus selon une procédure judiciaire indépendante sans intervention gouvernementale.

Mais la semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a affirmé que l’Iran était ouvert à des échanges de prisonniers, assurant que si des détenus iraniens étaient libérés à l’étranger, Téhéran serait « prêt à rendre la pareille ». « On peut le faire demain, on peut même le faire aujourd’hui », a-t-il indiqué à la conférence Dialogue méditerranéen.

De quoi mettre de nombreux gouvernements dans une position embarrassante à l’heure où de nombreuses libérations restent encore à négocier. L’Américano-Iranien Siamak Namazi détenu depuis plus de cinq ans, l’Anglo-Iranienne Nazanin Zaghari-Ratcliffe emprisonnée en 2016 ou la Franco-Iranienne Fariba Adelkhah arrêtée en juin 2019 et assignée à résidence après une longue incarcération en sont quelques exemples.


La Franco-Iranienne Fariba Adelkhah a été arrêtée en juin 2019 à Téhéran. Thomas Arrive/Sciences Po/AFP


Marathon

Parmi les cas les plus récents, celui de Nahid Taghavi, une Germano-Iranienne de 66 ans arrêtée à la mi-octobre, selon sa fille Mariam Claren, dans son appartement à Téhéran, et qui est désormais à l’isolement à la prison d’Evin, sans raison officielle. « Je sais que ça va être un marathon et pas juste une course », reconnaît Mme Claren. « Je ne m’attends pas à la voir de retour avant Noël », explique-t-elle. Selon elle, des diplomates allemands ont aidé à faire passer des médicaments à sa mère en prison, mais Berlin « doit faire plus », pour assurer un accès aux autorités consulaires et comprendre pourquoi sa mère a été arrêtée. « Berlin ne peut pas ignorer cette violation des droits de l’homme et doit intervenir », réclame-t-elle.

Et quand on l’interroge sur les échanges de prisonniers, elle admet : « En principe, je pense que c’est un mauvais accord d’échanger des innocents contre des gens emprisonnés. Mais en tant que fille de Nahid Taghavi, dans ce cas, j’accepterais... »

D’autres cas sont encore plus sensibles comme celui d’Ahmadreza Djalali, chercheur irano-suédois condamné à mort pour espionnage et dont la famille craint l’exécution imminente.

Avec au moins 251 exécutions en 2019, l’Iran est, après la Chine, le pays qui a le plus recours à la peine capitale, selon le dernier rapport mondial sur la peine de mort d’Amnesty International.

La pendaison samedi de Rouhollah Zam, opposant qui a longtemps vécu en exil en France, en est la plus récente illustration.

La tactique de la prise d’otages n’est toutefois pas récente dans la République islamique : en 1979, une partie du personnel de l’ambassade américaine avait été retenu pendant 444 jours, tandis qu’en 2009, la libération de l’étudiante française Clotilde Reiss avait été rapidement suivie de celle d’Ali Vakili Rad, un Iranien reconnu coupable en 1991 du meurtre de l’ancien Premier ministre Shapour Bakhtiar. Paris avait alors réfuté tout lien de cause à effet.

« Nous sommes dans un dilemme, il n’y a pas de réponse facile », affirme Roya Bouroumand, cofondatrice du centre Abdorrahman Boroumand basé à Washington, qui milite pour les droits humains en Iran. « Quelqu’un qui n’a pas commis de crime est échangé avec quelqu’un qui en a commis un », déplore-t-elle, tout en reconnaissant que les gouvernements étrangers ne peuvent laisser leurs citoyens dans les geôles iraniennes. Pour Mme Boroumand, la seule option possible est de recommander aux étrangers et aux binationaux d’éviter tout voyage vers l’Iran.

Selon M. Ghaemi, il est impératif que les pays occidentaux montrent « un front uni et appellent cela par son nom : de la prise d’otages ».

Stuart WILLIAMS/AFP

C’est un dilemme devenu récurrent pour de nombreux gouvernements occidentaux : comment assurer la libération de leurs ressortissants détenus en Iran sans pour autant céder à la diplomatie des « otages » dont est accusé Téhéran par des militants des droits de l’homme ? L’emprisonnement d’étrangers ou de ressortissants binationaux par le gouvernement iranien est...

commentaires (3)

Prenez une leçon les libanais ne laissez pas que le Hezbollah prend le pouvoir ca sera la même chose déjà il a commencé ......

Eleni Caridopoulou

16 h 18, le 17 décembre 2020

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Commentaires (3)

  • Prenez une leçon les libanais ne laissez pas que le Hezbollah prend le pouvoir ca sera la même chose déjà il a commencé ......

    Eleni Caridopoulou

    16 h 18, le 17 décembre 2020

  • les iraniens ne sont pas seuls a profiter des libertes, des droits de l'homme chers aux pays democratiques. nous autres au Liban en payons le prix. Ils en profitent a souhait alors que chez eux ils continuent a pietiner ces memes principes, ideaux dont ils profitent.

    Gaby SIOUFI

    10 h 12, le 17 décembre 2020

  • Un Etat pirate!

    Yves Prevost

    07 h 27, le 17 décembre 2020

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