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Monde - Disparition

Valéry Giscard d’Estaing, le jeune président qui voulait moderniser la France

Celui dont l’élection avait fait souffler un vent de liberté sur le pays s’est éteint hier à 94 ans, des suites du Covid-19.

Valéry Giscard d’Estaing, le jeune président qui voulait moderniser la France

L’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing lors d’une conférence de presse au Parlement européen, à Bruxelles, le 6 juin 2003. Photo d’archives/François Lenoir/Reuters

Plus jeune président de la Ve République française lorsqu’il est élu en 1974, Valéry Giscard d’Estaing, mort hier à 94 ans des suites du Covid-19, se voulait l’incarnation d’une modernité triomphante, issue du centre-droit libéral et démocrate-chrétien qui a bâti l’Europe d’après-guerre. Né le 2 février 1926, engagé à 18 ans en 1944 dans la 1re armée du général de Lattre de Tassigny, Valéry Giscard d’Estaing disait admirer deux hommes, le général de Gaulle et Jean Monnet, père de l’Europe. Il n’a que 48 ans lorsqu’il est élu président en 1974, battant sur le fil François Mitterrand, et devient ainsi, dans une France qui enterre les Trente Glorieuses et digère Mai 68, le premier non-gaulliste à s’emparer de la présidence française.

Son élection fait souffler un vent de liberté sur le pays, après les années de Gaulle et Pompidou. Aux réformes progressistes – abaissement de la majorité à 18 ans, dépénalisation de l’avortement –, le nouveau président ajoute un style inédit, s’affichant au ski ou sur un terrain de football, convoquant sa fille sur ses affiches de campagne et son épouse Anne-Aymone lors de vœux télévisés pour la nouvelle année. L’homme à la silhouette élancée et au crâne dégarni renonce à l’apparat présidentiel pour sa photographie officielle, fait éclaircir le bleu et le rouge du drapeau tricolore et ralentir le rythme de la Marseillaise.

L’Auvergnat qui joue de l’accordéon à la télévision s’invite également chez les Français pour dîner, ouvre le palais présidentiel de l’Élysée à des éboueurs maliens pour un petit déjeuner de Noël, renouvelant une communication politique encore très cadenassée. Le très officiel Office de radiodiffusion et télévision françaises (ORTF) est supprimé quelques mois après son arrivée au pouvoir.

Giscard d’Estaing est pourtant un pur produit de l’élite française : polytechnicien et énarque, il s’était distingué sous les ordres du maréchal de Lattre de Tassigny lors de la Libération, puis pendant huit mois en Allemagne et en Autriche jusqu’à la capitulation du Reich. Né à Coblence, en Allemagne alors occupée par les forces françaises, Valéry Giscard d’Estaing est issu d’une grande famille bourgeoise.

Initiateur du G7

Entré au gouvernement dès 1959, VGE multiplie les postes ministériels à l’Économie et aux Finances dans les années 60 et 70. Le maire de Chamalières, son fief auvergnat, éclipse Jacques Chaban-Delmas, pour s’imposer comme chef de file de la droite jusqu’à sa victoire en 1974. Après des débuts prometteurs, VGE connaît une première crise avec la démission de son Premier ministre, Jacques Chirac, en 1976. Initiateur du « G7 », le club des dirigeants des pays les plus riches, il donne une impulsion décisive à l’axe franco-allemand aux côtés du chancelier Helmut Schmidt.

Le ralentissement économique consécutif au choc pétrolier, les affaires – suicide suspect de son ministre Robert Boulin, diamants offerts par le président centrafricain Bokassa – ainsi qu’une inflexion de sa politique, plus conservatrice et économiquement austère, pèsent sur sa popularité. Le 10 mai 1981, il échoue à se faire réélire face à François Mitterrand, qui recueille plus d’un million de voix de plus que lui et devient le premier président de gauche de la Ve République instaurée en 1958. « Je n’avais jamais imaginé la défaite », confiera-t-il plus tard.

Après son départ resté dans les mémoires – il laisse une chaise vide lors d’une ultime allocution télévisée – Valéry Giscard d’Estaing, alors seul ex-président en vie, traverse une profonde dépression. « Ce que je ressens, ce n’est pas de l’humiliation, mais quelque chose de plus sévère : la frustration de l’œuvre inachevée », écrit-il en 2006.

Échec européen

Élu conseiller général en 1982 dans son fief de Chamalières (centre), puis député en 1984, d’aucuns lui prêtent l’intention de diriger le premier gouvernement de cohabitation en 1986. Jacques Chirac lui est préféré.

Il redevient malgré tout l’un des leaders de la droite en dirigeant à nouveau son parti du centre, l’UDF. Mais, certain de la réélection de François Mitterrand, il ne concourt pas à la présidentielle de 1988. Sept ans plus tard, crédité de 2 % dans les études d’opinion, il renonce à nouveau.

À partir de la deuxième moitié des années 90, Giscard et le giscardisme disparaissent peu à peu du paysage politique. L’ancien président de la France, européen convaincu, poursuit pourtant un ultime but : devenir président de l’Europe. En 2001, il prend la tête de la Convention pour l’Europe, chargée de rédiger une Constitution européenne, qui sera rejetée par référendum (55 % de non) en 2005.

Cet économiste brillant, auteur de plusieurs ouvrages, dont un roman où il imagine une relation avec Lady Di, avait été élu en 2003 à l’Académie française, dans le fauteuil de l’ancien président sénégalais Léopold Sédar Senghor. En mai dernier, il avait fait l’objet d’une enquête pour agression sexuelle après la plainte d’une journaliste allemande qui l’accusait de lui avoir touché les fesses lors d’une interview plus d’un an plus tôt.

Source : AFP

Plus jeune président de la Ve République française lorsqu’il est élu en 1974, Valéry Giscard d’Estaing, mort hier à 94 ans des suites du Covid-19, se voulait l’incarnation d’une modernité triomphante, issue du centre-droit libéral et démocrate-chrétien qui a bâti l’Europe d’après-guerre. Né le 2 février 1926, engagé à 18 ans en 1944 dans la 1re armée du général de...

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