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L’audit et la loi électorale, nouveaux champs de la bataille Aoun-Berry

Le CPL et les FL convergent sur les deux dossiers conflictuels.

L’audit et la loi électorale, nouveaux champs de la bataille Aoun-Berry

Michel Aoun et Nabih Berry à Baabda, le 19 août 2020. Photo d’archives ANI

Le bras de fer opposant le président de la République, Michel Aoun, à celui de la Chambre, Nabih Berry, est loin de s’estomper. Un nouveau round de cette confrontation est d’ailleurs attendu à partir d’aujourd’hui, autour de l’audit juricomptable de la Banque du Liban, et le reste des institutions de l’État, mais aussi à cause de la relance du débat autour de la loi électorale.

Lors de son discours adressé aux Libanais à l’occasion de la fête de l’Indépendance, samedi soir, Michel Aoun avait clairement affirmé qu’« il n’y a pas de retour en arrière dans la lutte contre la corruption », se fixant comme priorités la poursuite de l’enquête autour de l’explosion du port et la concrétisation de l’audit juricomptable de la banque centrale. Sur ce dernier point, le président Aoun n’a pas tardé à passer à l’acte. Il a adressé hier un message à la Chambre, incitant les députés à « coopérer avec l’exécutif » à ce sujet.

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Ce geste en direction de Aïn el-Tiné intervient quelques jours après le retrait d’Alvarez & Marsal, la compagnie mandatée par le gouvernement pour mener cet audit au sein de la BDL, vendredi dernier. La compagnie en question avait décidé de jeter l’éponge, faute de pouvoir avoir accès aux documents qui lui permettent de mener à bien sa mission, à cause de l’argument du secret bancaire avancé par les parties concernées. Cet obstacle, le Courant patriotique libre et les Forces libanaises ont tenté de l’aplanir, en présentant des propositions de loi allant dans le sens d’une levée, temporaire ou définitive, du secret bancaire afin de paver la voie à l’audit, mais la Chambre ne les a toujours pas discutées. C’est donc dans une volonté de marquer un but dans les filets du chef du législatif que le président de la République aurait adressé sa missive à la Chambre. Il s’agirait, pour lui, de presser pour que le Parlement facilite la tâche. D’autant que Nabih Berry avait, en mars dernier, sciemment fait barrage au vote d’une loi portant sur le contrôle des capitaux et d’un texte articulé autour d’un haircut sur les dépôts bancaires.

La présidence de la République affirme préférer naturellement ne pas se noyer dans ce genre d’interprétations politiques, à même d’alimenter la polémique entre les deux camps, alors que l’heure est à la relance de l’économie du pays et à en assurer la stabilité politique. Un proche collaborateur du président, qui a requis l’anonymat, explique ainsi à L’Orient-Le Jour que la lettre adressée à la Chambre ne devrait pas être interprétée comme portant un message ou encore un défi à M. Berry. « Le président constate l’échec d’une tentative de réforme à laquelle il croit fermement, et qui est la clé de voûte de toute réforme préconisée par le Fonds monétaire international, et prévue dans le cadre de l’initiative française », ajoute ce proche collaborateur du chef de l’État. Il souligne, en outre, que M. Aoun « veut que le Parlement se prononce en faveur de l’audit ». Et de rappeler que « plusieurs experts ont déclaré que le pays n’aurait pas besoin de modifier ses lois pour procéder à une telle démarche ». Une position qui semble aller à l’encontre des efforts déployés par Ibrahim Kanaan, député aouniste du Metn, pour que soient modifiés les textes de loi en vigueur, notamment en ce qui a trait au secret bancaire.

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Nabih Berry a convoqué les parlementaires à une réunion qui se tiendra vendredi à 14 heures au palais de l’Unesco. Elle sera consacrée à l’examen du message présidentiel. Une façon pour M. Berry de se laver les mains de tout blocage du processus. « Nous n’avons fait qu’appliquer la Constitution, notamment pour ce qui est de l’obligation de répondre au message du président dans un délai de trois jours », commente un proche du président de la Chambre, sous couvert d’anonymat. Ce proche fait probablement référence au règlement intérieur de la Chambre, la Constitution ne disant rien à propos d’une réponse du Parlement au message présidentiel. Toujours est-il que dans certains cercles politiques, on rappelle que M. Berry n’avait pas adopté la même démarche lorsqu’en 2018, Michel Aoun avait demandé à la Chambre, dans la foulée des tractations pour former le gouvernement Hariri II, d’interpréter l’article 95 de la Constitution (…). Quoi qu’il en soit, et dans une volonté d’affirmer leurs positions favorables à ce que l’audit soit mené, plusieurs partis se rendront à la séance de vendredi. Contacté par L’OLJ, Georges Okaïs, député de Zahlé (Forces libanaises), assure que l’audit sera mis sur les rails, d’autant qu’il s’agit d’une réforme exigée par le FMI. « Nous sommes les seuls à traduire les paroles en actes en présentant une proposition de loi axée sur la suspension du secret bancaire pour une période d’un an », rappelle-t-il, estimant que « personne parmi les forces politiques en présence ne voudrait lutter contre la corruption ». « Nous continuerons à presser pour que notre proposition soit adoptée et que des appels d’offres soient examinés, afin de charger une nouvelle société de mener l’audit », dit-il.

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De son côté, le groupe parlementaire du Liban fort, dont le CPL est la principale composante, a appelé « les blocs parlementaires à prendre une position claire, lors de la séance de vendredi, à ce sujet », comme on peut lire dans un communiqué publié hier, à l’issue de la réunion hebdomadaire du bloc.

Berry n’en démord pas

Outre l’audit juricomptable, le président de la Chambre poursuit sa bataille pour que soit adoptée une nouvelle loi électorale, en dépit de la polémique que cela suscite, notamment dans les milieux chrétiens. C’est dans ce but que M. Berry a convoqué les commissions mixtes à une réunion conjointe, attendue aujourd’hui. L’occasion pour les parlementaires d’examiner la proposition de loi berryste, prévoyant la proportionnelle appliquée au Liban en tant que circonscription unique, alors que les deux grandes formations chrétiennes se félicitent du fait que la loi en vigueur (la proportionnelle appliquée à 15 circonscriptions avec vote préférentiel au niveau du caza) avait permis aux chrétiens de choisir leurs représentants à l’hémicycle, un objectif pour lequel ils luttaient depuis des décennies. Le double veto chrétien à la relance de ce débat s’est fait sentir aussi bien à Meerab que chez les aounistes. Dans un point de presse tenu hier, le leader des FL Samir Geagea a déclaré sans ambages : « Ce qui se passe au niveau de la loi électorale est un grand complot. » Et d’assurer que son parti prendra part à la réunion d’aujourd’hui.

Expliquant cette position, Georges Okaïs estime que la démarche de M. Berry est inopportune. « Elle vise à accentuer les divergences pour des raisons toujours floues », dit-il. « Cette insistance pour évoquer la question de la loi électorale est une tentative de modifier les équilibres politiques actuels, pour que l’emprise du Hezbollah sur la majorité parlementaire soit étendue », déplore le député de Zahlé.

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De même, le CPL redoute et refuse toute éventuelle pression en faveur d’une nouvelle loi électorale. Une position qu’il a clairement exprimée dans son communiqué hier. Contacté par L’OLJ, Alain Aoun, député de Baabda, souligne que « ce n’est pas le bon moment pour examiner un sujet aussi conflictuel. Et c’est ce que nous dirons lors de la séance de demain (aujourd’hui) ». Un point de vue que ne partage pas Aïn el-Tiné. « C’est une façon de répondre aux demandes du mouvement de contestation, et aux chrétiens se plaignant de mauvaise représentativité », déclare un proche de M. Berry.

Le bras de fer opposant le président de la République, Michel Aoun, à celui de la Chambre, Nabih Berry, est loin de s’estomper. Un nouveau round de cette confrontation est d’ailleurs attendu à partir d’aujourd’hui, autour de l’audit juricomptable de la Banque du Liban, et le reste des institutions de l’État, mais aussi à cause de la relance du débat autour de la loi...

commentaires (4)

Ils savent que le blocage de toute solution vient du ministre des finances qui représente Berry et HN , et qu’ont ils trouvé comme solution pour débloquer la situation? Leur accorder ce ministère d’office les yeux fermés sachant qu’aucune solution ne verra jamais le jour tant qu’ils tiennent les finances. N’est ce pas ce même président qui a donné son accord à Hariri pour céder afin de pouvoir imposer les représentants du CPL ,dans ce même gouvernement et ainsi ouvrir la porte à tout genre de marchandage alors que la constitution est bafouée et que personne n’en a cure. Il ne faut pas accorder de ministère aux partis. Seules les confessions devraient être représentées par des ministres compétents et loin de tout courant politique. C’est la solution au problème ne cherchons pas plus loin.

Sissi zayyat

10 h 55, le 26 novembre 2020

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Commentaires (4)

  • Ils savent que le blocage de toute solution vient du ministre des finances qui représente Berry et HN , et qu’ont ils trouvé comme solution pour débloquer la situation? Leur accorder ce ministère d’office les yeux fermés sachant qu’aucune solution ne verra jamais le jour tant qu’ils tiennent les finances. N’est ce pas ce même président qui a donné son accord à Hariri pour céder afin de pouvoir imposer les représentants du CPL ,dans ce même gouvernement et ainsi ouvrir la porte à tout genre de marchandage alors que la constitution est bafouée et que personne n’en a cure. Il ne faut pas accorder de ministère aux partis. Seules les confessions devraient être représentées par des ministres compétents et loin de tout courant politique. C’est la solution au problème ne cherchons pas plus loin.

    Sissi zayyat

    10 h 55, le 26 novembre 2020

  • QUAND LES ALIBABAS SONT EN DESACCORD !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 03, le 25 novembre 2020

  • Qu'attendons-nous pour demander fermement à ces deux Papis-hors-du-temps et de la réalité de rentrer enfin chez eux et de permettre ainsi au pays et à son peuple de vivre normalement ? Ils passent leur temps à proposer des diversions inutiles pour ne pas agir là où c'est vraiment urgent...et vital pour notrre survie... - Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 00, le 25 novembre 2020

  • Berry, qui a, depuis longtemps, la haute main sur le ministère des Finances, ne tient évidemment pas à ce que l'audit aboutisse. Quant au CPL, lui, responsable de la gabegie de l'EDL, veut au contraire, qu'une enquête fasse porter le chapeau de la déconfiture financière de l'Etat à Ryad Salamé. Celui-ci ayant été depuis longtemps choisi comme bouc émissaire idéal. En clair, chacun cherche à cacher ses propres turpitudes.

    Yves Prevost

    07 h 46, le 25 novembre 2020

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