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Société - Covid-19

Le bouclage localisé aurait permis d’aplanir la courbe de contaminations

La fermeture totale du pays pour une période de trois semaines permettrait de reprendre le contrôle de l’épidémie, et aux hôpitaux de se ressaisir, estime une spécialiste.

Le bouclage localisé aurait permis d’aplanir la courbe de contaminations

Une infirmière traitant un patient atteint du coronavirus, à l’hôpital Hôtel-Dieu de France. Photo Hôtel-Dieu de France/HO/AFP

Le Liban est entré hier dans sa quatrième semaine de bouclage partiel, une stratégie adoptée fin août par le comité interministériel pour le suivi du Covid-19 à la suite de laquelle des zones classées rouges au baromètre de l’épidémie seront fermées une semaine durant. Cette classification se fait sur la base du taux d’infections par rapport au nombre d’habitants au cours des deux dernières semaines. Ainsi, sont considérées régions à risque élevé de transmission communautaire, ou zones rouges, les villes et villages ayant enregistré pendant deux semaines huit cas ou plus par jour pour 100 000 habitants.

En recourant à cette stratégie de bouclage localisé, le gouvernement espère freiner – voire vaincre – la propagation de l’épidémie qui ne cesse de gagner du terrain avec près de 1 400 cas recensés au quotidien. Hier, le pays a enregistré 796 nouvelles contaminations sur près de 5 000 tests PCR effectués le dimanche – sachant qu’en cours de semaine près de 12 000 tests sont effectués en moyenne au quotidien–, et 14 décès supplémentaires. Ce qui fait grimper à 72 186 le nombre de cas cumulés depuis le début de l’épidémie au Liban en février, dont 579 décès, selon le bilan quotidien du ministère de la Santé. À ce jour, 35 802 personnes sont guéries et 742 sont toujours hospitalisées dont 242 en unités de soins intensifs.

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« Les résultats préliminaires de cette stratégie montrent que nous avons réussi à aplanir la courbe », explique à L’Orient-Le Jour Petra Khoury, conseillère du Premier ministre sortant Hassane Diab pour les affaires de santé et présidente de la Commission nationale chargée de la lutte contre le Covid-19. « J’aurais aimé que celle-ci ait commencé à baisser, mais au moins les chiffres ne sont plus à la hausse, poursuit-elle. Au cours des quatorze derniers jours, nous avons eu une hausse de 4 % des cas de contamination, ce qui n’était pas le cas avant cette période, lorsqu’ils avaient augmenté de plus de 50 %. »

Deux raisons ont entravé l’enregistrement de meilleurs résultats, estime Mme Khoury. « Pour marquer de nouveau moins de mille cas par jour, il faudrait, d’une part, que la population des régions concernées par le bouclage se conforme aux mesures prises, insiste-t-elle. Or celui-ci a été respecté de manière aléatoire selon les localités. D’autre part, il faut que le bouclage partiel englobe également les grande villes comme Beyrouth et certaines de ses banlieues qui, jusqu’à présent, ont été épargnées. » En cause, « un surpeuplement qui empêche la prise de telles mesures ». « Environ près du tiers de la population n’a pas encore été touché par cette nouvelle classification, constate Mme Khoury. Nous sommes en train de développer une stratégie pour ces grandes villes qui consiste à diviser la ville en quartiers et les cas en immeubles. Celle-ci devrait être finalisée d’ici à quelques jours dans l’espoir de pouvoir commencer à l’appliquer à partir de la fin de la semaine en cours. »

« Le meilleure remède »

Une semaine de bouclage est-elle suffisante pour lutter contre la propagation du SARS-CoV-2, sachant que le cycle du virus est de quatorze jours ? « Ce critère de deux semaines est en troisième position dans la stratégie, répond Mme Khoury. Nous nous basons plutôt sur le nombre de cas signalés dans la région classée rouge et qui est de l’ordre de huit cas par jour pour 100 000 habitants sur une période de deux semaines, comme sur les résultats des dépistages massifs que nous effectuons dans ces régions. Si plus de 3 % de ces tests sont positifs, cela signifie que la localité en question est à haut risque. Si par contre le taux des tests est inférieur à 3 %, il n’y a aucune raison de boucler la région pendant quatorze jours. Nous procédons semaine par semaine. »

Mme Khoury appréhende toutefois une nouvelle hausse de la courbe des contaminations, « à moins que la population des villes surpeuplées ne fasse preuve de plus de vigilance dans le respect des gestes barrières (port du masque, distanciation sociale et lavage fréquent des mains) et que les grandes villes ne soient soumises à ce zonage ». « Avec le début de la saison grippale, nous craignons que la situation dans les hôpitaux ne soit encore plus grave, d’autant qu’en temps normal, dix à quinze personnes souffrant de grippe sont admises en unités de soins intensifs pour pneumonie aiguë, met-elle en garde. Les choses se compliquent plus avec le Covid-19, puisque deux à cinq patients sont admis au quotidien en unités de soins intensifs. Nous sommes face à un gros problème, alors que les lits dans ces unités sont pratiquement tous occupés. »

Pour Mme Khoury, le bouclage généralisé du pays reste « le meilleur remède » à cette situation, mais ne peut pas être réalisé. « Partout dans le monde, pas un seul pays n’est en mesure d’imposer un second bouclage généralisé, malgré les ressources dont il dispose et les motivations qu’il peut offrir à sa population », constate-t-elle.

« Affronter le pire scénario »

Pascale Salameh, professeure en épidémiologie à l’Université libanaise et membre du Comité indépendant pour la lutte contre le Covid-19, est convaincue de la nécessité d’un bouclage généralisé pour une période moyenne de trois semaines « afin de permettre au système hospitalier de se ressaisir, d’autant que la situation dans les hôpitaux est très alarmante ». « Au fil des jours, nous sommes en train de perdre le contrôle de l’épidémie, déplore-t-elle. Les patients font le tour des hôpitaux à la recherche d’un lit pour se faire traiter. On ne peut plus se permettre d’essayer. Il faut revenir à un bouclage sérieux, au risque d’affronter le pire scénario. »

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Se penchant sur la stratégie de bouclage localisé adoptée par le gouvernement, elle constate qu’elle est bonne en théorie, mais qu’elle n’a pas été bien appliquée, de nombreuses municipalités n’ayant pas coopéré dans ce sens. « Nous savons qu’au Liban, des régions ont été bouclées alors qu’elles comptaient peu de cas, au moment où d’autres qui présentaient réellement un risque élevé de transmission communautaire ont été ménagées, observe-t-elle. Il s’est avéré par la suite qu’une erreur dans le calcul des cas et dans l’enregistrement des lieux de résidence des personnes testées positives a conduit à cette situation. De plus, on sait qu’il y a un manque d’informations concernant près d’un tiers des cas, parce que souvent les noms et les numéros de téléphone sont faux. De ce fait, un grand nombre de cas ne figure pas dans le calcul du taux d’incidence sur lequel on se base pour imposer ce bouclage, sachant que le calcul aurait dû être fait suivant le nombre de cas et non du taux d’incidence, pour une gestion plus facile de l’épidémie. Par ailleurs, puisque sur le plan du cadastre, certaines localités sont enchevêtrées, il aurait été préférable d’inclure plusieurs régions avoisinantes dans cette décision de bouclage. »

En ce qui concerne les résultats, Mme Salameh estime qu’ils ne sont pas très probants. « Nous avons pu constater une stabilisation du nombre de cas au quotidien, qui reste quand même élevé, note-t-elle. Par ailleurs, on ignore comment ces tests sont effectués. Le ministre (sortant de la Santé, Hamad Hassan) a déclaré aujourd’hui (hier) que ceux-ci se font désormais de façon passive, c’est-à-dire qu’on attend que les personnes qui ont un doute viennent se faire tester, les équipes du ministère n’ayant plus les moyens de retracer les cas. Cette stabilisation des cas pourrait être donc un artefact parce qu’on a changé la méthode de dépistage. » Cela peut également expliquer cette chute du nombre de cas par rapport à dimanche dernier, 995 contaminations ayant été signalées sur près de 5 500 tests effectués.

Le Liban est entré hier dans sa quatrième semaine de bouclage partiel, une stratégie adoptée fin août par le comité interministériel pour le suivi du Covid-19 à la suite de laquelle des zones classées rouges au baromètre de l’épidémie seront fermées une semaine durant. Cette classification se fait sur la base du taux d’infections par rapport au nombre d’habitants au cours des...

commentaires (2)

Oui, Madame Khoury, la meilleure solution pour vous, c'est la fuite en avant. Dites que vous avez mal géré cette situation dès le départ. Le gouvernement qui continue d'importer le virus quotidiennement par dizaines, est responsable. Mais qui ?

Esber

06 h 17, le 27 octobre 2020

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Commentaires (2)

  • Oui, Madame Khoury, la meilleure solution pour vous, c'est la fuite en avant. Dites que vous avez mal géré cette situation dès le départ. Le gouvernement qui continue d'importer le virus quotidiennement par dizaines, est responsable. Mais qui ?

    Esber

    06 h 17, le 27 octobre 2020

  • ATTENDEZ QUELQUES JOURS AVANT DE LE CERTIFIER.

    LA LIBRE EXPRESSION

    05 h 40, le 27 octobre 2020

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