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Société - coronavirus

La décision d’isoler des localités risque de se solder par un échec

Bilan mitigé dimanche, au premier jour du bouclage de 111 villages libanais.

La décision d’isoler des localités risque de se solder par un échec

Les équipes du ministère de la Santé multiplient les tests de dépistage. Photos ANI

Respecté par endroits, ignoré ailleurs. C’est un bilan en demi-teinte qui a marqué la première journée d’isolement de 111 localités libanaises, pour cause d’explosion des cas de contaminations au Covid-19. De fait, le chiffre des contaminations enregistrait hier 1 002 nouvelles atteintes et 8 décès durant les dernières 24 heures, portant le total à 44 482 atteintes (parmi lesquelles 19 782 rétablissements) et 406 décès depuis le mois de février. En demi-teinte, parce que les populations concernées ne voient pas d’un bon d’œil l’obligation de se confiner de nouveau, alors que sévit la crise économique. Parce que la confusion règne sur les mesures annoncées par les autorités, et notamment l’autorisation d’ouverture partielle et de livraison à domicile accordée aux boulangeries et aux supermarchés. Parce que aussi la journée dominicale est de manière générale particulièrement fructueuse pour les commerces de bouche. Que la confiance entre la population et les autorités s’est davantage érodée après l’explosion au port de Beyrouth. Parce que enfin certains villages peu touchés contestent la décision du ministère de l’Intérieur de les boucler pendant plus d’une semaine et que nombre de municipalités n’ont pas les moyens de contraindre les habitants à rester chez eux.

L’appel de Hassan aux hôpitaux privés

Le ministre de la Santé, Hamad Hassan, appelait pourtant hier « les hôpitaux privés du pays à s’équiper au plus vite pour accueillir les cas de coronavirus », en référence à la saturation de l’hôpital gouvernemental Rafic Hariri. Et ce lors d’une visite à l’hôpital universitaire Dar el-Amal de Douris à Baalbeck. À ses côtés, le député du Hezbollah, Ali Mokdad, mettait en garde une population peu respectueuse des mesures sanitaires. « Si le laisser-aller se poursuit, nous risquons de faire pire que le scénario à l’italienne », a-t-il martelé. Samedi, le Liban avait atteint un pic inégalé jusque-là : 1 321 nouvelles atteintes. Conformément à une circulaire émise vendredi par le ministère de l’Intérieur sur recommandation de la cellule de crise sanitaire, le bouclage devrait se poursuivre jusqu’au lundi 12 octobre. Il est accompagné d’une campagne massive de dépistage dans les localités concernées et d’appels à respecter les mesures.

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Difficile, en l’absence de données officielles globales et du maintien de la circulation sur les artères principales, d’évaluer en un chiffre le degré de respect du bouclage des 111 localités. Mais ici ou là, des chiffres ou des témoignages d’habitants permettent de prendre le pouls du déroulement de la journée, marquée par une tendance à la désobéissance. À titre d’exemple, les huit villages de l’est de Saïda, (Bramiyé, Majdelioun, Aïn el-Delb, Miyé-Miyé, Abra, Hlaliyé, Kfarjarra et Zahrani) ont respecté à 90 % l’obligation de bouclage, rapporte l’Agence nationale d’information. Dans la région du Akkar, « le village de Kobeyate a respecté à 100 % l’ordre de fermeture » et à Majdala, la municipalité évoque un « taux élevé » de respect des mesures. Il faut dire que par endroits, les forces de l’ordre veillaient. À Minié, les mosquées se sont contentées de lancer les appels à la prière, invitant les fidèles à prier chez eux. Quant aux villages de Cheikh Taba et de Mhammara, revendiquant zéro nouveau cas ces derniers jours et un rétablissement de tous les cas avérés, ils rejettent ouvertement les restrictions imposées par les autorités.

De même, les villages du Metn et du Kesrouan, tenus de s’isoler, ont plus ou moins respecté la consigne. Contestant la décision officielle, des présidents de municipalité ont tout simplement refusé de s’y conformer et n’ont pas manqué de le dire. À Zalka, par exemple, la messe a été dite en catimini. Les fidèles s’y sont rendus par une porte latérale. À Baabdate, qui s’articule autour de la route principale menant à Dhour Choueir et à Zahlé, la circulation routière était normale et « aucun signe de fermeture » n’était visible, rapporte une habitante.

Dans un village de l’est de Saïda, la fermeture est quasi totale.

La crainte pour l’emploi

Mais au-delà des bons points donnés à telle ou telle autre localité, nombreux sont les habitants qui ont eu recours à un plan B pour éviter le confinement. Résidant à Fanar, une employée de banque qui travaille à Beyrouth raconte avoir quitté provisoirement le domicile familial pour aller s’installer chez une proche dans une région épargnée par les mesures décidées. En ces temps de disette pour le secteur bancaire, elle craignait de voir ses journées de confinement comptabilisées comme un congé, ou au pire de perdre son emploi.

Face à la grogne des contribuables, le président de la municipalité de Hadath, Georges Aoun, a rappelé aux habitants de la région que le bouclage de certaines localités n’a rien d’arbitraire, mais qu’il est le résultat « d’un nombre choquant de contaminations qui ont dépassé la cote d’alerte ». « Nous avons 218 cas avérés et plus de 350 cas de contacts que nous suivons minutieusement », a-t-il affirmé dans un communiqué.

Côté dépistage, dans les villages en isolement de Zghorta (Zghorta, Ehden, Rachiine, Miriata, Miziara, Ardé), les équipes médicales du ministère de la Santé ont effectué 650 tests de dépistage, suite à une hausse des cas de contamination. Et à l’intention de tout habitant côtoyant d’autres personnes dans le cadre professionnel, 2 000 tests rapides ont été conduits. Même ambiance à Roumine (Nabatiyé) ou dans le Metn (19 villages isolés), où les équipes du ministère, en coordination avec la municipalité, ont testé des dizaines d’habitants.

Contactée par L’Orient-Le Jour, la conseillère du Premier ministre sortant Hassan Diab pour les affaires de santé, Petra Khoury, également présidente de la Commission nationale chargée de la lutte contre le Covid-19, reconnaît que le bilan de la première journée de blocage est « mitigé », d’autant que « nombre de municipalités rejettent l’obligation de confinement ». « Dans certaines localités, des messes ont été dites et des déjeuners de famille ont eu lieu, comme si de rien n’était, déplore-t-elle. Dans d’autres, les habitants se sont pliés aux règles et n’ont pas bougé de chez eux. » « Ce refus de se conformer est grave », estime-t-elle. « Nous exhortons les habitants à respecter les règles de confinement, parce qu’il n’y a plus de place dans les hôpitaux », martèle-t-elle. Si elle montre du doigt les citoyens qui font preuve d’une « flagrante irresponsabilité », elle ne peut s’empêcher d’égratigner l’État « qui ne parvient pas à faire appliquer ses décisions ». Revenant par ailleurs sur la contestation de certains chiffres, elle rappelle que le nombre de cas dans les localités est comptabilisé en fonction du lieu de résidence des personnes atteintes. « Toute personne qui se plie au test PCR est tenue de donner l’adresse de son lieu de résidence. Si elle donne une fausse adresse ou celle de sa résidence d’été, elle pourrait effectivement venir grossir le nombre d’atteintes dans certaines localités », explique-t-elle. « D’où l’importance du rôle des municipalités, qui opèrent une vérification des données », souligne-t-elle.

Lundi, deuxième journée d’isolement pour les 111 localités concernées, sera une journée-test. Face à la montée inexorable des contaminations et à la saturation des hôpitaux, la population fera-t-elle preuve un tant soit peu de responsabilité ?

Respecté par endroits, ignoré ailleurs. C’est un bilan en demi-teinte qui a marqué la première journée d’isolement de 111 localités libanaises, pour cause d’explosion des cas de contaminations au Covid-19. De fait, le chiffre des contaminations enregistrait hier 1 002 nouvelles atteintes et 8 décès durant les dernières 24 heures, portant le total à 44 482...

commentaires (2)

Ce n'est pas seulement une remarque pour le Liban, mais aussi pour l'Europe : l'interdiction de messes, n'est-ce pas contre la liberte religieuse ? Aussi en Europe je trouve qu'on va tres loin la-bas, dans mon opinion meme trop loin, je pense qu'interdire des prieres soit chretiennes, juifs, ou islamiques, on ne peut pas simplement faire cela. L'objectif de combattre une maladie ne justifie pas tous les moyens.

Stes David

10 h 03, le 05 octobre 2020

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Commentaires (2)

  • Ce n'est pas seulement une remarque pour le Liban, mais aussi pour l'Europe : l'interdiction de messes, n'est-ce pas contre la liberte religieuse ? Aussi en Europe je trouve qu'on va tres loin la-bas, dans mon opinion meme trop loin, je pense qu'interdire des prieres soit chretiennes, juifs, ou islamiques, on ne peut pas simplement faire cela. L'objectif de combattre une maladie ne justifie pas tous les moyens.

    Stes David

    10 h 03, le 05 octobre 2020

  • POUR ARRETER L,EXPANSION DU FLEAU IL FAUT PRENDRE DES MESURES SEVERES ET CONCRETES QUE LES CITOYENS DEVRAIENT RESPECTER SINON CA VA ALLER VERS LE PIRE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 36, le 05 octobre 2020

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