Le numéro deux du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, a fait vendredi une distinction entre les sanctions américaines qui ont frappé mardi deux cadres du mouvement Amal et des Marada (deux formations politiques alliées au parti chiite) et la formation du futur gouvernement libanais.
Aucune avancée ne semble poindre à l'horizon dans la formation du nouveau cabinet dont est chargé le Premier ministre désigné, Moustapha Adib, et que les différentes parties libanaises s'étaient engagées à mettre sur pied dans les deux semaines suivant la visite du président français, Emmanuel Macron, à Beyrouth le 1er septembre.
"Se mobiliser davantage"
Les Etats-Unis ont imposé mardi des sanctions contre les anciens ministres des Travaux publics, Youssef Fenianos, et des Finances, Ali Hassan Khalil, pour "corruption" et soutien au Hezbollah, considéré comme une organisation terroriste par Washington. Dans un communiqué, le département du Trésor indique que les deux ministres ont "fourni un soutien matériel au Hezbollah et se sont livrés à des actes de corruption".
"Les sanctions américaines sont une attaque déclarée contre le Liban et une tentative de modifier l'équation politique" dans le pays, a affirmé le dignitaire chiite dans un entretien avec la chaîne Russia Today (RT), dont les propos ont été publiés par le bureau de presse du parti. Il a souligné que la décision de cibler des anciens ministres et alliés du Hezbollah est due au fait que les sanctions lancées précédemment contre des membres du Hezbollah "n'avaient pas changé la donne" et que cela permettrait d'imposer "plus de pression" sur le Liban. Cette nouvelle décision de Washington est, pour Naïm Kassem, "l'annonce de l'échec de la politique" des Etats-Unis en matière de sanctions. Il a encore souligné qu'elles ne risquaient pas d'impacter les alliances entre le parti chiite et ses alliés "qui sont basées sur le principe de l'indépendance du pays et de la lutte contre l'occupation". Au contraire, a-t-il poursuivi, cela pourrait "consolider leurs positions" vis-à-vis de leur alliance avec le Hezbollah.
Le numéro deux du parti chiite a encore estimé que le Liban officiel devrait se mobiliser d'avantage vis-à-vis de ces sanctions, alors que le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, s'est contenté, à leur annonce, de demander au ministre sortant des Affaires étrangères, Charbel Wehbé, de se "renseigner sur les circonstances" qui ont abouti à la décision du Trésor américain.
"Considérations internes"
Le cheikh Kassem a par ailleurs affirmé que le fait que des personnalités phares du mouvement Amal et des Marada soient ciblées par Washington et le processus de formation du gouvernement étaient deux processus "totalement différents". "La formation du cabinet est soumise à des considérations internes, notamment au poids des différentes parties au sein du Parlement, vu que la future équipe ministérielle devra recevoir la confiance de la Chambre", a-t-il ajouté. Il a affirmé que tout gouvernement qui serait formé sans certaines forces politiques en raison des sanctions risquerait de "rencontrer des problèmes", et qu'il fallait donc former le cabinet "indépendamment" de la décision du Trésor américain.
Il ne s'est toutefois pas prononcé sur l'éventualité d'une formation "proche" du gouvernement de Moustapha Adib, soulignant que cela dépend "des contacts" de ce dernier avec les différentes formations politiques. "Jusqu'à présent nous n'en sommes toujours qu'au dialogue et aux discussions, a-t-il indiqué. Je ne sais pas si nous verrons les résultats d'ici quelques jours ou quelques semaines". Naïm Kassem a en outre rejeté l'éventualité d'un cabinet "indépendant", soulignant qu'il n'existait pas au Liban de partie "neutre ou indépendante". "Tout le monde a des appartenances politiques", a-t-il ajouté. Et d'estimer que l'expérience d'un gouvernement de technocrates (celui de Hassane Diab, tombé le 10 août) a prouvé qu'il nécessitait une "impulsion politique afin de se renforcer". "Nous sommes en faveur d'un cabinet qui reprend le plus grand nombre possible de parties politiques", a-t-il lancé.
"Enlisement de l'initiative française"
Le cheikh Kassem est également revenu sur la question de l'initiative lancée par Emmanuel Macron pour sortir le Liban de sa crise, et à laquelle toutes les parties politiques libanaises se sont engagées, et à ses relations avec la politique américaine par rapport au pays du Cèdre. Selon lui, la volonté des Etats-Unis est de "garder le Liban sous pression", mais Washington a "approuvé" l'initiative française parce qu'elle vise à "empêcher l'effondrement" du pays. "Nous attendons avec méfiance la position américaine" au sujet du Liban, a-t-il ajouté, affirmant que les Etats-Unis essaient toujours "d'empêcher tout avancement" du pays. "Nous nous attendons donc à ce qu'à un moment, l'initiative française s'enlise à cause des Etats-Unis. C'est quelque chose de possible", a-t-il affirmé.
En ce qui concerne les suites de la double explosion meurtrière dans le port de Beyrouth, le 4 août, Naïm Kassem a estimé que la volonté de certains donateurs de ne pas passer par l'Etat et de fournir les aides humanitaires directement à des organisations ou au peuple libanais "ne permettra pas d'atteindre les objectifs requis en matière de reconstruction". Il a toutefois concédé que les aides ne pouvaient pas être "liées à des conditions" de la part de l'Etat. Il a encore souligné que l'annonce faite par le gouvernement sortant de Hassane Diab que les résultats de l'enquête sur les causes de la déflagration seraient rendus publics en cinq jours avait été "précipitée". Il a estimé qu'une enquête internationale à ce sujet risquait de "ne jamais aboutir à des résultats" et de coûter "extrêmement cher" au Liban, soulignant toutefois l'importance que l'enquête libanaise se fasse sans ingérence politique.
Pas de guerre avec Israël "pour le moment"
Enfin, sur le plan des tensions à la frontière entre le Liban et Israël, le cheikh Kassem a affirmé "ne pas s'attendre à une guerre israélienne au Liban pour le moment". Il a notamment souligné que cela était dû au fait que l'Etat hébreu était aux prises avec plusieurs autres affaires, notamment la pandémie de coronavirus, les tentatives de normalisation avec d'autres pays, la volonté d'"occuper plus de territoires" avec le soutien du président américain Donald Trump et le fait que Tel Aviv ne "parvient pas à faire plier Gaza". Le Hezbollah de son côté "n'a jamais été l'initiateur" de conflits avec Israël. "Nous serons toutefois prêts à réagir si les Israéliens décident de lancer une guerre", a-t-il conclu.
commentaires (13)
EN DISANT NAÏM KASSEM TU ES UN GÉNIE J’AI INVENTÉ LE VERBE COMPLIMENTIR OU BIEN. JE. CIBLAIS. LA NIAISERIE JE PENSE DE L’INDIVIDU À SON NIVEAU SUBLIMINAL!
PROFIL BAS
21 h 55, le 11 septembre 2020