Le président libanais, Michel Aoun, a affirmé qu'aucun membre de sa famille n'était "impliqué dans la corruption", en référence aux accusations portées contre son gendre, le leader du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, l'une des principales cibles du mouvement de contestation contre la classe dirigeante. "Aucun membre de ma famille n'est impliqué dans la corruption. Au cas où il y aurait des suspicions du contraire, j'agirais envers eux comme envers les autres : je les enverrais devant l'autorité d'investigation judiciaire afin qu'ils soient sanctionnés si leur implication est avérée", déclare le chef de l’État dans une interview publiée jeudi dans l'hebdomadaire français Paris Match.
"Le Liban souffre d'une corruption endémique. Il y a une classe politique qui protège les corrupteurs et cache leurs pratiques, car elle en profite de façon directe", souligne le président Aoun, avant de poursuivre : "il est très difficile de casser cette alliance solide et bien enracinée parce qu’elle dépasse les clivages politiques pour se rejoindre sur les intérêts financiers. Oui, c’est difficile d’en venir à bout, mais je suis déterminé à continuer la lutte pour disloquer ce cartel mafieux. J’ai tenté de le faire durant les quatre années de mon mandat, mais j’avoue ne pas avoir réussi car beaucoup occupent des postes importants dans l’État". Néanmoins, dit-il, "une première étape fondamentale dans la lutte contre la corruption a commencé avec l’approbation d’un forensic audit (audit juricomptable) qui sera effectué à la Banque du Liban".
"Pas d’aide sans réformes : on a bien reçu le message"
La lutte contre la corruption et la mise en œuvre de réformes structurelles sont deux des principales demandes de la communauté internationale, dont la France, pour aider le Liban, qui traverse sa plus grave crise économique et financière de son histoire moderne, et a été frappé le 4 août dernier par une double explosion dans le port de Beyrouth qui a fait plus de 180 morts, 6.500 blessés et dévasté plusieurs quartiers de la capitale, laissant plus de 300.00 personnes sans abri. Mais le Liban est sans gouvernement depuis la démission le 10 août dernier du cabinet de Hassane Diab.
"La position de la France, tout comme celle des autres pays, est claire : pas d’aide sans réformes. On a bien reçu le message et on est bien d’accord là-dessus. Cependant, cela nécessite la formation d’un gouvernement. Nous sommes une République parlementaire. C’est donc le Parlement qui donne sa confiance au nouveau gouvernement et c’est lui également qui agrée les réformes. Ce chemin légal complique le processus, car certains partis politiques persistent à placer des embûches devant toute réforme", explique Michel Aoun.
Dans ce contexte, le président libanais ne voit pas l'intérêt de la communauté internationale pour le Liban "comme une pression, encore moins comme une ingérence dans les affaires libanaises". "Ces pays veulent nous aider. Ils nous avisent et nous conseillent. La décision finale appartient au Liban et à son peuple. Aujourd’hui, il est essentiel que nous parvenions à réaliser les réformes auxquelles nous nous sommes engagés lors la conférence CEDRE. Et nous espérons que l’aide internationale équivaudra aux besoins du Liban afin de permettre de relancer le pays".
Sur la double explosion meurtrière de Beyrouth, Michel Aoun affirme pouvoir "soulager" la "peine indescriptible des victimes" en "veillant à ce que l’enquête se fasse en toute transparence pour désigner les coupables, quel que soit leur grade ou niveau de responsabilité. Ils seront jugés, et je me suis engagé là-dessus lors du Conseil des ministres avant la démission du gouvernement ; d’autre part, en faisant tous les efforts nécessaires pour solliciter l’aide des pays amis afin d’indemniser les victimes. Beyrouth et son port seront reconstruits, et je serai attentif à ce qu’on le fasse sans nuire à leurs vestiges culturels".
Aoun ne regrette "absolument pas" d'être président
Interrogé sur le Hezbollah, le chef de l'Etat a déclaré : "Si sa priorité allait à l’Iran plutôt qu’au Liban, il ne participerait pas à la vie politique libanaise en faisant partie d’un bloc parlementaire et en ayant des ministres au gouvernement depuis des années. Le Hezbollah suit et applique la loi libanaise. Il n’utilise ses armes qu’en tant que résistance pour défendre le pays contre Israël", assurant que le parti chiite n'avait pas attaqué les manifestants pacifiques à Beyrouth.
Dans cet entretien sur double page, Michel Aoun affirme qu'il ne regrette "absolument pas" d'être le président du pays. "Certains parmi mes partisans déplorent le fait que je traverse cette période difficile et délicate. D’autres pensent, au contraire, que ma présence est une chance parce qu’ils ont confiance en moi et en ma volonté d’aller jusqu’au bout pour sauver mon pays. Et puis il y a ceux qui, sous le coup de la colère et de la peine, crient leur révolte et demandent ma démission. Une chose est sûre, je n’ai jamais fui devant la responsabilité. J’étais ainsi en tant que militaire jusqu’à devenir chef de l’armée. J’étais également ainsi dans mon engagement politique... Je ne changerai pas aujourd’hui dans ce palais présidentiel de Baabda".
"Mon rêve est de nettoyer le Liban de la corruption qui le mine jusqu’aux os et d’instituer un Etat laïc. Mon rêve est aussi d’établir une nouvelle alliance autour du “vivre-ensemble” avec toutes les forces vives. Et si nous ne pouvons pas être unis, alors trouvons un système de cohabitation et arrêtons de creuser des tranchées qui ne nous protégeront pas les uns des autres, ni de nous-mêmes", souligne Michel Aoun. "On se relèvera avec l’aide de tous les Libanais, le soutien des pays frères et amis, en particulier celui de la France d’Emmanuel Macron" qui doit se rendre au Liban en début de semaine prochaine à l'occasion du centenaire du Grand Liban.
commentaires (39)
"Mon rêve est ... d’instituer un Etat laïc." Avec le hezbola Mr aoun?? "Mon rêve est aussi d’établir une nouvelle alliance autour du “vivre-ensemble” avec toutes les forces vives." Avec Samir Geagea,en mettant à la poubelle l'accord de Meerab et guerre de l'élimination que vous avez perdue à l'époque Mr Aoun? et Walid Joumblatt, que vous avez essayer d'accuser et de mettre en prison? etc etc...
DJACK
18 h 31, le 29 août 2020