Des centaines de Libanais se sont rassemblés mardi en fin d'après-midi devant la statue de l'Émigré, qui fait face au port de Beyrouth, à la sortie-nord de la ville pour rendre hommage aux victimes de l'immense explosion meurtrière qui a ravagé la capitale il y a une semaine jour pour jour, et réclamer la chute des dirigeants qu'ils tiennent pour responsables de la tragédie.
Peu après 18h, les manifestants "contre le crime du siècle" ont observé une minute de silence, à l'heure exacte de la seconde déflagration d'une violence inouïe qui avait dévasté de nombreux quartiers de Beyrouth. Dans la ville, les églises ont fait sonner leurs cloches, et les mosquées ont lancé des appels à la prière. Des images de la déflagration et de ses dégâts ont ensuite été projetées sur un grand écran installé pour l'occasion, au son de la chanson "Ya Beyrouth" de Magida el-Roumi, appelant la ville à "renaître de sous les décombres". Des drapeaux libanais étaient brandis par les manifestants, dont nombreux étaient vêtus de noir. Les équipes de secours, les secouristes et les médecins de la Croix-Rouge, ainsi que la Défense civile, ont été applaudis, avant que le nom de toutes les victimes aient été prononcés et projetés sur l'écran. Bougies allumées, les manifestants se sont ensuite dirigés vers la place des Martyrs. “Nous n’oublions pas nos martyrs, nous les ressusciterons”, dit le speaker.
"Beyrouth est libre, Iran dehors", ont scandé des manifestants arrivés devant l'immeuble du quotidien an-Nahar, tandis qu'un peu plus loin dans la rue de la municipalité, d'autres ont érigé sur le mur empêchant l'accès au Parlement une potence à laquelle était accrochée une effigie de Michel Aoun, à laquelle ils ont mis le feu. Comme les soirées précédentes, certains contestataires ont lancé des pierres et des morceaux de débris en direction des forces de l'ordre, qui ont réagi en jetant du gaz lacrymogène. Une grande majorité des protestataires s'est alors retirée vers la place des Martyrs.
"C'est tout le système qui doit tomber"
La rue tient la classe politique pour responsable des explosions du 4 août dans le port de Beyrouth, où étaient conservées 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium qui ont explosé, selon l'explication des autorités. Pour apaiser la rue après l'explosion, une catastrophe de trop pour une nation en crise, le gouvernement de Hassane Diab a présenté lundi sa démission. Mais une semaine jour pour jour après la tragédie, les Libanais exigent de voir les responsables du drame traduits en justice, réclamant des comptes pour la négligence de l'État.
"Je suis descendu pour tous ces gens qui sont morts et dont le sang n'a pas encore séché", explique Walid Abou el-Hosn, médecin de profession. "C'est tout le système qui doit tomber. Il ne doit pas rester un seul d'entre eux, ou alors on ne pourra pas reconstruire un nouveau Liban".
"Nous ne nous arrêterons pas à la démission du cabinet. C'est tout le système qui doit tomber", lance une manifestante présente sur les lieux du rassemblement, où se trouve un panneau sur lequel elle inscrit "Gouvernement transitoire de salut formé de spécialistes avec des prérogatives exceptionnelles, pour préparer les prochaines élections législatives".
"Tous les jours, je viens de Saïda pour aider", affirme Rita, qui affirme être venue à la manifestation "pour la commémoration de l'explosion". "La démission du gouvernement ne veut rien dire. S’ils avaient vraiment compris, ils auraient remis leur démission le jour même de l’explosion. Maintenant on veut une démission totale, du président et du Parlement", lance-t-elle.
"Je suis en première ligne depuis samedi", souligne de son côté Aya, âgée de 24 ans, jour du premier grand rassemblement après l'explosion dans le centre-ville de Beyrouth qui avait été émaillé de violences entre protestataires et fores de l'ordre. La manifestante plaide pour l'organisation de rassemblements massifs "une ou deux fois par semaine".
commentaires (7)
Heureusement que certains libanais refusent de baisser les bras et d’abandonner, malgré tout les malheurs qu’ils subissent. Il n’y a que le peuple qui peut sauver sa nation. Qu’attendent les autres pour les rejoindre au plus vite pour leur prêter main forte et grossir les rangs des révoltés résistants. Il faut le faire pour déborder tous les mal intentionnés et les faire fuir. Que représentent 1000 2000 ou 100.000 individus face à des millions de citoyens déterminés et qui n’ont plus rien à perdre sinon leur pays s’ils restent les bras croisés à se lamenter?
Sissi zayyat
15 h 23, le 12 août 2020