
Le patriarche maronite, Béchara Raï, recevant à Dimane l’uléma chiite Ali el-Amine. Photo ANI
Le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, a annoncé hier qu’il a l’intention d’appeler à un dialogue national sur la notion politique de « neutralité », telle qu’il la défend depuis trois semaines, c’est-à-dire d’un non-alignement du Liban sur des axes régionaux ou internationaux, hormis celui ou ceux qui touchent à la défense de la cause palestinienne.
Recevant hier à Dimane le député Antoine Habchi (Forces libanaises) et l’uléma chiite indépendant Ali el-Amine, qui appuie sa cause, le patriarche a déclaré que « la neutralité est une part essentielle de la genèse et de l’histoire du Liban . Pour sa part, le dignitaire chiite, hostile à l’idéologie du Hezbollah, a déclaré : « La neutralité est ce qui ferait du Liban un État indépendant, à l’écart des conflits extérieurs. Ce que l’on entend par neutralité, c’est un pays qui impose sa souveraineté et son autorité sur l’ensemble de son territoire, et une référence pour l’ensemble des catégories, des forces et des partis politiques. »
L’ancien mufti, victime d’une cabale qui l’a exclu de sa ville natale, Tyr, a par ailleurs directement remis en cause la « logique du nombre » que certains opposants à la proposition du patriarche Raï ont brandie pour discréditer sa proposition. « La logique de la majorité est une logique confessionnelle que nous avons refusée, a-t-il dit. Il nous faut sortir de derrière les remparts du confessionnalisme vers l’espace national qui nous accueille tous. Nul ne peut prétendre que telle communauté est numériquement majoritaire ; voilà une logique que la communauté chiite et toutes les communautés ont rejetée. Nous croyons tous au caractère définitif de la patrie et au vivre-ensemble. Le peuple libanais dans toutes ses composantes communautaires est un tout indivisible, au sein duquel aucune partie n’est supérieure ou inférieure à l’autre. Au sein de la patrie libanaise, nous sommes un tout où aucune majorité numérique n’exerce d’hégémonie sur une minorité ; nous rejetons la logique d’une majorité numérique qui serait dominante. Nous voulons un État référence qui soit indépendant et dont la personnalité échapperait aux hégémonies confessionnelles et partisanes. »
Le CPL dénonce une campagne injurieuse
La commission centrale à l’information du Courant patriotique libre a par ailleurs réagi, en la condamnant, à la campagne en partie injurieuse à laquelle s’est exposé le patriarche en raison de ses prises de position. Dans un communiqué, la commission a mis en garde contre les conséquences séditieuses du discours de haine. « Certains dignitaires religieux et hommes politiques profitent des circonstances pour diffuser des propos porteurs de haine et d’extrémisme dans lesquels ils s’en prennent à d’autres dignitaires religieux, ce qui trouble l’ordre public, accentue l’extrémisme et élargit l’espace du discours de haine », peut-on lire dans le communiqué. Le texte réclame « que les instances religieuses mettent fin à de tels discours pour prévenir leurs conséquences sur les rapports qu’entretiennent entre eux les composantes libanaises » et souhaite que « de telles pratiques aux conséquences regrettables prennent fin ».
Depuis ses récentes prises de position, le patriarche Raï est la cible de fortes critiques, notamment de la part de dignitaires chiites proches du Hezbollah, comme le chef du Conseil supérieur chiite Abdel Amir Kabalan et le mufti jaafarite, cheikh Ahmad Kabalan, son fils. Dans le même temps, une violente campagne sur Twitter a été lancée contre Mgr Raï sous l’appellation « Raï (parrain) des agents », menée selon des analystes par des proches du parti chiite. Pour sa part, le Hezbollah a annoncé, par la voix du député Mohammad Raad, le chef de son bloc parlementaire, qu’il « prend note » de l’initiative du patriarche « et en observe les réactions ».
Le directeur du Centre catholique d’information, le P. Abdo Bou Kasm, a pour sa part demandé que les parquets se saisissent de ces propos injurieux contre le chef de la communauté maronite.
Une délégation FL reçue par Deriane
Notons enfin que dans le cadre d’une campagne entreprise ces derniers jours pour développer et concrétiser l’initiative patriarcale, une délégation FL s’est entretenue hier avec le mufti de la République, cheikh Abdellatif Deriane. « Nous avons besoin d’éloigner le Liban des conflits et de concentrer tous nos efforts sur les réformes et le sauvetage du Liban. Les réformes, la neutralité, le respect de la légitimité internationale constituent des portes d’entrée essentielles pour relever le pays », a déclaré l’ancien ministre Ghassan Hasbani à l’issue de cette audience. « Le concept de neutralité est très large et peut être discuté. Il se base sur la non-ingérence dans les conflits des autres, la rupture des liens avec les axes, le maintien de l’ouverture du Liban sur la communauté internationale sur des bases constitutionnelles libanaises », a-t-il ajouté.
"affirme l’uléma Ali el-Amine depuis Dimane." Mais qu'est-ce qui vous arrive, bon sang? Vous écrivez bien pour des Libanais, non? Alors qu'est-ce que c'est que cet "uléma" juste bon pour les habitants du Boulevard Raspail???
15 h 54, le 23 juillet 2020