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Culture - La compagnie des films

Béchara Mouzannar : La vie de cinéphile est magnifique, elle est faite de belles surprises

Après 35 ans de carrière dans la communication, l’ex-réalisateur de films publicitaires, chief creative officer de Leo Burnett MEA depuis 2011 et de Publicis Communications MEA depuis 2016, décide de se lancer en tant que réalisateur et producteur indépendant de films et de séries. Il confie à « L’Orient-le Jour » sa passion pour le cinéma.

Béchara Mouzannar entouré de sa collection de 15 000 films. Photo DR

À quel âge et comment votre passion pour le 7e art est-elle née ?

Écouter des histoires et en raconter ont été durant toute mon enfance mon passe-temps favori. Petit, j’allais au cinéma pour voir les grands succès, comme Sound of music, ou les comédies (les films de Louis de Funès ou des Marx Brothers). La vraie passion est née lorsque j’ai découvert les films d’auteur. Je profitais des reprises de la saison d’été pour rattraper mes retards. J’avais 11 ans, nous habitions un quartier qui jouxtait la rue Hamra, et mes parents sortaient beaucoup le soir. Sans demander la permission, je retrouvais des copains pour aller au cinéma et souvent je ratais les dix dernières minutes pour être sûr de me glisser sous les draps avant le retour de mes parents. Un soir où ma mère est rentrée plus tôt, elle a découvert que je faisais les 400 coups durant leur absence et compris ma fatigue systématique du matin à chaque réveil. Résultat : je fus interdit de cinéma ! Mais comme j’étais bon élève, j’ai reçu un projecteur 16 mm Bell and Howell qui m’a permis de visionner des tas de films à la maison où j’invitais des copains. J’ai aussi eu la chance d’assister à des projections au Ciné-Club de Beyrouth (Clemenceau) où de grands réalisateurs tels que Tarkovski étaient venus présenter leurs films. Le cinéma a toujours été un mode d’expression qui me convenait parfaitement.


Quel fut le mode d’initiation ?

J’ai eu la chance d’accomplir mes études universitaires à Paris et de découvrir que c’était la capitale idéale pour un cinéphile. Des films en version originale de tous les pays du monde avec plus de 400 salles, sans oublier la cinémathèque de Chaillot, c’était le rêve ! Depuis l’âge de 17 ans, je visionne un film par jour et cela dure encore. J’ai toujours un moment avec le cinéma pendant la journée, et lorsque je voyage, je découvre de nouveaux réalisateurs.

Qu’est-ce que le cinéma vous apporte ?

Aujourd’hui à 60 ans, je réalise que le cinéma m’a guidé dans la vie, m’a appris à reconnaître les différences qui existent entre les peuples et les différentes civilisations, les non-dits qui sont le propre des cultures locales et ceux qui sont universels. Au-delà de l’art du cinéma, ce qui m’intéresse, c’est la quantité d’histoires magnifiques qui existent dans le monde et qui ont toujours quelque chose à nous apprendre... C’est un cinéma du monde où se côtoient les différentes valeurs, c’est un art magnifique pour nous révéler ce qui nous unit et ce qui nous différencie les uns des autres à travers les ethnies et les nationalités, et surtout ce petit frisson ressenti au milieu d’un film… qui n’a pas d’équivalent.

Quelles ont été vos plus belles découvertes dans le monde du cinéma ?

J’ai découvert Abbas Kiarostami lors de son premier film. Mais les vraies découvertes s’opèrent lorsque l’on poursuit un nouveau talent et qu’il réalise de grandes choses. Il existe de grands réalisateurs qui ont prouvé qu’ils pouvaient être géniaux sur la durée. Chaque film de Federico Fellini ou de Stanley Kubrick était une perle qu’ils ajoutaient à un ruban de rêves, celui de la pellicule ; d’autres, comme Orson Welles, n’ont pas réussi leurs films à chaque coup. La vie de cinéphile est magnifique, elle est faite de belles surprises. C’est un art qui correspond à ce qui m’intéresse dans la vie, à savoir l’exploration de la planète et des êtres humains qui y vivent et la communication qui prend place. Ce n’est pas par hasard que j’ai choisi mon métier. J’étais un raconteur d’histoires.

Pour moi, La Nuit du chasseur de Charles Laughton est le seul film qui a transcendé tous les genres, et cela il y a plus de 60 ans, et Johnny s’en va-t-en guerre était le seul film de Dalton Trumbo et définitivement un grand chef-d’œuvre du cinéma.


Quel réalisateur auriez-vous aimé être ?

Aucun autre, le fait que je puisse faire ce que je fais aujourd’hui me suffit. C’est une expérience qui continue et « re-commence ». J’ai une vision du cinéma que je compte réaliser. Une version onirique du réalisme, une histoire réelle où il y a une part de rêve.

Vous réalisez un film : deux acteurs et deux actrices à choisir

Idéalement, celles et ceux qui n’ont jamais joué. J’aime leur spontanéité s’ils ont du talent.


De combien de films est composée votre bibliothèque ?

Le désir d’avoir ma propre collection de films a débuté pendant la guerre. J’étais terrorisé à l’idée de ne plus pouvoir aller au cinéma et j’ai voulu acheter 365 films pour pouvoir tenir un an. Aujourd’hui, j’ai 15 000 titres, tous des originaux. Comme j’ai beaucoup voyagé, de par mon métier, ma collection est le fruit de ma visite de 80 pays. Ma collection est un voyage en soi.

Quand on ramène des films du monde entier, le voyage ne s’arrête jamais. Il peut même durer des années à travers ces histoires-là. Ce que j’aime, c’est aussi cocher les cases sur ma liste des films, lorsque je trouve enfin celui que je recherche depuis des années.

Est-ce qu’il vous est arrivé d’acheter des copies piratées ?

Deux fois. Pour regarder des séries que je ne trouvais pas en ligne ou en DVD. J’ai du respect pour la copie originale et pour le travail de l’artiste. Lorsqu’on achète une œuvre d’art, il faut savoir l’honorer.

Le film que vous avez visionné le plus ?

La Règle du jeu de Jean Renoir, un chef-d’œuvre qui comprend tous les enseignements du cinéma et dont le message me touche beaucoup. Un film qui a prédit beaucoup de choses et qui s’est fait ramasser à sa sortie, avant de devenir un film culte vingt ans après.


Est-ce que vous avez initié quelqu’un à l’amour du cinéma ?

Tous ceux qui en ont eu envie, mais principalement mon épouse. On a découvert ensemble tous les films noirs et nous avions de magnifiques et longues discussions après chaque projection, et bien sûr mes enfants.


Avez-vous déjà écrit un scénario ou réalisé un film ?

Oui, j’ai réalisé il y a quatre ans un court métrage de 19 minutes au Brésil, qui raconte une histoire que j’ai vécue la première fois que j’ai visité ce pays. J’avais pris un mois sabbatique, j’ai appris le portugais pour communiquer avec l’équipe technique. Une très belle expérience où j’ai écrit, réalisé et joué.

Le genre que vous n’aimez pas du tout ?

J’aime tous les genres. Le seul que je n’aime pas, c’est quand c’est un mauvais film, dans n’importe quel genre.

Comment classez-vous vos films ?

Par pays, puis par ordre alphabétique de réalisateur, puis par ordre chronologique.


Un film à voir durant le confinement ?

Mediterraneo de Gabrielle Salvatores.

Un film à ne pas voir durant le confinement ?

Outbreak de Wolfgang Petersen.

Un « titre » de film qui vous décrit le plus ?

Mediterraneo !

À quel âge et comment votre passion pour le 7e art est-elle née ? Écouter des histoires et en raconter ont été durant toute mon enfance mon passe-temps favori. Petit, j’allais au cinéma pour voir les grands succès, comme Sound of music, ou les comédies (les films de Louis de Funès ou des Marx Brothers). La vraie passion est née lorsque j’ai découvert les films...

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