Le Premier ministre libanais, Hassane Diab, a appelé mardi les forces de sécurité et l'armée à renforcer leurs opérations de contrôle des déplacements des citoyens en province où le confinement n'est pas respecté, afin de mieux circonscrire la propagation du nouveau coronavirus, qui a jusqu'à présent contaminé plus de 300 personnes dans le pays. Face à cette crise sanitaire, le gouvernement libanais a approuvé, lors d'un Conseil des ministres au Sérail, une série de mesures supposées réduire les répercussions socio-économiques de la mobilisation générale.
Le cabinet Diab a notamment approuvé un projet de loi, assorti du caractère d'urgence, prévoyant la suspension pour six mois de l'imposition de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les fonds accordés aux administrations publiques et aux municipalités, a rapporté à l'issue de la réunion la ministre de l'Information, Manal Abdel Samad. Un second projet de loi permettant à toutes les institutions publiques de financer, par tous les moyens possibles, des aides sanitaires ou sociales a été approuvé. Les ministres ont encore ratifié une baisse des tarifs de tous les fournisseurs d'accès à l'Internet et de transmission de données.
Solidarité sociale
Concernant la gestion de la crise sanitaire, Hassane Diab a appelé les forces de sécurité et l'armée à "renforcer encore plus leur surveillance des régions qui ne respectent pas totalement l'appel au confinement", selon des propos rapportés par Mme Abdel Samad. Des mesures strictes ont été prises ces dernières semaines pour tenter de freiner la propagation du virus au Liban. Jusque-là, le Premier ministre avait appelé les Libanais à instaurer un "couvre-feu autoproclamé", une mesure qui reste floue, malgré la mobilisation des forces de l'ordre pour veiller au respect de l'application du confinement à domicile. Ces derniers jours, des patrouilles armées sillonnaient les rues des différentes régions du pays, survolées par moments par des hélicoptères appelant les citoyens à rester chez eux. Dans le cadre de ces contrôles, le ministre de l'Intérieur, Mohammad Fahmi, a effectué dans la journée une tournée dans plusieurs supermarchés du quartier de Hamra, afin de vérifier le respect des mesures de précaution. Les Forces de sécurité intérieure (FSI) ont de leur côté publié une vidéo expliquant les mesures de suivi dont elles sont chargées, consistant principalement à vérifier que les personnes suspectées d'être atteintes du virus, ou récemment rentrées de l'étranger, restent confinées.
Répondant en outre aux responsables qui réclament, de plus en plus nombreux, l'instauration de l'état d'urgence dans le pays, M. Diab les a enjoints à "lire les textes juridiques et leurs modalités". Il a ajouté qu'il relevait de la responsabilité du gouvernement "d'étudier les façons d'aider les gens qui se retrouvent sans travail". "L’État doit aider les gens, mais il faut également que les Libanais fassent preuve de solidarité sociale", a-t-il déclaré, selon des propos rapportés par la ministre de l'Information. Et d'inviter les différents ministères concernés à prendre toutes les mesures possibles pour suspendre et reporter les échéances financières imposées aux citoyens, comme le paiement des frais et des taxes liés aux secteurs de l'électricité, de la distribution d'eau, de la téléphonie mobile, de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et de la mécanique. "Nous traversons une crise d'un genre nouveau, mais je suis confiant que nous parviendrons à la surmonter avec le moins de pertes possibles", a encore déclaré le président du Conseil.
Programme d'aide pour les étudiants coincés en Italie
Évoquant lors de la réunion gouvernementale le sort des étudiants libanais coincés, sans argent pour nombre d'entre eux, en Italie, devenue épicentre de la pandémie, le ministre des Affaires étrangères Nassif Hitti a été chargé de présenter un programme d'aides sociales leur étant destiné, qui devra être proposé au gouvernement jeudi. À l’heure actuelle, il y aurait entre 300 et 400 étudiants libanais en Lombardie dans le nord de l’Italie, et à peu près 800 étudiants dans tout le pays, selon les estimations de l’ambassade du Liban à Rome. Un groupe de ces étudiants avait exhorté le gouvernement à prendre des mesures pour aider les Libanais en Italie, en affrétant un avion de rapatriement et en supprimant les restrictions bancaires liées aux transferts à l'étranger.
A l'issue du Conseil, la commission ministérielle des affaires sociales s'est par ailleurs réunie, sous la présidence de M. Diab, pour trouver des solutions aux retombées socio-économiques du confinement. Il s'agissait de la première réunion de cette commission. Lundi, la Banque du Liban (BDL) avait émis une circulaire permettant aux banques du pays d’accorder des prêts exceptionnels aux sociétés qui se sont retrouvées dans l’impossibilité de payer leurs échéances de prêts, leurs dettes, les salaires de leurs employés ainsi que leurs coûts d’opération et de production pendant la période allant de mars à mai, une première réponse des autorités libanaises aux graves difficultés financières rencontrées par la quasi-totalité des entreprises opérant sur le territoire en raison de la mobilisation générale.
Le contrôle des capitaux
Sur le plan économique, le gouvernement n'a toujours pas terminé l'étude du projet de loi encadrant les contrôles de capitaux dans les banques libanaises. "Les ministres ont exprimé leurs commentaires sur le projet", présenté par le ministre de l’Économie Raoul Nehmé, et le cabinet poursuivra son étude du dossier lors de ses prochaines réunions, a annoncé la ministre de l'Information. Ce texte, doté du caractère d’urgence, doit officialiser les mesures de contrôle de capitaux instaurées par les banques depuis septembre en permettant des transferts à l’étranger pour certaines catégories de dépenses (scolarités, frais médicaux...) et en consacrant le principe "d’argent frais", qui ne sera pas soumis à ces restrictions. À partir de la fin de l’été 2019, et face à un creusement continu de la balance des paiements que la Banque du Liban (BDL) a dû couvrir en puisant dans ses réserves en devises, les banques avaient vu leurs quotas journaliers de devises fournis par la BDL réduits. Elles avaient donc fini par limiter fortement les retraits de dollars à travers les distributeurs automatiques et les guichets, entraînant l’apparition en septembre d’un taux de change parallèle qui oscille à présent autour des 2 500 livres, alors que le taux officiel fixé par la BDL est toujours de 1 507,5 livres pour un dollar depuis 1997.
ET A RAISON...
14 h 31, le 25 mars 2020