Parallèlement aux contacts pour la formation d’un nouveau gouvernement, l’attention des officiels est portée depuis quelques jours sur l’affaire des transferts présumés de milliards de dollars, qui auraient été effectués il y a une quinzaine de jours par neuf hommes politiques libanais vers des banques en Suisse.
Ébruitée par l’expert économique Marwan Iskandar, qui a affirmé en avoir eu vent d’une journaliste suisse, l’affaire est aujourd’hui aux mains de la justice. Parallèlement, une enquête devrait incessamment être lancée par la banque centrale pour déterminer les voies par lesquelles près de 2,5 milliards de dollars auraient pu être transférés à l’étranger, alors que le pays souffre d’un grave problème de liquidités et que des restrictions très sévères sont imposées sur les transferts de fonds, notamment à l’étranger.
M. Iskandar devait être ainsi entendu à titre de témoin vendredi par le parquet, qui doit poursuivre son enquête en coordination avec la banque centrale et la Commission de contrôle des banques, sans qu’on ne sache si la loi permet le rapatriement de ces fonds (si l’affaire est confirmée) en l’absence d’une décision officielle de la banque centrale ou d’une loi du Parlement pour un contrôle des capitaux. Les investigations devraient donc permettre d’identifier les hommes politiques qui auraient réussi à briser le « blocus » bancaire et les banques qui auraient enfreint les instructions de la BDL.
Le chef du CPL, Gebran Bassil, a comparé cette affaire à celle de « la récupération des fonds dilapidés » en relevant, dans un tweet, une différence entre les deux. « Il n’est guère besoin d’une loi pour les fonds transférés. Cette affaire relève de la responsabilité du gouverneur de la banque centrale, de la Commission de contrôle des banques et des propriétaires des établissements bancaires. » « S’ils ne font rien, s’ils n’avancent pas les chiffres exacts et n’identifient pas ceux qui ont opéré les transferts, nous devrons passer à l’action au début de l’année », a-t-il écrit. Ces propos peuvent être interprétés comme un avertissement indirect au gouvernorat de la banque centrale, qui se trouve dans la ligne de mire de la contestation depuis le début du soulèvement populaire du 17 octobre.
Les manifestants, qui avaient lancé la semaine dernière une campagne de désobéissance civile « Nous ne paierons pas », ont d’ailleurs poursuivi samedi leurs sit-in devant, voire dans des établissements bancaires à Beyrouth et dans plusieurs villes du pays, dénonçant leur « mainmise sur les économies » des déposants.
Le député Élias Hankache (Kataëb) a, pour sa part, annoncé à la radio qu’il compte réclamer la constitution d’une commission d’enquête parlementaire au sujet des transferts opérés en dépit des restrictions bancaires imposées à l’ensemble des Libanais ou la comparution du gouverneur de la BDL devant la commission parlementaire de l’Économie et du Commerce.
Lors d’une réunion rassemblant des responsables des secteurs financier et banquier, M. Salamé avait affirmé ignorer tout de cette affaire et promis de créer une commission d’enquête.
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commentaires (9)
C'est pitoyable que dans notre pays qui se croit le centre du monde et sa population la plus rusée et la plus intelligente n'ait pas réussi depuis des décennies à mettre la main sur un seul document prouvant l'existence de ces comptes alors que dans n'importe quel autre pays les voleurs seraient déjà en train de croupir derrières les barreaux grâce à une cellule d'investigation spécialisée. Tant que ces documents ne seront pas publiés ces voleurs continueront à jouer aux intouchables, à nous narguer, à nous imposer leurs choix dans le DEDAIN et suceront notre sang jusqu'à la dernière goutte. Leur regard en dit long sur leur sentiment d' impunité. Qui sera enfin capable de relever ce défit? Celui-là le jour venu sera sanctifié
Sissi zayyat
19 h 37, le 30 décembre 2019