Hassane Diab enlaçant son épouse, Nawwar, et sa fille, Razan, après sa nomination à la tête du gouvernement. Photo Hassan Assal
Avant mardi soir, le nom de Hassane Diab n’avait jamais été évoqué parmi les candidats à la présidence du gouvernement. Depuis hier soir, Hassane Diab est le Premier ministre désigné, vingt-quatre heures après le retrait de la course du chef du gouvernement sortant, Saad Hariri. Plus connu dans le monde universitaire que dans la sphère politique, le vice-président des Programmes régionaux externes (REP) de l’Université américaine de Beyrouth (AUB) et professeur de génie informatique et électrique à la faculté de génie et d’architecture de l’université avait pourtant occupé le poste de ministre de l’Éducation (2011-2014). À lire son site, Hassane Diab semble vouloir donner l’image d’un homme réfléchi et ambitieux, doté d’un sixième sens. « Depuis mes premières années d’école, j’ai senti que je réussirais dans tout ce à quoi j’aspire », confie-t-il, estimant avoir « un sens inné de la sagesse » qui lui a permis de « faire les bons choix depuis l’adolescence ». « D’autres caractéristiques me définissent, à savoir mon courage et ma capacité à prendre des risques calculés », note-t-il. Des attributs ayant, selon lui, facilité son succès, qui ne lui est « jamais monté à la tête », cela, estime-t-il, grâce à « la sagesse » dont il se considère doté. Quant à l’échec, il ne l’a jamais laissé le « toucher au cœur », ajoute-t-il.
« Changer le monde »
« Changer le monde », M. Diab affirme sur son site vouloir rien moins que cela, estimant que le premier pas vers ce changement doit se faire « à travers l’éducation ». Plutôt que de fournir seulement des connaissances, l’éducation doit, selon lui, « encourager la libre pensée et la citoyenneté responsable, préparant les nouvelles générations au développement social, politique et économique de leur pays ». Et de s’appuyer sur une citation d’Albert Einstein : « L’éducation n’est pas l’apprentissage des faits mais la formation de l’esprit à penser. » « Je voudrais laisser mon empreinte dans le champ éducatif », souhaite-t-il, concevant l’éducation comme un art qui « incite les jeunes à penser différemment et à trouver des solutions innovantes pour améliorer le monde et l’humanité ».
Interrogé par L’Orient-Le Jour sur l’empreinte que Hassane Diab a laissé dans le domaine de l’éducation, l’ancien ministre Marwan Charbel, qui était son collègue au sein du gouvernement Mikati, se rappelle qu’« il avait fait plusieurs propositions pour changer les programmes éducatifs d’une part et améliorer l’administration au sein du ministère ». « Il a pu réaliser certains points, tout comme il n’a pas été en mesure d’appliquer d’autres suggestions », reconnaît-il toutefois. Concernant les programmes éducatifs, on note qu’un article du Daily Star, daté du 4 mai 2012, rapporte que l’ancien ministre de l’Éducation avait déclaré que « l’étude des langues est facultative », en réponse à la question de savoir si des cours de persan seraient dispensés à l’Université libanaise (UL) dans le cadre d’un accord qu’il devait signer avec son homologue iranien « en vue, avait-il dit, de bénéficier de l’expérience éducative de l’Iran. » À l’UL, un étudiant a le droit d’étudier la langue qu’il souhaite, que ce soit le farsi ou toute autre «, aurait-il ajouté.
Marwan Charbel met par ailleurs l’accent sur « son instruction et sa culture », allant même jusqu’à affirmer qu’ « il a un ordinateur à la place du cerveau ». Il évoque également « son honnêteté », indiquant que « lorsqu’il a été nommé ministre, il a interrompu sa carrière d’enseignant, pour éviter tout conflit d’intérêts ». Quant à la question de savoir s’il est indépendant, l’ancien ministre de l’Intérieur répond que son collègue « ne se soumet à personne et ne prend jamais de décisions en fonction de la volonté de tel ou tel zaïm, considérant que la loi et la Constitution sont plus importants que chacun d’eux ». « Je l’ai rencontré il y a un mois, en pleine contestation. Loin de penser qu’il serait nommé à la tête du gouvernement, il m’avait donné son point de vue sur les caractéristiques dont devrait être doté ce gouvernement, notamment bénéficier d’une entente politique en son sein, c’est-à-dire ne pas intégrer des ministres qui seraient dans des camps politiques adverses. » Et M. Charbel de trancher : « Il sera la bonne personne à la bonne place. »
« Faiblesse »
« Je ne le vois pas en tant qu’homme politique », affirme au contraire à L’OLJ un autre collègue de Hassane Diab qui l’a côtoyé au sein du gouvernement Mikati entre 2011 et 2014, saluant toutefois « sa dignité, son calme et son instruction ».
Un autre collègue au sein du même gouvernement et qui a également requis l’anonymat évoque « un bûcheur et un travailleur », mais critique « sa faiblesse ». « N’est-ce pas être faible que d’accepter de prendre en charge un gouvernement pour lequel il n’y a pas un minimum de consensus ? » « Il est atteint du virus des politiciens «, estime-t-il, jugeant, en dépit des déclarations faites par l’intéressé après sa désignation, qu’« il est aveugle devant ce qui se passe dans la rue depuis plus de deux mois ».
Quant aux prestations de Hassane Diab au sein du gouvernement, l’ancien collègue rappelle qu’ « il est l’un des initiateurs de la grille des salaires », une mesure dont le coût a été mal estimé par le gouvernement et a coûté plus cher que prévu. « Hassane Diab n’a pas assez de connaissances économiques et financières », estime-t-il, reconnaissant néanmoins qu’« il est un bon administrateur ».
Né le 1er juin 1959, Hassane Diab obtient en 1981 un diplôme d’ingénieur de l’université de Leeds (Royaume-Uni) et un doctorat en génie informatique de l’université de Bath, en 1985. Sitôt ses études achevées, il rentre à Beyrouth et se lance dans l’enseignement à l’Université américaine. Il acquiert, depuis, une expérience de plus de 34 ans dans le champ académique, prenant également en charge divers postes administratifs dans l’établissement universitaire. Au long de ce parcours, l’académicien a publié plus de 150 études, dont plusieurs ouvrages, et a supervisé 80 projets de recherches, recevant en outre plus de 30 distinctions nationales et internationales. En 2004, l’AUB l’avait détaché en tant que président fondateur et doyen de l’Université d’ingénieurs de Dhofar (sultanat d’Oman), tout juste créée. À l’étranger, M. Diab est également ingénieur agréé au Conseil des ingénieurs du Royaume-Uni et au Registre des ingénieurs en Australie, ainsi que membre d’institutions et d'associations d’ingénieurs au Royaume-Uni, en Australie et aux États-Unis. Marié à Nawar Mawlaoui, M. Diab est père de trois enfants.
Avant mardi soir, le nom de Hassane Diab n’avait jamais été évoqué parmi les candidats à la présidence du gouvernement. Depuis hier soir, Hassane Diab est le Premier ministre désigné, vingt-quatre heures après le retrait de la course du chef du gouvernement sortant, Saad Hariri. Plus connu dans le monde universitaire que dans la sphère politique, le vice-président des...
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Mr le Premier Ministre Saad Hariri a fait amende honorable en avouant que son gouvernement n’a pas réussi à avancer ses projets à cause des intérêts de chaque ministre et chaque parti. Et c’est tout à son honneur d’avoir démissionné, et refusé de reformer un gouvernement auquel il lui semblait ingouvernable. Mr Hassane Diab Premier ministre désigné est méconnu par le peuple Libanais. Et il est déjà critiqué avant même d’être mis au pied du mur. Donnons-lui une chance de prouver sa bonne foi et sa volonté de mener à bien l’économie du pays. Et que les septiques soient vigilants en cas où Mr Diab soit à la botte de tel ou tel parti ou sous influence de tel ou tel pays étranger. Pourquoi perdre l’occasion de nommer un homme honnête et bardé de diplômes ? Apparemment il a la volonté de réformer le pays, tout en prenant en compte les demandes du peuple Libanais dans son ensemble. Nous avons dépassé le confessionalisme imposé depuis l’indépendance, évitons le schisme qui divisera encore plus le pays .
Le Point du Jour.
15 h 39, le 20 décembre 2019