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Culture - Planches

« ParisBeirut » ou quand la révolution unit les jeunesses libanaise et française

Cécile Roqué Alsina s’interroge dans sa pièce de théâtre, jouée aux portes de Paris, sur la place des jeunesses française et libanaise dans la société et leur besoin de changement.

Paroles de jeunesse et de révolution dans « ParisBeirut », mise en scène par Cécile Roqué Alsina. Photo Anne Ilcinkas

Magali, Joseph, Kym, Akram, Mohammad, Radé, Nadim… Les voix de ces jeunes Libanais s’entremêlent dans la pénombre de l’espace Icare à Issy-les-Moulineaux, aux portes de Paris. Puis leurs visages apparaissent sur le mur de fond de la scène. « Je suis en pleine confusion. Comment un peuple au bord de la crise économique et sociale peut-il garder un tempérament normal et rester fidèle à ses bourreaux politiques ? » se demandent-ils. « On n’arrive pas à s’unir, car nous sommes divisés à cause de cette caste politique. » « Nous vivons dans un semblant de démocratie, camouflée dans une dictature à plusieurs têtes. » « Le peuple libanais accepte tout. Il faut un élément déclencheur fou pour lancer la révolution. »

La jeune metteuse en scène Cécile Roqué Alsina a rapporté en France ces témoignages recueillis lors d’un séjour de six mois au Liban en 2018. Étudiante en master de théâtre, elle effectuait un semestre à l’Université Saint-Joseph (USJ) à Beyrouth et a interviewé ses amis sur leurs doutes et leurs aspirations, peu après les élections législatives, qui ont scellé la victoire des candidats des partis traditionnels. « Ils me disaient détester la politique, mais, en même temps, ils en parlaient tout le temps », se rappelle Cécile Roqué Alsina, peu avant la représentation de sa pièce en ce mois de novembre. « Je ne savais pas ce que j’allais faire de ces interviews, mais j’avais envie de ramener ces voix en France pour les faire exister, pour leur donner une place », ajoute-t-elle.

Pour Roqué Alsina, adepte du théâtre du réel, il n’était pas question de parler à la place de cette jeunesse libanaise. Elle a donc imaginé un dialogue entre les jeunesses française et libanaise, en intégrant des extraits des interviews des jeunes Libanais et en respectant au maximum leurs propos, dans une création qu’elle présentait pour la première fois les 19 et 20 novembre dernier.


(Lire aussi : Révolte ou révolution ? La réponse en images)



Pas de leaders, pas de têtes

Elle a ainsi travaillé pendant presque un an avec quatre jeunes comédiens français pour écrire ensemble le texte de ParisBeirut, interprété sur scène dans une mise en scène sobre et puissante. Ainsi, quatre jeunes étudiants français, installés dans les sous-sols de leur université pour résister aux réformes du gouvernement, s’interrogent sur la manière de s’engager pour changer les choses, et sur leur place dans la société. « La scène se passe dans une cave, une grotte, à la fois l’endroit où on prépare les révolutions, et celui dans lequel on se réfugie, comme dans un abri. Et là, on recrée un petit modèle de vie, une microsociété utopique, explique la metteuse en scène. Nous avons placé nos espoirs dans les personnages. »

Ainsi, ceux-ci débattent du bien-fondé de la non-violence. « Elle fait consensus car permet de rassembler. » « Il ne faut pas de leaders, de têtes, pour éviter tout culte de la personnalité. » « La révolution doit se renouveler en permanence, sinon elle meurt. » Dans la pièce, les paroles des comédiens français font écho aux témoignages des jeunes Libanais, surtout dans le contexte révolutionnaire actuel au Liban.

La fiction et le documentaire s’entremêlent de la même façon que s’entremêlent les voix des jeunes Français et Libanais, si loin peut-être géographiquement et socialement, mais pourtant si proches dans leurs aspirations, leurs désirs de s’engager sans bien savoir comment.

Dans ParisBeirut, rien n’était fixé. Tout était mouvant, pour coller au réel. Si les paroles de mécontentement et les désirs de changement et de démocratie des interviews permettent de comprendre la révolution d’aujourd’hui, Cécile Roqué Alsina reconnaît avoir été surprise par les événements et ne pas les avoir vu venir. « Après les élections législatives et surtout la crise des déchets de 2015, mes amis libanais avaient perdu espoir que les choses changent, explique-t-elle. Ils avaient essayé, sans succès. D’ailleurs, quatre de mes amis ont depuis quitté le pays. Les trois qui sont restés sur place sont maintenant dans les rues. » La metteuse en scène a donc décidé d’ajouter des vidéos de la révolution à la fin de la pièce et transformé son épilogue. « La pièce se soldait par l’échec de la révolution, car nous étions si négatifs, dit-elle. Finalement, notre génération porte l’espoir du changement. La jeunesse de 2019 veut faire entendre sa voix. »

Cécile Roqué Alsina espère désormais faire venir sa pièce au Liban. « Ce serait l’aboutissement dont je rêve. »


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ET LA REVOLUTION FUT DECLENCHEE !

LA LIBRE EXPRESSION

00 h 07, le 23 novembre 2019

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  • ET LA REVOLUTION FUT DECLENCHEE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 07, le 23 novembre 2019

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