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Liban - Corruption

Le chef du CPL à son tour pris dans le tourbillon judiciaire

Le ministre sortant de la diplomatie et chef du CPL, Gebran Bassil. Photo d’archives

À la résurgence de poursuites judiciaires pour corruption, engagées ou réactivées ces derniers jours par le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, et le procureur financier, Ali Ibrahim, contre des responsables politiques et fonctionnaires publics, est venue s’ajouter hier une initiative individuelle dirigée contre le ministre sortant des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil. Un avocat, Marwan Salam, a déposé auprès du parquet de cassation une note d’information pour détournement de fonds publics, blanchiment d’argent et enrichissement illicite présumés, basant sa requête sur un article publié le 24 janvier par le quotidien ad-Diyar intitulé « Un grand scandale dans le don qatari ».

Aussitôt après avoir pris connaissance de la dénonciation judiciaire, M. Bassil a nié les accusations lancées contre lui, affirmant sur Twitter que « la teneur des informations est fausse et basée comme d’habitude sur un article fabriqué ». « Les mêmes accusations ayant auparavant été formulées dans des déclarations et des articles de presse, j’avais porté plainte contre leurs auteurs et obtenu gain de cause parce qu’ils n’avaient apporté aucune preuve », a-t-il indiqué, remerciant l’auteur de la nouvelle note d’information de lui avoir donné « une occasion de faire apparaître à nouveau la vérité et mettre fin aux rumeurs et à la diffamation ». Son avocat, Majed Bouez, a affirmé dans le même sens, à travers un communiqué, que M. Bassil avait intenté un procès « contre la personne qui avait publié ces mêmes informations mensongères parues dans ad-Diyar, relatives à une prétendue commission obtenue à l’occasion d’un don de l’État qatari ». « Cette personne avait reconnu par écrit devant la justice que ces nouvelles sont fausses, ce qui prouve que la dénonciation est calomnieuse », ajoute le texte. Contacté par L’Orient-Le Jour, Me Bouez affirme que « suite aux poursuites engagées contre lui, le rédacteur en chef d’ad-Diyar, Charles Ayoub, avait signé en mars dernier un acte notarié reconnaissant la fausseté des informations parues dans son journal, dans lequel il évoquait un encaissement par M. Bassil d’une commission de 50 millions de dollars à l’occasion de l’achat par le Qatar de bons du Trésor d’une valeur de 500 millions ». Au lendemain du sommet économique arabe de Beyrouth, en janvier dernier, le Qatar avait annoncé qu’il allait investir 500 millions de dollars dans les bons du Trésor libanais en dollars pour soutenir l’économie du pays. L’auteur de la dénonciation ayant indiqué que « le chef du CPL aurait déposé le montant encaissé auprès de la Banque Cedrus dans laquelle il a des intérêts », l’avocat de M. Bassil se demande « comment en tout état de cause il aurait pu le faire alors que la souscription de bons du Trésor s’effectue à travers l’État et selon un processus défini ».


Devoir national
Quant à Marwan Salam, il affirme à L’OLJ que sa dénonciation ne se réduit pas à l’affaire du don qatari, soulignant qu’elle comporte aussi le dossier de l’électricité, notamment les navires-centrales. Interrogé sur le timing de sa requête, l’avocat précise que sa démarche s’inscrit dans sa « volonté de citoyen cherchant à redresser le pays », indiquant qu’« elle intervient comme un devoir national dans le sillage du soulèvement populaire ».

L’esprit de colère contre la classe dirigeante, accusée par l’opinion publique libanaise de corruption ayant entraîné le pays dans un gouffre économique et financier, a poussé un autre avocat, Jihad Zebian, à réactiver une dénonciation de l’ancien chef du gouvernement, Fouad Siniora, qu’il avait déposée en 2013 auprès du parquet financier. Il a ainsi présenté au procureur Ali Ibrahim une conclusion dans laquelle il accuse M. Siniora d’avoir gaspillé les deniers publics « de manière légalisée ». Joint par L’OLJ, l’avocat affirme que la requête qu’il a engagée il y a six ans vise aussi « des partenaires politiques de M. Siniora avec qui ce dernier a partagé des parts portant sur près de 200 milliards de dollars », et contre lesquels il a demandé une interdiction de voyage jusqu’à la clôture de l’enquête.

Me Zebian se félicite de ce qu’il a pu raviver sa plainte, affirmant que tout au long de ces années il avait été menacé, voire agressé, à chaque fois qu’il tentait de faire bouger les choses.

Plus grave encore que les chantages subis par les avocats, le fait que des magistrats seraient eux-mêmes soumis à des pressions politiques s’apparentant à des menaces physiques qui finissent par les dissuader de poursuivre leur mission d’enquête. C’est du moins ce que révèle à L’OLJ une source judiciaire haut placée.


« La révolution m’a aidé »
Mais dans certains dossiers, il est évident que le feu vert est donné pour la poursuite du processus judiciaire. Dans l’affaire du barrage de Brissa (Liban-Nord) qui, depuis son inauguration en 2001, ne stocke pas efficacement l’eau, le procureur financier a ainsi engagé lundi des poursuites contre le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) et plusieurs sociétés pour gaspillage de fonds publics. Contacté par L’OLJ, M. Ibrahim explique l’accélération récente des dossiers judiciaires par le fait que « les responsables notifiés acceptent désormais de comparaître », citant M. Siniora qui s’est présenté à lui mercredi, ainsi que Mohammad Choucair et Jamal Jarrah, respectivement ancien ministre et ministre sortant des Télécommunications qui devraient comparaître la semaine prochaine. « C’est la révolution qui m’a aidé », confie M. Ibrahim.



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commentaires (6)

Je n'aime pas trop le CPL mais c'est un peu grossier de croire que les qataris et le ministre sont naïfs au point de se compromettre un financement politique à une aide d'Etat. Il ne faut pas oublier que les corrupteurs sont aussi fautifs dans ce genre de procès. Il faut faire attention de ne pas accuser gratuitement et banaliser la corruption

Shou fi

18 h 47, le 09 novembre 2019

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Commentaires (6)

  • Je n'aime pas trop le CPL mais c'est un peu grossier de croire que les qataris et le ministre sont naïfs au point de se compromettre un financement politique à une aide d'Etat. Il ne faut pas oublier que les corrupteurs sont aussi fautifs dans ce genre de procès. Il faut faire attention de ne pas accuser gratuitement et banaliser la corruption

    Shou fi

    18 h 47, le 09 novembre 2019

  • Balancetonpoliticien est à la mode, devient comme une purge collective. Plus aucune nuance, aucun débat ou aucune réflexion n’est possible. C’est la justice des reseaux sociaux, la rue accuse, la rue juge, la rue condamne. En descendant dans la rue, nous avons reve de justice, est cela cette justice, expeditive, sans preuve, sans argument, basee sur des articles de journaux, de messages whatsapp et facebook, de sources « dignes de foi ». Une partie plaignante qui se base sur un article de journal afin de nuire à la reputation de politiciens, qui le meritent certainement, mais pas de cette manière. Nos politiciens reglent leurs comptes entre eux en nous utilisant comme de vulgaires messagers. Que la justice suive son cours, la presomption d’innocence doit primee.

    Nader

    12 h 31, le 09 novembre 2019

  • Les naufrageurs de la Patrie sont Hassan Nasrallah pour le compte de l'Iran et Gebran Bassil pour la prochaine présidentielle. Que peut faire Saad Hariri ?

    Un Libanais

    12 h 11, le 09 novembre 2019

  • Ah ça ira, ça ira, ça ira, tous les coupables a la marmite ... chantait Edith Piaf ...

    Remy Martin

    10 h 24, le 09 novembre 2019

  • "Kellon yaani kellon". Peut-être cette accusation est-elle fausse, mais on ne peut que s'étonner devant la subite explosion de son patrimoine depuis qu'il est ministre.

    Yves Prevost

    07 h 28, le 09 novembre 2019

  • C,EST LE TEMPS DES COMPTES ! ET L,ON DEVRAIT COMMENCER PAR LES GRANDS REQUINS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 25, le 09 novembre 2019

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