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Économie - Repère

Les réserves d’or du Liban sont-elles bien protégées ?

Le parti Mouwatinoun wa Mouwatinat fi Dawla rebondit sur les rumeurs évoquant la possibilité que les réserves d’or aient pu être utilisées comme garanties pour permettre au pays d’attirer des capitaux.

Une partie de l’or libanais est stocké à Fort Knox, aux États-Unis. Photo Reuters

Les réserves d’or du Liban, ultime actif financier du pays placé sous la responsabilité de la Banque centrale, sont-elles bien protégées ? Telle est la question qui est soulevée par le parti issu de la société civile, Mouwatinoun wa Mouwatinat fi Dawla, de l’ancien ministre du Travail et des Télécoms Charbel Nahas, qui a communiqué sur le sujet ces dernières semaines.

La formation politique qui s’était présentée aux législatives de mai 2018 a publié un long argumentaire sur le sujet sur son site internet, rappelant que le Liban possède près de 287 tonnes d’or (10 116 572 onces). Une quantité stable depuis des années et qui constitue la deuxième réserve parmi les pays arabes et la 18e dans le monde. Selon les chiffres de la Banque du Liban (BDL), la valeur de ces réserves a atteint 13,7 milliards de dollars à fin septembre, soit un bond de 25 % en un an.

« Cet or est presque la seule richesse du pays. Il est important de savoir qu’il est en sécurité et ne risque pas d’être saisi à un moment où le pays traverse une grave crise économique et financière », souligne Charbel Nahas.


Garanties sur l’or
L’interrogation soulevée par Mouwatinoun wa Mouwatinat fi Dawla donne un écho aux rumeurs qui circulent depuis cet été quant à la possibilité que les réserves d’or aient pu être utilisées comme garanties pour permettre au Liban d’attirer des capitaux, à un moment où la stabilité financière du pays, très endetté et déficitaire, est plus que jamais au centre de toutes les attentions.

Or, cet été, le gouverneur de la BDL Riad Salamé a annoncé que la Banque centrale avait attiré de nouveaux dépôts issus « du secteur privé non résident », quelque temps après l’actualisation annoncée fin juin des modalités des opérations d’ingénierie financière lancées par la BDL pour doper ses réserves en devises et relancer la croissance des dépôts. Plusieurs sources concordantes ont confirmé que l’opération portant sur un montant d’environ 1,5 milliard de dollars, sur laquelle peu de détails officiels ont filtré, avait été pilotée par la SGBL et la banque d’investissement américaine Goldman Sachs.

« On peut légitimement se demander quelle contrepartie ou garantie aurait obtenu quelqu’un qui accepte de déposer environ 1,5 milliard à 11/12 % à la BDL alors qu’il pourrait obtenir beaucoup plus en achetant des eurobonds (titres de dettes en devises émis par l’État libanais), vu que la dégradation de la situation financière a poussé leurs rendements à la hausse », résume M. Nahas à L’Orient-Le Jour. « Rien ne permet de l’affirmer pour l’instant, mais l’hypothèse suggérant qu’une garantie sur l’or détenu par le Liban ait été accordée se pose, même si ceci est en principe interdit », ajoute-t-il.

L’ancien ministre rappelle que l’or du pays est protégé par une loi (n° 42) votée en 1986, qui dans son article unique interdit à quiconque de disposer, directement ou indirectement, de ces réserves placées à la BDL, sans l’autorisation expresse du Parlement, donc par le vote d’une loi. Le même texte est également brandi par les personnes qui, au sein du secteur bancaire, réfutent catégoriquement cette possibilité. « Ce ne sont que des rumeurs fondées sur rien. Elles ont surgi au moment où la Banque centrale a évoqué le milliard et demi de dépôts et elles refont surface depuis que le Premier ministre Saad Hariri a indiqué, lors d’un voyage officiel à Abou Dhabi mardi, que les Émirats arabes unis étaient prêts à aider économiquement le Liban. La BDL ne peut pas disposer de l’or si les députés ne donnent pas leur feu vert », martèle une source proche de la Banque centrale. La BDL ne s’est pas officiellement exprimée sur le sujet.


Immunité de souveraineté
Charbel Nahas insiste néanmoins, en indiquant que si la loi protège effectivement l’or qui se trouverait encore sur le territoire libanais, il n’existe pour l’instant aucune assurance que le texte puisse protéger l’or qui est stocké aux États-Unis, où la loi américaine s’applique. « Si la loi n° 42 ne s’applique pas aux États-Unis, rien ne pourrait en théorie empêcher la BDL (qui par le passé s’était déjà prononcée en faveur d’un amendement de la loi n° 42 pour optimiser la gestion de l’or) de se servir de l’or stocké à Fort Knox comme garantie pour attirer les gros déposants étrangers », raisonne M. Nahas.

La question peut difficilement être tranchée de façon définitive avec les éléments actuellement connus. Si le principe d’extraterritorialité de la loi d’un État sur ses biens et ses nationaux est admis en droit international, il faut néanmoins connaître sous quelles conditions cet or a été transféré aux États-Unis à partir des années 1970 pour pouvoir se prononcer, notent des experts interrogés par L’Orient-Le Jour. Or tous les interlocuteurs interrogés à ce sujet soulignent l’opacité qui entoure ces conditions. Le département américain du Trésor n’a en outre jamais réellement fait preuve de transparence concernant l’or stocké à Fort Knox.

Ce qui est certain, c’est que la plupart des pays ayant souhaité rapatrier tout ou partie de leurs réserves qu’elles avaient confiées aux États-Unis des décennies plus tôt, comme l’Allemagne ou encore la Turquie, se sont heurtés à des difficultés.

Le champ d’application de la loi n° 42 n’est toutefois pas la seule préoccupation de Mouwatinoun wa Mouwatinat fi Dawla qui pointe également du doigt le fait que l’État libanais a renoncé à son immunité souveraine de juridiction au moment où il a décidé d’émettre des eurobonds. « Une des clauses qui s’applique pour ces souscriptions prévoit en effet que l’État se soumette de façon irrévocable à la compétence des tribunaux new-yorkais pour tout litige lié aux engagements financiers souscrits. Le texte impose également que tous les actifs de l’État libanais – à l’exception de trois catégories d’actifs principalement liés aux missions diplomatiques du pays – peuvent être saisis en cas de défaut de paiement », souligne M. Nahas. Et d’ajouter : « Cela veut dire que l’or serait saisissable en cas de défaut de paiement, jusqu’à preuve du contraire. »

« Ces questions ne se sont jamais posées parce que le pays a, jusqu’à présent, toujours honoré ses engagements financiers. Mais maintenant que nous sommes sur la corde raide sur le plan financier, elles sont plus que jamais au centre de l’actualité », conclut-il.



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POURQUOI ALARMER LES CITOYENS AVEC JUSTE DES SUPPOSITIONS LOIN D'ETRE FONDEES NI MEME POSSIBLES ?

Gaby SIOUFI

13 h 00, le 13 octobre 2019

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Commentaires (11)

  • POURQUOI ALARMER LES CITOYENS AVEC JUSTE DES SUPPOSITIONS LOIN D'ETRE FONDEES NI MEME POSSIBLES ?

    Gaby SIOUFI

    13 h 00, le 13 octobre 2019

  • ARTICLE SUR CEDRE PARU DE CHINE BEIRUT, Oct. 11 (Xinhua) -- French authorities are discussing the curtailment of CEDRE funds to Lebanon from 11 billion U.S. dollars to 7 billion U.S. dollars with the International Monetary Fund and the World Bank, Al Joumhouria newspaper reported Friday. Ammar Houri, advisor to Prime Minister Saad Hariri, said that such a measure has been discussed in the framework of an analysis for the current situation in Lebanon. Houri emphasized that Lebanon needs to adopt the necessary reform measures pledged at CEDRE conference before asking the international community to fulfill its full promises. Lebanon has pledged during CEDRE conference last year to adopt certain reform measures in a bid to unlock 11 billion U.S. dollars in loans and donations to support its ailing economy. However, the government has been incapable of taking serious measures so far which prompts various analysts and officials to express their fear about the fate of CEDRE. While the government approved the 2019 state budget after 37 cabinet and parliamentary meetings, the cabinet is currently discussing the 2020 state budget with a great possibility of a delay in approving it within the required time limit. QUAND ON ATTEND PLUS DE DEUX ANS POUR FAIRE LES REFORMES PAS ENCORE FAITES ON PERT 4 MILLIARS DE PRET

    LA VERITE

    16 h 46, le 11 octobre 2019

  • Le loi no. 42 a figé le stock d'or de sorte que plus personne ne peut l'engager dans des garanties, ni de le toucher d'aucune façon, sans vote au parlement. De ce fait il ne doit même plus figurer dans les actifs de la BDL. Ce poste est devenu une ligne hors bilan de la comptabilité nationale et de celle de la BDL. Dormez tranquillement.

    Shou fi

    13 h 35, le 11 octobre 2019

  • l’État libanais a renoncé à son immunité souveraine de juridiction au moment où il a décidé d’émettre des eurobonds. : « Cela veut dire que l’or serait saisissable en cas de défaut de paiement, jusqu’à preuve du contraire. » TOUT EST DIT CLAIR ET NET L'ETAT A RENONCE A SON IMMUNITE SOUVERAINE l’État se soumette de façon irrévocable à la compétence des tribunaux new-yorkais pour tout litige lié aux engagements financiers souscrits. Le texte impose également que tous les actifs de l’État libanais – à l’exception de trois catégories d’actifs principalement liés aux missions diplomatiques du pays – peuvent être saisis en cas de défaut de paiement », DONC L'OR PEUT ETRES SAISI PAR UN TRIBUNAL DE NEW YORK EN CAS DE NON PAIEMENT VOILA COMMENT ON DETOURNE LES LOIS MAIS DE TOUTE FACON S'EMPRUNTER A 12 OU 13 % QUAND LE TAUX REEL EST D'A PEINE 1 OU 2 % ET EN PLUS EN EUROS IL DEVIENT NEGATIF C'EST DU SUICIDE PROGRAMME MR SALAME A BEAU FAIRE, LA CORRUPTION A ETE PLUS FORTE QUE LUI ET N'A PAS L'AIR DE S'ARRETTER EVIDEMENT Attention M Charbel Nahas , la justice va etre prompt a vous poursuivre d'apres le President qui a rappele que toute personne qui ecrit des mots qui mette en doute l'integrite des finances du pays est passible de prison et d'une amende. Il vaut mieux preparer votre passeport et vos visas

    LA VERITE

    11 h 28, le 11 octobre 2019

  • Un article totalement inopportun de la part de l’OLJ. Sans doute que peu de personnes sont compétentes pour s’exprimer sur le fond de ce sujet, il ne sert donc à rien de publier de tels articles sauf pour alimenter la psychose actuelle sur l’économie locale. Il faudrait peut être ajouter dans votre article que tant que nous avons une personne de la qualité et de la compétence de Riad Salamé à la tête de la BDL, il ne faut surtout pas imaginer des scénarios catastrophe dignes des séries de Netflix

    Lecteur excédé par la censure

    11 h 08, le 11 octobre 2019

  • Les statuts de la BDL définissent le rôle des réserves pour protéger la devise nationale contre les grandes fluctuations de change. Les réservent ne peuvent pas garantir les fonds souverains qui sont uniquement couvert par la capacité économique de la nation et sa collecte des impôts pour assurer les remboursements, d’où les taux d’intérêt pour couvrir les risques.

    DAMMOUS Hanna

    10 h 53, le 11 octobre 2019

  • A LA MAISON ELLES RISQUENT ET LA OU ELLES SONT ELLES RISQUENT DE MEME.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 21, le 11 octobre 2019

  • Question légitime et qui mérite une réponse claire pour dissiper tout malentendu.Les aveuglés du régime fort devrait arrêter de vouloir nous museler par la force.

    paznavour

    09 h 32, le 11 octobre 2019

  • Rapatriez l’or ou au moins placez le dans un pays un peu plus responsable que les États Unis.

    Chady

    08 h 26, le 11 octobre 2019

  • Il y a bien lontemps qu'on n'est plus à l'abri d'une mauvaise surprise...

    NAUFAL SORAYA

    07 h 51, le 11 octobre 2019

  • Ce n'est vraiment pas le moment de faire paniquer les libanais en soulevant de telles questions qui n'auront jamais de réponse , c'est du suicide ! Monsieur Nahas , s'il vous plaît taisez-vous , ou bien Messieurs de l'Orient-le-Jour, faites taire ce Monsieur , car ces questions ne servent à rien d'autre que de porter atteinte à la LL

    Chucri Abboud

    02 h 01, le 11 octobre 2019

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