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Lifestyle

Rabih Kayrouz : « Ce sont les Libanaises qui m’ont appris à comprendre le vêtement »

Le créateur libanais Rabih Kayrouz revient sur cinq moments marquants de ses vingt ans de carrière, de ses débuts à Beyrouth jusqu’au lancement, lundi après-midi, de sa vingtième collection dans le cadre de la semaine de la Haute Couture à Paris…

Rabih Kayrouz lors de l’ouverture de son atelier parisien en 2009.

Mon premier défilé à Beyrouth en 2004

Je me souviens que ce jour-là, un trafic insensé ceinturait le périmètre du centre Starco où avait lieu le défilé. Je ne me rendais pas compte de ce qui m’arrivait, et aujourd’hui, avec du recul, je me dis que c’est dans ce genre de moments qu’opère la magie de Beyrouth. C’était un grand moment de fête, en fait pas très loin de l’esprit des défilés tels que je continue à les concevoir jusqu’à aujourd’hui. D’ailleurs, depuis mes débuts, je n’ai jamais envisagé la mode comme une discipline à part, en marge, mais plutôt, à l’image des autres formes d’arts, comme une façon de célébrer la vie. C’est la raison pour laquelle j’ai toujours tenu à mêler mes vêtements, au cœur des lieux que j’investis, que ce soit à Beyrouth ou Paris, à la musique, la danse et même la nourriture… Il n’y a rien de plus beau qu’une longue tablée qui côtoie des vêtements, sur un air de Nina Simone ou Oum Kalthoum…

La douce parenthèse beyrouthine entre1999 et 2009

Les dix années qui se sont écoulées entre mon lancement à Beyrouth (1999) et mon implantation à Paris (2009) évoquent pour moi des souvenirs doux d’une ville curieuse, bouillonnante et si particulière. C’est qu’au cours de cette période, éternellement niché dans mon atelier du quartier de Gemmayzé, j’ai eu la chance de rencontrer des Libanaises extraordinaires, les unes plus inspirantes que les autres et qui m’ont appris à comprendre le vêtement. À la faveur des relations qui se tissaient avec chacune d’elle, en l’occurrence celles qui m’ont fait confiance jusqu’au bout, même au moment où j’avais du mal à me faire confiance, ma manière de construire une robe, une veste ou un pantalon a évolué. Aujourd’hui, c’est envers elles que je suis le plus reconnaissant.

L’ouverture de l’atelier à Paris en 2009

Ce jour-là, le 7 juillet 2009, toute ma famille m’entourait, ainsi que les Français que je rencontrais pour la première fois au 38 boulevard Raspail où je m’installais. À l’époque, bien avant les technologies d’aujourd’hui qui mettent le monde à portée de main, à mes yeux de libanais fraîchement débarqué à Paris et qui avait tout à construire, cela me semblait comme une montagne ! N’empêche que cette ouverture avait été pensée comme un mariage de village, entre les robes présentées dans la salle principale, la musique orientale, le taboulé qu’on préparait en cuisine et les serviettes parfumées à l’essence de fleur d’oranger qu’on sortait du congélateur pour rafraîchir les invités. Un brin de Beyrouth planté en plein Paris… S’il fallait associer une émotion à ce moment, je crois que ça serait celle des premières fois. Ces palpitations au cœur et au ventre qui sont restées intactes, même vingt ans plus tard.

Le défilé de la collection printemps/été 2017

Autour d’un arbre posé en plein milieu de mon atelier du boulevard Raspail, lors d’une présentation à petite échelle mais à fortes émotions, la danseuse étoile Marie-Agnès Gillot avait dansé la collection printemps/été 2017 de la maison, accompagnée de jeunes talents de l’Opéra de Paris. Un peu comme un retour aux origines du lieu, j’avais été inspiré, pour ce faire, d’En attendant Godot de Beckett qui, justement, avait été créé dans le Théâtre de Babylone (ensuite devenu mon siège parisien). Cette sorte d’ouragan jaune, noir, violine et blanc, toute en force et grâce, qui prenait forme au cœur de mon atelier, je crois que c’était l’un des moments les plus intenses de ma carrière.

L’entrée de la Maison Rabih Kayrouz à la Chambre syndicale de la haute couture de Paris en 2019

Même si, en fait, rien n’a réellement changé depuis cette appellation, du fait que j’ai toujours fait défiler du prêt-à-porter mais avec toutes les qualités et le savoir-faire de la haute couture, l’entrée de la Maison Rabih Kayrouz dans la Chambre syndicale de la haute couture de Paris me rend indéniablement plus responsable. Jusqu’à aujourd’hui, je ne trouve pas les mots pour dire mon émotion et ma gratitude. Surtout envers mon équipe que ce label célèbre et qui s’en trouve qualifiée et reconnue. On ne travaille pas seul dans ce métier, et d’ailleurs sans toutes ces fabuleuses personnes qui m’entourent, rien des dernières vingt années n’aurait été possible…


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Les Libanais ? Donnez leur la Paix et ils etonneront le monde!

Marie-Hélène

08 h 53, le 03 juillet 2019

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Commentaires (1)

  • Les Libanais ? Donnez leur la Paix et ils etonneront le monde!

    Marie-Hélène

    08 h 53, le 03 juillet 2019

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