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Culture - Événement

Tous les chemins mènent à Baalbeck l’éternelle

Une exposition emblématique, un thème qui n’a pas fini de faire parler de lui et des histoires urbaines, identitaires, politiques et sociales qui transcendent le temps. L’exposition « Baalbeck, Archives of an Eternity » (Archives pour une éternité) a été inaugurée hier au Musée Sursock ; une expérience inédite où la magie de traverser 10 mille ans d’histoires est désormais possible.

Les ruines de Baalbeck vues à travers le village. © Marilyn Stafford

Longer les espaces du Musée Sursock pour se promener dans 10 mille ans d’histoires qui s’entremêlent, aborder les différentes facettes d’une cité, mais surtout d’une civilisation grandiose : c’est l’expérience à laquelle a pu assister hier un public venu admirer la charge artistique atemporelle de Baalbek. Des peintures orientalistes venues d’ailleurs, aux affiches vantant les atours touristiques du Liban d’avant-guerre, en passant par les moments phares du mythique Festival international de Baalbeck et des pièces d’archives uniques, c’est le pari gagné de l’exposition « Baalbeck, Archives of an Eternity »* (Baalbeck, archives pour une éternité). Sous l’égide du curateur Vali Mahlouji, avec le soutien de la Fondation Philippe Jabre et la collaboration du Festival international de Baalbeck mais aussi de la Direction générale des antiquité, (DGA) et le ministère de la Culture, l’exposition sublimée par la mise en scène de Jacques Abou Khaled comprend plus de 300 éléments. Des peintures, mais aussi des manuscrits, des pièces d’archives originales, des affiches, des pièces de monnaie, des éléments archéologiques dont certains remontent à la période néolithique, se croisent pour raconter tout un pan de l’histoire de l’homme.


Plus qu’un site historique…un amalgame de vécus
Car au-delà de l’imaginaire collectif qui veut – de manière sans doute involontaire – réduire l’histoire de Baalbeck à ses temples romains, dont les fameuses six colonnes du temple de Jupiter, l’exposition en cours tisse des histoires qui vont au-delà de la nostalgie d’une cité-musée à l’instar de Palmyre ou de Jerash, comme l’indique Vali Mahlouji à L’Orient- Le Jour. L’expert qui s’est longtemps penché sur les archives de l’Iran de la période qui a précédé la révolution et notamment sur les archives du Festival de Chiraz Persépolis, explique que le site de Baalbeck est l’un des plus « puissants au monde », autant historiquement qu’en matière d’identité humaine. L’exposition est pour lui l’occasion de faire « parler » le mouvement infini de sens et de personnes dont l’histoire est ancrée dans la complexité des couches (pré)historiques du site. « Les temples sont bâtis exactement à l’endroit où 10 mille ans de civilisations ont vécu », précise-t-il. « Nous assistons aujourd’hui à cette tension constante entre le site archéologique et l’espace urbain investi de toutes les attitudes et identités humaines », se réjouit Vali Mahlouji. Des propos qui rejoignent ceux de de Zeina Arida, directrice du Musée Sursock. Celle qui indique que la volonté d’organiser une exposition autour du site symbole, « au même titre que les cèdres du Liban », a commencé depuis deux ans déjà. « Avec Nayla de Freige (directrice du Festival international de Baalbeck), Philippe Jabre (collectionneur et mécène) et Gaby Daher (marchand d’art et expert de la peinture orientaliste), nous discutions de l’importance de mettre en avant ce site », indique-t-elle en soulignant que la destruction du site de Palmyre en Syrie a précipité les choses. « Nous, qui prenions pour acquis l’aspect éternel des sites archéologiques, avons découvert qu’ils ne sont pas immuables. »


Des pièces uniques… des archétypes millénaires
Si pour Zeina Arida, comme pour Vali Mahlouji et Gaby Daher, il est presque impossible d’identifier les éléments maîtres de cette exposition, force est de constater qu’elle regroupe des pièces uniques dont la plupart sont exposées pour la première fois. Le public pourra ainsi admirer une toile mythique de Prosper Marilhat (1811-1847) qui a appartenu au prince de Joinville, duc d’Orléans et fils de Louis-Philippe, roi des Français, dévoile Gaby Daher. Celui qui a largement participé à la formation de la collection de Philippe Jabre (dont une trentaine de toiles font partie de l’exposition) indique que les œuvres exposées de Louis-François Cassas (1756-1827) sont d’une rareté exceptionnelle. Pour la petite histoire, le peintre orientaliste avait été envoyé par Louis XVI pour faire le relevé des ruines de Baalbeck et Palmyre à la fin de XVIIe siècle. Le convoi du peintre qui a reproduit une vue générale très rare des ruines de l’époque avait été attaqué plusieurs fois. « À Baalbeck, il avait même dû soudoyer les habitants pour obtenir une protection qui lui a permis de mener à bien sa mission », raconte Gaby Daher. L’exposition est aussi l’occasion d’admirer des daguerréotypes extrêmement rares de Joseph-Philibert Girault de Prangey (1804-1892) dont la plupart des œuvres appartiennent à la Bibliothèque nationale de France.

Des peintures mais aussi des photographies dont une photo aérienne du site de Baalbeck prise par l’Armée française du Levant en 1920 et l’album du photographe personnel du Kaiser Guillaume II (collection de Philippe Jabre) sont également à l’honneur.

La scénographie de l’exposition réussit à transmettre la magie des facettes multiples identitaires du lieu. Notons par exemple l’espace dédié au Festival international de Baalbeck dont la traversée ressemble à une promenade puisée au cœur des performances épiques qui ont ponctué des décennies entières. « Baalbeck, archives pour une éternité » réussit à faire voyager le public tantôt témoin, tantôt voyeur, à travers des symboles qui dépassent le cadre spatiotemporel du lieu. Une ode vivante à la vie éternelle.


*Musée Sursock

Rue de l’archevêché grec-oorthodoxe, quartier Sursock, Beyrouth. Ouvert jusqu’au 22 septembre 2019. De mercredi à dimanche, de 10h à 18h et jusqu’à 21h le jeudi.



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