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Culture - Rétrospective

Krikor Agopian, l’homme qui venait du froid avec le chaud au cœur...

Il vient de signer à la galerie Hamaskaïne Lucy Tutunjian son livre en deux volumes (348 pages), somme et couronnement d’une vie dédiée à la peinture dans ses multiples expressions. L’ouvrage accompagne une exposition de 97 tableaux de sa collection privée. Un tour d’horizon pour revisiter un parcours et une carrière de plus d’un demi-siècle de labeur et de création...

Krikor Agopian

À soixante-seize ans, Krikor Agopian semble d’une éternelle jeunesse et surtout d’une indéfectible fidélité à son art. Égal à lui-même avec son inoxydable optimisme et son sens perfectionniste du travail, volubile et souriant. L’homme à la barbichette blanche et à la casquette vissée au front vient de signer un ouvrage, imprimé et publié sous les auspices de Hamaskaïne. Une sorte de rétrospective de ses œuvres qui ont fait le tour du monde et dont certaines vivent non seulement dans des collections privées prestigieuses, mais au cœur des musées (Orsay à Paris, Benjamin Papineau à Laval, catholicossat à Antélias). Des œuvres qui ont souvent changé de styles, de motifs, d’inspirations, d’expressions. C’est l’homme aux multiples visages, aux multiples pinceaux et aux palettes changeantes.

Préfacé par Robert Bernier (éditeur à Montréal) et Guy Robert (historien d’art et fondateur du musée contemporain de Montréal), l’ouvrage, un peu confus, peu profond dans son analyse et inégal par ses textes écrits glanés au fil des ans, jette la lumière sur un parcours riche et polymorphe. Pour sa vie entre deux rives et deux continents, Agopian, qui s’est partagé entre le Liban et le Canada, auréolé de plusieurs prix internationaux, n’a pas omis aussi d’insérer des extraits de textes critiques de la presse locale, aussi bien en langue arabe que française, anglaise et arménienne.

De ses premiers dessins, on retient cette bague au diamant luisant (le plus petit format qu’il ait jamais commis, 7 cm x 7,5 cm) à sa plus grande toile (1,1 m x 2,1 m, marque déposée de l’originalité d’Agopian : ce centimètre rebelle!) le sens d’un patent anticonformisme. Qui ne se limite ni au temps, ni à l’espace, ni au sujet, ni à la matière. De l’acrylique à l’air brush en passant par les mixed medias, les collages, le papier fait main, le travail sur bois ou plexiglas et les gravures, l’œuvre est tentaculaire et dissemblable.



(Pour mémoire : Le règne d’une apocalypse festive)



De l’érotisme le plus brûlant aux natures mortes qui n’ont rien à envier aux maîtres italiens de la Renaissance en passant par ses nus féminins aux galbes sensuels, ses portraits et autoportraits, ses grenades au cœur éclaté avec des grains pourpres, juteux et transparents comme du cristal, ses écorces d’arbre d’un renversant hyperréalisme, ses mécaniques habilement agencées en ventre ouvert aux viscères fourmillants de détails, aux allures d’une incroyable dentelle mécanique… Aujourd’hui même, il surprend le spectateur avec deux Pégase fraîchement peints l’année dernière avec pour harnais cet ornement industrialisé, fin comme une broderie fantaisiste….

On revient aussi sur ce papier fait main (à base de plantes, de fibres textiles, le tout pressé et séché au soleil) selon une méthode chinoise et qui fait se marier d’une manière singulière les couleurs pour des tonalités d’un pastel surprenant. Que cela soit un arbre ou des doigts tenant une balle ou une articulation à la Michel-Ange, ces toiles, tout en relief, exécutées en 1978 et dont le succès se répercute dans le temps, restent un moment fort, dans leur minimalisme et sobriété de dessins, dans le maillon des toiles qui se sont accumulées au fil des années. Intrépide dans toutes les investigations ou les explorations artistiques, c’est ce qui a fait dire à Krikor Agopian cette phrase : « Un peintre devrait se servir de n’importe quelle matière ou méthode correspondant à ses besoins de créativité. »

L’aventure picturale de Krikor est-elle close ? Bien malin celui qui le dira car l’artiste qui a croqué des grenades à n’en plus finir, qui a dévêtu les femmes sur fond de coquilles évidées à n’en jamais se rassasier et qui s’est entretenu largement des déchirures des papiers à ficelles dévoilant un univers entre galaxies stellaires et mécaniques déglinguées a toujours fini par tourner casaque et partir ailleurs. Il a toujours surpris, peut-être lui-même d’abord, mais assurément aussi son public. Au dam de ne jamais faire l’unanimité pour un travail qui choque parfois ou pèche par une répétition obstinée. Pour reprendre les termes de l’un de ses préfaciers : « Chez lui une chose en cache toujours une autre… » Même au grand âge, on attend la suite !


Exposition rétrospective des œuvres picturales de Krikor Agopian et vente de sa monographie à la galerie Hamaskaïne Lucy Tutunjian (Bourj Hammoud) jusqu’au 31 mai 2019.



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