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Liban - Social

Grève de la BDL : les transactions bancaires gelées, à moins d’une percée dans les contacts

La reprise du débat autour du budget de 2019 au gouvernement fera face à des institutions paralysées aujourd’hui et des mouvements dans la rue.

La BDL restera fermée aujourd’hui, mais les contacts se poursuivent avec les autorités. Jamil Saïdi/Reuters

La grogne sociale est encore montée d’un cran ce week-end, avec l’annonce d’une grève ouverte à partir d’aujourd’hui dans les différentes institutions officielles ou autonomes, notamment la Banque du Liban, la Caisse nationale de Sécurité sociale ou encore Ogero, qui l’ont tous annoncée dans des communiqués. Alors que le débat autour du budget de l’année 2019 se poursuivra aujourd’hui en Conseil des ministres, la rue s’enflamme. Ainsi, un sit-in est prévu demain par les fonctionnaires de la CNSS devant le siège principal de cette institution à Beyrouth, en signe de refus de toute incidence des mesures d’austérité sur leurs salaires. Le port de Beyrouth, pour sa part, est en état d’arrêt depuis dix jours en raison des grèves. Un État paralysé accueillera donc aujourd’hui le débat en Conseil des ministres.

Les formalités sont gelées dans les différentes institutions, mais une grève interpelle tout particulièrement le public, celle des employés de la BDL. Cette grève aura une incidence directe sur la liquidité dans les banques privées qui passent par la BDL pour leurs transactions. Les chèques et les différentes transactions seront ainsi gelés. La question est suffisamment inquiétante pour avoir été soulevée par le président de l’Association des banques Joseph Torbey lors de son entrevue hier avec le président de la République Michel Aoun à Baabda. « Cette grève paralysera le travail dans le secteur bancaire, a-t-il dit. Les banques placent en effet leurs liquidités financières à la BDL et s’en servent pour faire fonctionner leurs opérations quotidiennes. Une grève à la BDL ne peut qu’affecter le travail des banques. Voilà pourquoi j’ai demandé au président de s’occuper personnellement de ce dossier parce que le fonctionnement du secteur bancaire est crucial pour les citoyens et pour l’économie du pays. »


« Pourquoi changer le statut d’une institution prospère ? »
Or, les employés de la BDL, eux, ne décolèrent pas. Dans son communiqué, leur syndicat estime qu’ « après deux jours de grève (jeudi et vendredi derniers) et de fermeture totale, et vu qu’il n’y a pas de retour positif de la part des autorités concernées, qui insistent à inclure dans le projet de budget 2019 des clauses qui affectent les droits des employés et qui visent à mettre la main sur la BDL et son autonomie administrative et financière consacrée par la loi, notre assemblée générale a décrété la poursuite de la grève ».


(Lire aussi: Budget 2019 : le FMI fait « confiance » au gouvernement, assure Bteich)


Interrogé par L’OLJ sur les dernières informations concernant la grève, Abbas Awada, président du syndicat des employés de la BDL, précise que celle-ci est toujours d’actualité aujourd’hui, mais que le reste dépendra des contacts établis sur le terrain. « Il y a eu des contacts hier et aujourd’hui (samedi et dimanche) en vue de débloquer la situation, nous déciderons du sort de la grève suivant les résultats de ces contacts demain (lundi) », précise-t-il.

M. Awada explique les raisons de la grogne des employés de la BDL, considérés comme des employés du privé, soumis à une échelle des salaires qui est propre à cette institution et n’ayant donc pas bénéficié de l’augmentation des salaires de leurs confrères du public. « Plus précisément, on parle de réduire nos mois de salaires de seize (comme c’est le cas dans les banques privées) à 12, ce qui équivaut à réduire d’un coup nos rentrées de 25 %, explique-t-il. Le public doit savoir qu’arrivés à l’âge de la retraite, nous ne continuons pas à toucher un salaire, mais nous avons des indemnités de fin de service. Si les prêts que nous contractons dans le cadre du système de la BDL ne sont pas remboursés, nous sommes souvent endettés. Nous ne sommes pas dans l’aisance comme certains le suggèrent. »


(Tribune : Budget : c’est à la classe dirigeante, et non au peuple, de payer pour ses erreurs)


Si la BDL n’est pas une institution publique de par son statut, en quoi la réduction des salaires serait-elle utile pour économiser les deniers publics? « C’est exactement la question que nous nous posons, répond M. Awada. La BDL verse aujourd’hui 80 % de ses bénéfices à l’État et gère son budget avec les 20 % restants. Cela signifie que ses dépenses n’affectent aucunement le Trésor. De plus, si le gouvernement cherche à faire des économies, pourquoi ne s’attaque-t-il pas aux véritables dossiers de gaspillage et de corruption ? »

Il faut savoir qu’en filigrane, les employés de la BDL craignent un changement de statut de cette institution si les ingérences dans son budget se poursuivent. « Cette institution est prospère parce qu’elle est autonome, comme toutes les autres banques centrales du monde. La rendre officielle serait la soumettre aux mêmes facteurs qui rendent les autres si infructueuses », insiste-t-il.

Le président du syndicat des employés de la BDL assure donc que les employés sont à leur poste sans travailler, mais que la grève ne se poursuivra pas inutilement, bien que la solidarité avec les autres syndicats s’impose. Car cette grève a des conséquences. « Si la BDL reste fermée, la liquidité dans les banques s’en ressentira, il deviendra difficile de retirer de l’argent par exemple, souligne-t-il. De plus, toute transaction ou opération impliquant des chèques seront gelées. Cela n’aura pas seulement des conséquences sur les individus, mais sur l’État également, qui a des engagements envers des partenaires au Liban et à l’étranger, et qui peut se retrouver avec des procès pour retard de paiement. »

À savoir que le ministre de tutelle de la BDL, le ministre des Finances Ali Hassan Khalil, a tweeté samedi que « toute information autour d’un changement (dans le statut de la BDL) n’est que pure invention et fait partie d’une campagne de diffusion d’informations fausses et suspectes visant à semer la confusion autour du budget ».


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commentaires (3)

Je ne pense pas que les fonctionnaires refusent un effort pour le sauvetage du pays. De l'argent public s'est "volatilisé" et ne sera vraisemblablement pas restitué... Pourquoi seraient ils les 1ers à faire des efforts? A la classe politique d'être exemplaire... et non pas faites ce qu'on vous dit. Pas ce que l'on fait... Dites nous ce qu'il vous manque et l'on vous expliquera comment vous en passer...

Sybille S. Hneine

17 h 36, le 06 mai 2019

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Commentaires (3)

  • Je ne pense pas que les fonctionnaires refusent un effort pour le sauvetage du pays. De l'argent public s'est "volatilisé" et ne sera vraisemblablement pas restitué... Pourquoi seraient ils les 1ers à faire des efforts? A la classe politique d'être exemplaire... et non pas faites ce qu'on vous dit. Pas ce que l'on fait... Dites nous ce qu'il vous manque et l'on vous expliquera comment vous en passer...

    Sybille S. Hneine

    17 h 36, le 06 mai 2019

  • QUE PREFERE-T-ON UNE REDUCTION MINIME DES SALAIRES ET RETRAITES, UNE AUGMENTATION AUSSI MINIME DE LA TVA AVEC D,AUTRES MESURES TIMIDES... OU... LA DEVALUATION DE FACTO ET INEVITABLE ALORS DE LA LIVRE LIBANAISE QUI REDUIRAIT LES SALAIRES ET LES RETRAITES ET AUTRES SUBSTANTIELLEMENT ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 28, le 06 mai 2019

  • IL EST TRES REGRETTABLE DE VOIR LES LIBANAIS DE TOUS LES SECTEURS REFUSER LE SAUVETAGE IMMINENT DE LEUR PAYS LOIN DE TOUTE LOGIQUE DANS LES CIRCONSTANCES ACTUELLES. ILS ONT RAISON QU,IL FAUT POURSUIVRE LES VOLEURS ET ESSAYER DE RECUPERER L,ARGENT VOLE MAIS CA PREND DU TEMPS ET RIEN N,EST GARANTI. ENTRETEMPS LE PAYS AVEC TOUS SES CITOYENS SERA EN FAILLITE ET TOUT LE MONDE EN SOUFFRIRA ENORMEMENT. IL FAUT DES REFORMES ET DES SACRIFICES URGENTS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 32, le 06 mai 2019

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