Un juge d’instruction a ordonné un procès devant le tribunal correctionnel à Paris pour l’oncle du président syrien Bachar el-Assad, soupçonné de s’être frauduleusement bâti en France un empire immobilier, estimé à 90 millions d’euros, a-t-on appris hier de sources concordantes.
Le juge parisien Renaud Van Ruymbeke a renvoyé sur les bancs des prévenus Rifaat el-Assad, 81 ans, exilé en Europe depuis le début des années 1980, afin qu’il soit jugé pour « blanchiment en bande organisée » de fraude fiscale aggravée et de détournements de fonds publics aux dépens de l’État syrien, selon l’ordonnance datant du 15 avril et dont a eu connaissance l’AFP. Le frère de l’ex-président syrien Hafez el-Assad est soumis depuis son inculpation en juin 2016 à un contrôle judiciaire qui limite ses déplacements à l’international. Rifaat el-Assad a toujours soutenu devant les enquêteurs que sa fortune provenait des largesses du royaume saoudien, à hauteur de « plus d’un million de dollars par mois », des justifications que le magistrat a jugées insuffisantes.
Ancien pilier du régime syrien, Rifaat el-Assad avait été chef des forces d’élite de la sécurité intérieure, les Brigades de défense, qui avaient écrasé dans le sang en 1982 une insurrection islamiste à Hama. Il avait été contraint à l’exil dès 1984 après un coup d’État manqué contre son frère Hafez, le père de Bachar, qui dirigea le pays de 1971 à 2000. Après son arrivée en Europe, Rifaat el-Assad a mené grand train et accumulé un impressionnant patrimoine immobilier, jusqu’à ce que la justice se penche sur son cas et ouvre une information judiciaire en avril 2014, après une plainte de l’ONG anticorruption Sherpa.
En France, le juge soupçonne notamment Rifaat el-Assad d’avoir « mis à l’abri son patrimoine immobilier », évalué à 90 millions d’euros, dans des sociétés « immatriculées dans des paradis fiscaux ». La plupart de ses biens – dont deux hôtels particuliers et une quarantaine d’appartements, un haras et un château – ont été saisis. Tout comme plus de 500 biens, d’une valeur de 691 millions d’euros, en Espagne, après une vaste opération policière en 2017. « Le symbole historique est fort qu’un ancien responsable du pouvoir sanguinaire de Damas, oncle de Bachar, rende des comptes pour des crimes d’argent qui ne doivent pas faire oublier les crimes de sang qu’il a commis », a réagi William Bourdon, président fondateur de Sherpa.
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15 h 37, le 18 avril 2019