La visite du ministre vénézuélien des Affaires étrangères Jorge Arreaza au Liban mercredi a non seulement retenu l’attention, mais elle a créé une polémique à la suite de ses réunions avec plusieurs responsables, dont le président de la République Michel Aoun. Le régime de Nicolas Maduro au Venezuela étant actuellement considéré comme illégitime par les États-Unis et une cinquantaine d’autres pays, qui appuient l’arrivée au pouvoir de son concurrent Juan Guaido, leader de l’opposition et reconnu président par intérim par ces pays, certaines voix se sont élevées pour demander s’il est sage pour le Liban officiel de recevoir le ministre à très haut niveau. Une telle visite engage-t-elle le Liban en quoi que ce soit ? Quelles conséquences sur le pays dans un contexte de sanctions américaines sur le Hezbollah comme sur le Venezuela, sachant que des responsables américains ont accusé ce parti à plusieurs reprises d’ingérences dans ce pays d’Amérique latine ? M. Arreaza se trouvait hier à Damas, mais on n’avait pas fini de parler de sa visite à Beyrouth…
Dans un de ses tweets enflammés dont il a le secret, le député Jamil Sayyed a fait le parallèle entre le président de la République qui a reçu le ministre vénézuélien, et le Premier ministre Saad Hariri qui ne l’a pas fait. « Notre Premier ministre a refusé de le rencontrer parce qu’il représente le gouvernement de Maduro et que les États-Unis sont contre lui ! a-t-il écrit. Vous étiez les suiveurs d’Assad, et maintenant vous êtes ceux des Américains au nom de la distanciation ! Pourquoi vous souciez-vous de la relation entre Maduro et les États-Unis ? Pourquoi cette surenchère ? »
Le député Sami Fatfat, du bloc du Futur, a employé le même ton pour lui répondre sans le nommer. « L’employé dans les comptes duquel la commission d’enquête internationale (sur l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri) a trouvé des sommes énormes, celui qui a tout appris dans les sous-sols des SR syriens, celui qui falsifiait les dossiers, celui qui a emprisonné les jeunes le 7 août (2001), celui qui a aidé (l’ancien ministre pro-Assad Michel) Samaha à traverser la frontière (libano-syrienne) avec ses explosifs… celui-là même prétend déterminer l’emploi du temps du Premier ministre… »
Invité par des partis
Au-delà de ces joutes verbales, et pour savoir s’il y a des raisons de donner à cette visite une envergure quelconque, il faut tout d’abord la replacer dans son cadre. Selon une source officielle interrogée par L’Orient-Le Jour, le ministre vénézuélien se trouvait à Beyrouth pour participer à une rencontre de solidarité avec le régime de Maduro, organisée par le mouvement nassérien et d’autres partis dits nationalistes, et en marge de sa tournée dans la région. Il a donc sollicité des rendez-vous à ce titre et non sur invitation officielle, poursuit cette source. L’ancien député Nasser Kandil, qui participait à la rencontre de solidarité, confirme à L’OLJ que l’invitation provenait de ces partis.
(Lire aussi : Que cache la solidarité du Hezbollah avec le régime de Maduro ?)
Pour leur part, les sources du Premier ministre affirment à L’OLJ qu’il y avait effectivement eu une demande de rendez-vous avec M. Hariri, « mais que ce rendez-vous n’a pu être accordé en raison de l’emploi du temps chargé de M. Hariri ».
M. Arreaza a également été reçu par le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, et par le président de la commission parlementaire des Affaires étrangères, le député Yassine Jaber. Selon les informations qui ont circulé, le ministre vénézuélien devait surtout rencontrer le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, mais aucune confirmation de cette réunion n’a été faite par ce parti.
Quelle envergure ?
Voilà pour les faits. Mais sur un plan politique, ces entretiens avec les officiels engageraient-ils le Liban dans une voie risquée en rapport avec un conflit politique d’envergure qui se déroule à des milliers de kilomètres ? Les mêmes sources officielles interrogées affirment que ce n’est pas le cas, et qu’il n’y avait aucune raison plausible de refuser de recevoir un ministre des Affaires étrangères, sachant que le régime de Maduro est toujours au pouvoir au Venezuela, et qu’il existe dans ce pays une communauté de 400 000 à 500 000 Libanais. « Il y a chaque jour un grand nombre de visiteurs au palais présidentiel, pourquoi mettre l’accent sur cette visite ? souligne cette source. Recevoir ce responsable vénézuélien n’engage le Liban en rien, d’autant plus qu’il n’a rien demandé. »
M. Arreaza n’a peut-être rien demandé aux autorités libanaises, mais il aurait transmis au chef de l’État un message oral de Nicolas Maduro. Et selon des sources bien informées, il aurait appelé Beyrouth à prendre position aux côtés du régime de Caracas en cas de vote sur le Venezuela à l’Assemblée générale de l’ONU.
Même son de cloche du côté de Nasser Kandil, qui estime que « le Liban officiel ne peut se comporter qu’en conformité avec le respect de la légalité internationale, or les Nations unies reconnaissent toujours le régime de Maduro, et le représentant du Venezuela à l’ONU est toujours celui du régime ». Il ajoute que durant la rencontre avec les partis, « M. Arreaza a fait un état des lieux de la situation dans son pays, il n’y a pas eu de débats ». Pour lui, « il est normal de se solidariser avec ce régime qui a toujours soutenu le Liban et les Palestiniens contre Israël, malgré la communauté juive importante dans ce pays, et nous l’avons fait sans engager le Liban à quoi que ce soit ».
Qu’en est-il des liens entre le Hezbollah et le Venezuela, qui font tous deux l’objet d’accusations et de sanctions de la part des États-Unis ? Pour Nasser Kandil, comme pour une source proche du Hezbollah, « ces rumeurs sont totalement infondées ; pourquoi un grand pays comme le Venezuela aurait-il besoin du concours d’un parti libanais ? ». La source précitée indique qu’« il est normal que face à de telles pressions, un pays cherche à utiliser les outils diplomatiques pour plaider sa cause ».
« S’en tenir à la neutralité »
Mais tout le monde ne partage pas cette lecture. Sami Nader, analyste politique et économique, a indiqué à L’OLJ craindre que le Liban « soit utilisé pour légitimer un axe régional qui ne compte plus que quelques pays, mais qui reste influent ». « Le Liban doit s’en tenir à la neutralité, ajoute-t-il. Nous n’avons pas besoin d’un souci en plus. Le pays subit déjà les conséquences des sanctions américaines contre le Hezbollah. Or la légitimité du régime de Maduro fait l’objet de controverse, et la moitié du monde ne la reconnaît plus. » L’analyste estime que pour le Liban, « le plus prudent est de privilégier le consensus arabe quand celui-ci existe, et le consensus international quand c’est le cas ». « Mais lorsqu’il n’y a pas de consensus, il est préférable d’éviter de prendre position », conclut-il.
Lire aussi
Visite remarquée du chef de la diplomatie du Venezuela à Beyrouth
commentaires (11)
haha le liban n'a pas du tout les moyens de ca politique et quand on est au bord de la faillite et en son sein meme 2 armees se partage le territoire des fois il faut s'ecraser …. ( pour les jeunes qui arrivent en politique le liban dans son histoire n'a pas été tout le temps en suiveur … les pays arabes fut un temps suivaient le liban . meme la syrie les emirats l'arabibe enviaient le liban les petro dollars etaient en force dans les banques libanaises, et celui ci pour une periode jouait aux taux de change… quand et comment le liban avait reussit a epargner cet or a la banque centrale?) mais la syrie et meme israel ne voyait pas cela d'un bon oeil la monte du liban n'était pas bonne pour ces pays limitrophe … DONC ISRAEL ET LA SYRIE AVAIENT UN INTERETS COMMUN SUR SON VOISIN … ET DEPUIS NOUS AVON EU QUE DE LA M...… MAINTENANT AUJOURD'HUI CE LIBAN EST LOIN EST TRES LOIN et celui qui pense qu'il peut agir comme un pays fort avec de ces 2 armees se mettent le doigt dans les 2 yeux … le liban n'a aucun poid de taille que ce que certains pays veut bien lui donner mais meme a cela ce n'est pas assez par rapport aux autres joueurs … si nous continuons comme ca alors je peux vous dire qu'on vas le payer
Bery tus
00 h 07, le 06 avril 2019