Un ancien ministre israélien a été condamné mardi à Jérusalem à onze ans de prison après avoir plaidé coupable d'espionnage au profit de l'Iran, dans l'un des épisodes de la guerre de l'ombre que se livrent les deux pays ennemis.
Révélée à retardement en juin 2018, l'arrestation hors du commun de Gonen Segev en Afrique un mois plus tôt avait mis un visage sur les agissements secrets imputés par Israël à l'Iran, en même temps qu'elle mettait fin au parcours d'un personnage sulfureux et tombé en disgrâce.
Gonen Segev, ministre de l'Energie et des Infrastructures dans les gouvernements dirigés par Yitzhak Rabin puis par Shimon Peres en 1995 et 1996, était accusé d'avoir fourni à l'Iran, entre 2012 et juin 2018, des informations sur des sites sensibles, des responsables et le secteur énergétique israéliens. Les autorités israéliennes sont restées discrètes sur le détail de ses agissements et son procès s'est déroulé à huis clos. Mais il aurait rencontré à plusieurs reprises des agents iraniens en différents endroits du monde et se serait rendu à deux reprises en Iran.
Gonen Segev, 63 ans, a été condamné mardi à onze ans de prison en vertu d'un accord préalablement conclu entre défense et accusation. L'accord ainsi que la confidentialité des débats protègent les sources et préservent des informations sensibles, a dit la procureure Geoula Cohen.
Seuls ont été retenus les chefs d'accusation d'"espionnage aggravé" et de "transfert d'informations à l'ennemi", mais pas celui, plus infamant et surtout plus lourd de conséquences, de "trahison", qui figurait dans l'acte d'accusation initial.
Gonen Segev "a émis devant la cour des regrets pour ses actes", a dit l'un de ses avocats , Moshe Mazor, à l'issue de l'audience.
Ses motivations demeurent toutefois obscures. Il aurait nié devant les enquêteurs avoir agi pour l'argent, mais leur aurait dit avoir voulu jouer les agents doubles et devenir un héros israélien, a indiqué la presse, visiblement alimentée par des sources sécuritaires.
Des affirmations sujettes à caution de la part d'un homme qui, mis en cause par le passé pour avoir tenté de faire passer 30.000 comprimés d'ecstasy des Pays-Bas en Israël, avait dit avoir cru qu'il s'agissait de M&M's.
C'était en 2004 et il s'était servi d'un passeport diplomatique falsifié. Déjà condamné en 2003 à un an de prison avec sursis pour une tentative de fraude, il s'était vu infliger cinq ans ferme pour le transport d'ecstasy. Après sa sortie de prison, il s'était établi au Nigeria, exerçant son métier initial de médecin qu'Israël lui interdisait de pratiquer. Ces activités l'auraient mis au contact des recruteurs iraniens.
Arrêté en mai 2018 au passage de la frontière avec la Guinée Equatoriale, il avait été extradé et un temps gardé au secret.
Dans le contexte d'hostilité entre Israël et l'Iran, l'affaire était sensible et son arrestation n'avait été rendue publique que le mois suivant. Les experts ont émis les plus grandes réserves quant à la valeur, pour les Iraniens, de cet homme "grillé" de longue date dans son pays.
"Si Gonen Segev représentait la carte maîtresse de l'Iran en matière de renseignement en Israël, nous pouvons continuer à dormir tranquilles", ironisait le quotidien Maariv en 2018, "Segev n'a accès à aucune véritable information depuis deux décennies".
Cependant, "un Israélien qui a espionné pour l'Iran en Afrique et qui se retrouve en prison en Israël, c'est une victoire importante" pour le contre-espionnage israélien, a dit la procureure.
L'espionnage est l'un des aspects de la confrontation irano-israélienne. Le ministre iranien du Renseignement Mahmoud Alavi avait vanté, dans une apparente référence à Gonen Segev, la réussite de son pays qui était parvenu à placer un agent "dans le gouvernement d'un pays au service de renseignement très puissant".
En avril 2018, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait signé un coup d'éclat en dévoilant des dizaines de milliers de documents présentés comme relatifs au nucléaire iranien et saisis selon lui par les espions israéliens à Téhéran.
Israël se considère comme la cible désignée des programmes nucléaire et balistique de la République islamique. La destruction d'Israël fait partie de la rhétorique historique du régime iranien.
L'Iran assure que son programme nucléaire est purement civil, comme le stipule l'accord qu'il a signé avec les grandes puissances en 2015. Au-delà des manœuvres diplomatiques, la confrontation a pris une tournure militaire dans la Syrie en guerre, pays voisin d'Israël où l'Iran soutient le régime de Bachar el-Assad.
Pour mémoire
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Regrets ou aspirations d'héroîsme raté , il y a toujours quelqu'un à qui profite le crime. Et c'est tant mieux pour l'Iran... pour changer!
17 h 21, le 26 février 2019