Les présidents turc Recep Tayyip Erdogan et américain Donald Trump ont convenu vendredi de coopérer de manière "plus efficace" en Syrie, où Ankara menace de lancer une nouvelle offensive contre une milice kurde soutenue par Washington. Lors d'un entretien téléphonique, MM. Erdogan et Trump "se sont mis d'accord pour assurer une coopération plus efficace au sujet de la Syrie", ont indiqué des sources à la présidence turque.
Cet entretien téléphonique intervient dans un contexte volatile après de nouvelles menaces de M. Erdogan de lancer une opération militaire dans le nord de la Syrie contre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG). Washington appuie les YPG contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI), mais Ankara considère cette milice comme une organisation "terroriste" liée au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui livre une sanglante guérilla sur le sol turc depuis 1984.
Lors de son entretien avec M. Trump, M. Erdogan a d'ailleurs "communiqué les inquiétudes sécuritaires légitimes de la Turquie liées à la présence et aux activités" des YPG de l'autre côté de la frontière, selon les sources présidentielles turques.
M. Erdogan, dont le pays a déjà mené depuis 2016 deux offensives dans le nord de la Syrie, a annoncé mercredi qu'une nouvelle opération serait lancée "dans les prochains jour" et que celle-ci viserait les positions des YPG situées à l'est de l'Euphrate.
Une telle initiative serait potentiellement explosive en raison de la présence de militaires américains aux côtés des combattants kurdes. La Turquie et les Etats-Unis sont deux alliés au sein de l'Otan, mais leurs relations se sont tendues ces dernières années, en raison notamment de la collaboration entre Washington et les YPG qui suscite la colère d'Ankara.
Vendredi, M. Erdogan est revenu à la charge en se disant "déterminé" à "pacifier et sécuriser les régions situées à l'est de l'Euphrate", tout en critiquant avec force le soutien apporté par Washington aux YPG.
(Pour mémoire : L’armée US patrouille dans les zones kurdes à la frontière syro-turque)
Après l'annonce mercredi par M. Erdogan d'une offensive imminente en Syrie, un porte-parole du Pentagone avait souligné qu'une "action militaire unilatérale (...) dans une zone où du personnel américain pourrait être présent, est très inquiétante".
Les tensions ont gagné en intensité ces dernières semaines après que les Etats-Unis ont installé des postes d'observation dans le nord de la Syrie près de la frontière turque afin d'empêcher une altercation entre forces turques et kurdes. Mais cette mesure a suscité l'ire de la Turquie qui voit dans ce dispositif une tentative américaine de protéger les YPG.
Le discours martial de M. Erdogan survient alors que la Turquie entre dans une période électorale propice aux déclarations musclées, avec un scrutin municipal prévu en mars.
Les esprits se sont échauffés en Turquie jeudi avec l'annonce par Ankara qu'un soldat turc avait été tué dans la région d'Afrine, dans le nord de la Syrie, par des tirs des YPG.
Si M. Erdogan insiste sur les régions situées à l'est de l'Euphrate, l'un des principaux points de contentieux est la situation à Manbij, un ville située juste à l'ouest du fleuve contrôlée par les YPG et où des soldats américains sont aussi stationnés. Une feuille de route avait été arrêtée en mai pour apaiser les tensions, prévoyant notamment le retrait des YPG de Manbij et la mise en place de patrouilles conjointes américano-turques, qui ont démarré en novembre. Mais Ankara n'a de cesse de rappeler que le retrait prévu n'a toujours pas eu lieu, menaçant d'agir militairement à Manbij contre les YPG si Washington ne respectait pas ses engagements. "Voici ce que nous disons: soit vous nettoyez la ville et faites sortir (les YPG), soit nous entrons également dans Manbij", a lancé M. Erdogan vendredi.
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20 h 19, le 14 décembre 2018