Il fut un temps où il donnait ses rendez-vous matinaux dans un café du XVe arrondissement de Paris. Non loin des bureaux des Cahiers de l’Orient, son bébé. Il fallait arriver tôt, avant que son téléphone ne se mette à sonner. C’est qu’il était demandé, Antoine Sfeir. Par les médias, les écoles, les centres de recherche, les entreprises aussi, tous intéressés par son expertise.
Un café avec lui, trente minutes, quarante peut-être, arrachées à son emploi du temps surchargé, étaient comme un shot de culture sur le Moyen-Orient, la religion, les religions en fait, sur l’identité, l’altérité. Mais Antoine Sfeir n’écrasait pas son interlocuteur de ses connaissances et de sa science. L’on sortait d’une discussion avec lui contaminé par son avidité de savoir et de comprendre, par sa curiosité jamais assouvie, avec l’envie urgente d’entrer dans la première librairie et de dépenser la moitié de son salaire en livres, pour continuer de tirer tous les fils de la pelote avec laquelle il avait joué devant son expresso serré. Car plus que tout, Antoine Sfeir était un passeur de savoir.
C’est une lettre d’introduction de sa part qui m’a placée, il y a 20 ans tout juste, sur le pas de la porte de L’Orient-Le Jour. Antoine Sfeir recommandait à Issa Goraieb, rédacteur en chef à l’époque, de me prendre en stage. Je ne suis plus jamais partie. Ni de L’Orient-Le Jour ni du Liban. De ça, et de la si riche rencontre avec sa sœur Nicole, partie trop tôt, je lui suis redevable.
Lire aussi
Coriaces racines
commentaires (1)
Sa moderation, sa connaissance, son humanisme faisaient de lui une personne extrêmement attachante. Respects et paix à son âme.
Sarkis Serge Tateossian
10 h 45, le 02 octobre 2018