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Liban - Décryptage

Au cœur des enjeux, le rôle de la Finul et le renouvellement de son mandat

La semaine prochaine, le Conseil de sécurité de l’ONU devrait se réunir pour étudier le rapport annuel sur l’application de la résolution 1701 et décider s’il doit ou non renouveler le mandat de la Finul. Même si des sources diplomatiques européennes affirment que ce renouvellement devrait se faire sans problème, certains milieux politiques pensent au contraire que l’affaire n’est pas aussi simple. Selon ces milieux, la visite du secrétaire d’État adjoint US à la Défense pour les questions de sécurité internationale Robert Karem au Liban, à la veille de la réunion du Conseil de sécurité, n’est pas un simple hasard. Le responsable américain aurait, selon ces milieux, sciemment voulu délivrer des messages précis aux autorités libanaises, au moment où son pays s’est lancé dans une confrontation économique et politique à large échelle avec l’Iran.

D’ailleurs, selon des sources politiques bien informées, le responsable américain a voulu montrer que sa visite au Liban avait un caractère particulier, puisque ses rencontres ne se sont pas limitées aux responsables officiels. Il s’est en effet entretenu avec le chef de l’État bien sûr, ainsi qu’avec le président de la Chambre et le ministre de la Défense, mais il a aussi rencontré entre autres le leader druze Walid Joumblatt et le chef des Forces libanaises Samir Geagea. Si avec tous ses interlocuteurs le responsable américain a mis l’accent sur le soutien de Washington à l’armée libanaise qui, à ses yeux, a fait ses preuves et reste le pilier de la politique US au Liban, il a quand même été critique à l’égard du Hezbollah, considéré comme l’un des instruments de « l’influence négative » iranienne dans la région. Il aurait même évoqué la nécessité de mettre un terme à cette influence. Ce qui place sa visite sous le signe d’une volonté américaine de tâter le terrain avec les autorités libanaises en leur rappelant qu’il serait risqué pour elles de laisser le champ libre à l’Iran et à son principal allié dans la région, le Hezbollah. C’est d’ailleurs dans ce contexte, et pour rassurer en quelque sorte les Américains, que le chef de l’État a rappelé à son interlocuteur américain que l’examen d’une stratégie nationale de défense sera une priorité après la formation du gouvernement.


(Lire aussi : Le mandat de la Finul sera-t-il modifié ?)


Selon certaines sources politiques libanaises, les Israéliens chercheraient, dans le cadre de la prochaine réunion du Conseil de sécurité pour étudier l’application de la 1701, à remettre sur le tapis la nécessité de pousser l’armée libanaise à mettre un terme aux activités du Hezbollah dans la zone d’action de la Finul. D’autant que la construction de leur côté d’un mur de séparation à la frontière sud du Liban montrerait leur volonté de respecter les dispositions de la résolution 1701. La construction du mur de séparation devrait donc être perçue comme une mesure défensive et non comme la préparation de nouvelles offensives. Selon les médias israéliens, le Hezbollah est fortement présent au Sud, dans la zone d’action de la Finul, et il y aurait même caché des dépôts d’armes. Ce qui constitue, selon la version israélienne, une violation flagrante des dispositions de la résolution 1701. Les Israéliens souhaiteraient donc que le mandat de la Finul soit modifié et placé sous le chapitre 7 de la Charte de l’ONU. Autrement dit, les Casques bleus auraient les moyens de faire appliquer la résolution 1701 par la force en disposant d’armes plus offensives et d’un mandat plus ferme. Pour atteindre cet objectif, les Israéliens miseraient sur l’appui de l’administration américaine, totalement acquise à leur point de vue et qui a un poids important au sein du Conseil de sécurité. Une source du Hezbollah commente cette volonté israélienne en disant : « Les Israéliens veulent que la Finul fasse à leur place la guerre qu’ils ne peuvent plus mener contre nous. » En tout cas, des sources diplomatiques européennes estiment que l’heure n’est pas venue de modifier le mandat de la Finul, en dépit des rumeurs qui circulent à ce sujet. Celle-ci est en effet composée d’une grande majorité de bataillons européens, et les gouvernements de ces bataillons n’ont pas l’intention d’entrer dans une confrontation avec le Hezbollah. Selon ces mêmes sources, le mandat de la Finul est clair. Il s’agit d’épauler l’armée libanaise dans le maintien du calme à la frontière, non de la remplacer. Et, jusqu’à présent, la situation est jugée relativement satisfaisante depuis 2006. De plus, le nouveau commandant en chef des Casques bleus, le général italien Stefano Del Col, qui vient de remplacer le général irlandais Michael Beary, connaît bien la situation dans la région et l’importance des enjeux. En cette période où les antagonismes régionaux sont exacerbés, il ne serait pas utile de créer un nouveau foyer de tension. Même au plus fort de la guerre en Syrie et lorsque de nombreuses chancelleries prévoyaient la chute du régime syrien, il n’a pas été possible d’obtenir l’extension du mandat de la Finul à la surveillance de la frontière libano-syrienne. Ce n’est donc pas maintenant qu’il sera possible de le faire, avec le changement des rapports de force en Syrie et la diplomatie active russe au sein du Conseil de sécurité de l’ONU. Dans le dossier du Hezbollah, l’Europe fait d’ailleurs preuve de pragmatisme, en opérant une distinction entre la branche armée et l’aile politique de la formation chiite. Selon les sources précitées, en dépit des tentatives israéliennes et américaines, l’heure est donc plutôt au maintien du statu quo. Avec toutefois une insistance particulière sur la nécessité de donner un plus grand rôle à l’armée libanaise dans le maintien de la stabilité au Sud et dans l’ensemble du pays.


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commentaires (2)

"Une stratégie nationale de défense" c'est l'histoire de la "Cruche d'huile" de nos grands-mères, on en parle depuis 1995. Quant à la distinction entre la branche armée et l'aile politique du Hezbollah iranien, c'est le blanc bonnet et bonnet blanc. Revenons 73 ans en arrière, le faux général Edward Spears de l'Intelligence Service britannique, notoirement anti-France au Levant, a tout fait pour empêcher la conclusion d'un Traité de Défense perpétuelle entre le Liban indépendant et la France en 1945. Aujourd'hui c'est Hassan Nasrallah qui tient ce rôle.

Annie

11 h 22, le 25 août 2018

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Commentaires (2)

  • "Une stratégie nationale de défense" c'est l'histoire de la "Cruche d'huile" de nos grands-mères, on en parle depuis 1995. Quant à la distinction entre la branche armée et l'aile politique du Hezbollah iranien, c'est le blanc bonnet et bonnet blanc. Revenons 73 ans en arrière, le faux général Edward Spears de l'Intelligence Service britannique, notoirement anti-France au Levant, a tout fait pour empêcher la conclusion d'un Traité de Défense perpétuelle entre le Liban indépendant et la France en 1945. Aujourd'hui c'est Hassan Nasrallah qui tient ce rôle.

    Annie

    11 h 22, le 25 août 2018

  • L,EUROPE FAIT PREUVE DE PRAGMATISME EN OPERANT UNE DISTINCTION ENTRE LA BRANCHE ARMEE ET L,AILE POLITIQUE DE LA FORMATION CHIITE... DITES-VOUS, TRES CHERE MADAME SCARLETT HADDAD. EN VERITE L,EUROPE FAIT PREUVE D,IDIOTIE AVEUGLE DANS CE DOMAINE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 36, le 25 août 2018

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