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À La Une - Reportage

En patrouille sur la "route de la mort" dans le nord du Mali

"Explosions d'engins improvisés" (IED), "braquages", "attaques armées", "attaques complexes": depuis 2016, plusieurs dizaines d'incidents ont été recensés entre l'ouest de Doro et Gao, d'après une carte des parachutistes allemands

Une colonne de blindés allemands de la Mission de l'ONU (Minusma), le 2 août 2018 sur la route qui relie Gao à Gossi, au Mali. Photo AFP / SEYLLOU

La colonne de blindés allemands passe au côté de carcasses calcinées: camions citernes, pick-up et véhicules militaires maliens gisent au bord de la route, éventrés. Sur l'artère vitale reliant le nord au centre du Mali, le péril des bombes artisanales et braquages est omniprésent.

"On arrive dans un point chaud", avait prévenu la radio, dès l'approche du village de Doro. En provenance de Gao, principale ville du nord du Mali, les Casques bleus allemands de la Mission de l'ONU (Minusma) vérifient leurs armements puis s'élancent, aux aguets.

Au pas, les huit véhicules pénètrent dans Doro, dont la voie principale fait office de marché, et les rues ensablées attenantes de parking à dromadaires. Paysans, éleveurs, commerçants et enfants grouillent au milieu des autocars et des camions, entre lesquels se faufilent les véhicules surarmés des soldats de la paix, sur le qui-vive. 

Située au sud-ouest de Gao, au milieu de la savane, cette petite localité faite de cases en torchis est bien pourvue d'un détachement de l'armée malienne. Mais cette présence n'a pas empêché de multiples violences sur la route qui mène jusqu'à Mopti, dans le centre du Mali.

"Explosions d'engins improvisés" (IED), "braquages", "attaques armées", "attaques complexes": depuis 2016, plusieurs dizaines d'incidents ont été recensés entre l'ouest de Doro et Gao, d'après une carte des parachutistes allemands.

"Cette portion, c'est la route de la mort", observe un responsable de l'ONU, sous couvert d'anonymat. "Il y a eu beaucoup de hold-up contre les bus ces derniers temps, les bandits dépouillent tous les passagers et leur ordonnent même de leur virer de l'argent avec leurs téléphones portables!", explique-t-il.

En réaction, les transporteurs ont décidé de progresser en convoi sur cette zone de quelque 150 km, comme l'ont constaté des journalistes de l'AFP.

Mais cela ne règle pas le problème, et c'est pour cette raison que les Casques bleus ont décidé de patrouiller, à la recherche d'indices indiquant la présence d'engins explosif improvisés, les IED en jargon militaire. "Nous voulons collecter des données pour notre atlas routier, car nous devons savoir quels sont les endroits vulnérables de la route" pour anticiper les attaques, résume le lieutenant-colonel allemand Mickael Weckbach, la moustache bien arrangée.


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Soldat ou milicien ?

"On approche d'un endroit où il y a déjà eu quatre attaques", avertit la radio allemande, un brin anxiogène, à la sortie de Doro.

"Une moto avec un AK arrive", lance dans la foulée un Casque bleu depuis le toit d'un blindé, en faisant référence au célèbre fusil d'assaut AK47. Fausse alerte: les deux hommes sur la moto, dont un en treillis, croisent la colonne de l'ONU en levant le pouce.

"C'était un soldat malien ou un milicien?", s'interroge un sergent, posté derrière une mitrailleuse de 12,7 mm. Il ne connaîtra sans doute jamais la réponse.

Puis, les blindés arrivent là où les quatre embuscades ont été tendues dans le passé. La zone est sécurisée par les soldats qui ordonnent à tout véhicule de rebrousser chemin, le temps que les démineurs inspectent un petit pont au côté duquel gît un cratère formé par une bombe artisanale.

Après une demi-heure d'inspection, rien de suspect n'a été constaté, la colonne reprend sa route.

Avec la propagation des violences armées du nord vers le centre du pays, le Mali est frappé chaque semaine par une à trois explosions à l'engin improvisé, selon la Minusma.

Le 31 juillet, quatre militaires maliens en mission d'escorte de matériel électoral dans le centre du pays ont péri dans une embuscade à l'engin explosif, suivie de tirs des assaillants.

Finalement, après 14 heures de route, les Casques bleus allemands n'ont rien trouvé d'anormal, mais ils rapportent quantité de données qui seront analysées. La menace est plutôt venue de la chaleur de la savane qui a eu raison du moteur de l'un des véhicules blindés, qui doit être tracté pour finir le trajet.

Qu'importe, philosophe le lieutenant-colonel Weckbach: "Pour être honnête, on ne s'attendait pas vraiment à trouver d'IED, mais c'est aussi important de juste montrer notre force".


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