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L’insulte de la Commission de supervision des élections au journalisme libre

La fièvre électorale est, enfin, tombée. Du moins dans une large mesure. Car l’heure du bilan politique de l’ensemble de la consultation populaire a maintenant sonné et donne déjà libre cours à moult polémiques et échanges médiatiques acerbes.

Les Libanais, sous les coups successifs des crises existentielles et des guerres dévastatrices, ont appris au fil des ans à se montrer réalistes – pour ne pas dire blasés – et à ne pas se bercer de trop d’illusions. Mais il existe, malgré tout, des limites au pragmatisme et au réalisme de bon aloi lorsque certaines valeurs fondamentales et des principes élémentaires de base, que d’aucuns peuvent considérer comme non primordiaux, sont bafoués ou remis en cause. Tel est, entre autres, le cas du différend qui oppose depuis quelques jours L’Orient-Le Jour à la Commission de supervision des élections. Un différend qui ne nous implique pas uniquement mais qui concerne aussi, et surtout, directement les lecteurs. D’où sa gravité… Qu’on en juge par les faits…

Dès le coup d’envoi de la bataille électorale, en mars dernier, la rédaction de L’Orient-Le Jour avait pris comme option de lancer une série de portraits et d’interviews express dans un but purement informationnel afin de permettre aux électeurs d’être informés (dans toute l’acception du terme) le plus objectivement possible du profil des nouveaux candidats et des grandes orientations politiques des candidats déjà connus de l’opinion publique.

L’équipe du journal s’est fait un point d’honneur dans le cadre de sa mission de ratisser très large de manière à donner la parole au plus grand nombre possible de candidats, toutes tendances confondues. Détail à relever, qui n’est pas sans importance : notre principe intangible était – et reste toujours – d’effectuer ce travail d’information sans qu’aucune quelconque contrepartie financière ne soit réclamée aux candidats, dans le but de préserver notre indépendance éditoriale et de ne pas nous laisser entraîner sur la voie de l’argent politique.

Par éthique professionnelle, nous avons pris soin d’informer (à plus d’une reprise) le président de la Commission de supervision des élections Nadim Abdel Malak de notre démarche fondée exclusivement sur notre souci d’information gratuite. Quelle ne fut toutefois notre surprise, dans le sillage du scrutin du 6 mai, de recevoir une série d’« avertissements » de ladite commission, nous reprochant de faire de la propagande électorale ! En dépit de plusieurs notes adressées à M. Abdel Malak réaffirmant, plus d’une fois, que notre démarche était purement informationnelle et sans contrepartie, nombre de candidats – et pas les chefs de file, évidemment – devaient recevoir à leur tour des lettres de l’instance en question, les accusant pratiquement de s’être livrés à une publicité électorale camouflée (sic!) et leur demandant de fournir une estimation du « coût » de nos articles!

Les protestations des candidats et nos affirmations répétées n’y ont rien fait… Le président de la commission persiste et signe, et va même jusqu’à souligner à l’intention des candidats qu’il ne reconnaît pas le principe de l’information non payée !

Cette obstination à considérer que notre couverture de la campagne électorale était payée par les candidats constitue une mise en cause inacceptable de la parole de la rédaction de L’OLJ. Une telle attitude de la part de la commission est, en outre, non moins qu’un sabotage de la fonction du journalisme et de la noble mission des rédacteurs de presse. C’est à ce niveau précis que réside toute la gravité de l’affaire… Car la position de Nadim Abdel Malak revient concrètement à tenir, en substance, le langage suivant (et c’est là que le lecteur est concerné au plus haut point) : Nous ne concevons pas que vous, journalistes, puissiez informer le lectorat sans contrepartie financière, nous ne concevons pas que vous ne vendiez pas vos articles, et votre souci d’exercer votre métier en restant attachés à votre éthique professionnelle n’est que pure chimère ; et nous ne concevons pas que vous, candidats et politiciens, puissiez faire parvenir votre message politique sans monnayer l’espace rédactionnel qui vous est consacré.

En tenant un tel langage, c’est la parole à la fois du journaliste et du candidat qui est mise en cause…

Le problème ne se pose pas en termes de simple différend sur l’application d’une loi incongrue ou sur les prérogatives d’une instance qui était appelée à jouer un rôle de garde-fou pour la bonne marche du processus électoral. C’est rien moins que notre profession qui est en jeu, c’est de notre indépendance en tant que journalistes dont il s’agit. Et pour le lecteur, c’est son droit le plus élémentaire à l’information – une information libre de tout argent politique – qui est aussi en jeu.

Le Liban a une vieille tradition de pratiques démocratiques, solidement ancrée dans sa réalité sociale. Une tradition ancestrale que quelques égarements ne sauraient en aucun cas ébranler.

La fièvre électorale est, enfin, tombée. Du moins dans une large mesure. Car l’heure du bilan politique de l’ensemble de la consultation populaire a maintenant sonné et donne déjà libre cours à moult polémiques et échanges médiatiques acerbes. Les Libanais, sous les coups successifs des crises existentielles et des guerres dévastatrices, ont appris au fil des ans à se montrer...

commentaires (10)

Chaque communauté au Liban a des apports intéressants et bénéfiques universellement C,est bien dommage que ces apports positifs soient accompagnés d’un état d’esprit négatif parce qu’il annule ce qui est foncièrement bénéfique

Assaf Amale michele

08 h 46, le 30 mai 2018

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Commentaires (10)

  • Chaque communauté au Liban a des apports intéressants et bénéfiques universellement C,est bien dommage que ces apports positifs soient accompagnés d’un état d’esprit négatif parce qu’il annule ce qui est foncièrement bénéfique

    Assaf Amale michele

    08 h 46, le 30 mai 2018

  • C’est du muselage progressif à différents niveaux Une insulte à notre intelligence Bientôt nous allons voir notre constitution muselée

    Assaf Amale michele

    08 h 22, le 30 mai 2018

  • pardon pour mon Français loool

    Bery tus

    16 h 16, le 29 mai 2018

  • Jolie Mr Touma .. seulement c'est nous qui sommes vise !! ils ne veulent plus de LIBRE PENSEURS, IL NE VEULENT PLUS D'HOMME LIBRE ET INTEGRE ... ILS N'ARRIVENT PAS A IMAGINER DES PERSONNES LIBRES DE TOUT SOUMISSION IL SAVENT TRES BIEN CE QUE LES MEDIAS ET UNE PROPAGANDE BIEN HUILE PEUT FAIRE

    Bery tus

    15 h 52, le 29 mai 2018

  • L,HEBETUDE DE CERTAINS, MONSIEUR TOUMA, EST UN VICE INNÉ ! ON LE PORTE EN SOI ET ON NE PEUT PAS S,EN DEBARRASSER !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 46, le 29 mai 2018

  • Vous écrivez : ...""Le Liban a une vieille tradition de pratiques démocratiques, solidement ancrée dans sa réalité sociale."" .... La conclusion de trop ? NON et sûrement non. La couverture des élections laissait parfois à désirer. Restons dans les clous ce matin pour ne pas froisser le modérateur ! Les élections au Liban sont hautement démocratiques ! Qui ose dire le contraire, et surtout la liberté d’expression………

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    09 h 43, le 29 mai 2018

  • Tenir un tel langage est une honte et un affront...arretons cette mascarade ...merci pour cette article qui met les points sur les "i"...de crier la VERITE ET L'HONNETETE...

    Soeur Yvette

    09 h 35, le 29 mai 2018

  • Quand on ment, on pense que tout le monde ment Quand on vole, on pense que tout le monde vole Quand on a le cerveau embué, on ne peut comprendre la simple vérité Quand on adore le dieu dollar, on pense que tous les autres le font aussi Faut croire que c'est le cas de M. Nadim Abdel Malak...on a pitié de lui, il vit dans un bien épais brouillard...le pauvre ! Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 36, le 29 mai 2018

  • Un pas de pour miner la liberté d’expression, les fondements du journalisme professionnel, ... Triste états des lieux !

    Danielle Sara

    06 h 37, le 29 mai 2018

  • Mais oui, Mr Touma, vous êtes carrément le dindon de la farce! Une commission de surveillance des élections qui va du principe que tout est corrompu et se monnaye au Liban et n’arrive pas à concevoir qu’il y a encore dans ce pays des honnêtes gens, ou des journalistes intègres! Peut-être qu’il ne faut pas lui en vouloir dans cette atmosphère morbide de méfiance et suspicion généralisée! Mais là où le bat blesse, c’est lui demander de ne pas se prendre trop au sérieux car, même s’il dénonce toutes les dérives, que peut-il faire de plus? Poursuivre la moitié de la République en justice? Arrêtons cette mascarade loufoque!

    Saliba Nouhad

    04 h 52, le 29 mai 2018

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