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Attention, fragile

La bourse ou la vie? Au diable l’avarice, il est des choix bien plus difficiles que celui que proposaient jadis aux voyageurs les bandits de grand chemin en agitant leurs gros gourdins : carrément impossibles deviennent alors, en effet, ces choix-là. Tel est bien le cas de la mise en demeure incroyablement musclée qu’adressaient lundi à l’Iran les États-Unis, dans la foulée de leur retrait unilatéral de l’accord sur le nucléaire iranien.
Le sabordage, ou bien alors la mort lente, par inanition ou par effondrement du régime : ce sont là en effet les deux seules options que laisse à la république des mollahs le cahier des charges américain, d’une sévérité sans précédent, que s’est chargé d’exposer le nouveau secrétaire d’État et ancien directeur de la CIA, Mike Pompeo. Entre autres contraintes, l’Iran est ainsi sommé de soumettre à une étroite surveillance internationale l’intégralité de son programme nucléaire, missiles balistiques inclus. Il n’y a pas que le nucléaire cependant : c’est à tous les atouts qui ont fait de lui une redoutable puissance régionale que l’Iran est tenu de renoncer en retirant ses billes de Syrie, d’Irak, du Yémen et du Liban notamment. Tout refus d’obtempérer vaudrait au récalcitrant les sanctions économiques les plus fortes de l’histoire, a pris soin de souligner Pompeo. Qui, en bon vétéran de la CIA, n’a pas manqué d’évoquer, sans avoir l’air d’y toucher, l’éventualité d’un renversement de la théocratie iranienne…


On voit mal certes Téhéran céder à l’ultimatum du département d’État, promptement suivi de l’annonce, sans autre précision, de mesures nouvelles envisagées par le Pentagone. Voilà qui augure, dès lors, d’un bras de fer dont les retombées sont loin de se limiter au Proche et au Moyen-Orient. D’ores et déjà, l’Union européenne fait figure de première victime collatérale, écartelée qu’elle est entre les exigences des deux protagonistes : l’Amérique résolue à interdire son marché aux entreprises qui persisteraient à opérer en terrain hostile; et l’Iran reprochant au contraire au Vieux Continent de ne pas en faire assez, en termes d’investissements, pour sauver du naufrage l’accord sur le nucléaire.


Plus variés cependant sont les funestes plaisirs que réserve aux États de notre région cette épreuve de force annoncée, les pressions politiques et sécuritaires menaçant en effet de s’ajouter aux retombées des sanctions économiques et financières. Doublement délicat pourrait donc s’avérer le cas du Liban où le Hezbollah, cible désignée de Washington, argue de son score aux élections législatives pour exiger une représentation conséquente au sein de l’exécutif. De la sorte serait accéléré et consolidé un lent processus d’assimilation, d’identification à l’État libanais, dans lequel la milice, aujourd’hui plus que jamais, voit un gage de légalité interne, de respectabilité internationale… et même d’immunité.


Reste à espérer que l’éléphant yankee en furie prendra garde à ne pas trop casser de porcelaine libanaise.


Issa GHORAIEB
igor@lorientlejour.com

La bourse ou la vie? Au diable l’avarice, il est des choix bien plus difficiles que celui que proposaient jadis aux voyageurs les bandits de grand chemin en agitant leurs gros gourdins : carrément impossibles deviennent alors, en effet, ces choix-là. Tel est bien le cas de la mise en demeure incroyablement musclée qu’adressaient lundi à l’Iran les États-Unis, dans la foulée de...