Je ne sais pourquoi, quand je lisais la Recherche, la duchesse de Guermantes prenait pour moi les traits de May Arida. Je m’imaginais, frêle admirateur anonyme, la scrutant de loin dans une église ou dans un temple, l’accompagnant dans le monde et m’insurgeais in petto lorsque son mari lui intimait de mettre tels souliers au lieu de tels autres qu’elle avait choisis. L’illusion perdurait, mon admiration aussi. Je collectionnais ses photos dans les vieux journaux et magazines, je la cherchais dans les pages des anciens programmes du Festival. Il y a quelques années, un de mes amis trouva par hasard toute une collection de photographies qui la montraient rayonnante comme jamais et m’en fit cadeau. Il n’en fallait pas plus pour enflammer mon imagination et, disons-le, mon amour. Faisait-elle partie de ces femmes « illuminées de l’intérieur » comme disait Truffaut ?
Quand je l’écoutais raconter, dès que l’occasion se présentait, ses souvenirs jalonnés de noms illustres, une vive mélancolie m’étreignait ; elle ne paraissait jamais lasse de les répéter mais semblait toujours pétrifiée en égrenant ces noms chargés de lumières, de couleurs, de parfums à jamais perdus et qui la laissaient orpheline.
Aujourd’hui, son nom s’ajoute à tous ces noms qu’elle chérissait et je me sens, moi aussi, un peu orphelin.
Agenda - Hommage à May Arida
Tant de fêtes
OLJ / Par Ahmad CHAMSEDDINE, le 17 mai 2018 à 00h00
Je ne sais pourquoi, quand je lisais la Recherche, la duchesse de Guermantes prenait pour moi les traits de May Arida. Je m’imaginais, frêle admirateur anonyme, la scrutant de loin dans une église ou dans un temple, l’accompagnant dans le monde et m’insurgeais in petto lorsque son mari lui intimait de mettre tels souliers au lieu de tels autres qu’elle avait choisis....
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