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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Face à la présence iranienne en Syrie, Israël accentue la menace sur Assad

En augmentant la pression sur Damas et Moscou, l’État hébreu espère dissuader Téhéran d’intervenir sur son territoire.

Un soldat israélien participant hier à un exercice militaire à côté d’un tank Merkava Mark IV dans la partie du Golan annexée par Israël. Jalaa Marey/AFP

L’obsession israélienne d’endiguer l’influence iranienne dans la région, notamment en Syrie, ne faiblit pas. Alors que l’État hébreu multiplie les menaces et les opérations éclairs contre les positions de Téhéran en territoire syrien, un responsable israélien s’en est directement pris hier au régime du président syrien Bachar el-Assad, alors que l’Iran est l’un des parrains de Damas, aux côtés de Moscou. « Israël n’a pas été impliqué dans la guerre civile (syrienne) jusqu’à présent », a déclaré Yuval Steinitz, le ministre israélien de l’Énergie et membre du cabinet de sécurité, au site d’information israélien Ynet.

Faisant référence à la présence de troupes iraniennes en Syrie, M. Steinitz a précisé qu’« il est inacceptable qu’Assad siège tranquillement dans son palais et reconstruise son régime tout en permettant à la Syrie d’être transformée en base pour nous attaquer, il doit comprendre qu’il signera sa fin et la fin de son régime ». Et « si le président syrien continue d’autoriser l’Iran à opérer en territoire syrien, Israël le liquidera et renversera son régime », a-t-il menacé. Interrogé sur la possibilité pour Israël d’assassiner le président syrien, M. Steinitz a répondu que ce dernier « pourrait le payer de son sang ». Toutefois, si ses propos sont explicites à ce sujet sur le site internet du quotidien, l’écoute de l’entretien ne « semble pas corroborer » les citations du ministre dans l’article en ligne, souligne l’agence Reuters. M. Steinitz a également précisé plus tard que ses commentaires reflétaient son opinion personnelle et non des plans tangibles de l’administration israélienne.

En adoptant une rhétorique visant directement Damas, « Israël veut à la fois influencer Bachar el-Assad et la Russie en menaçant de ne plus simplement intervenir dans la crise syrienne contre des cibles iraniennes, mais bien contre les capacités du régime elles-mêmes », explique à L’Orient-Le Jour Michael Horowitz, spécialiste du Moyen-Orient à LeBeck International, un think tank basé à Bahreïn. « C’est une stratégie d’escalade qui vise à faire comprendre à Moscou et Damas que le coût de la présence iranienne est élevé », poursuit-il.
Ce n’est pas la première fois que les Israéliens optent pour un discours plus agressif à l’égard du dirigeant syrien et de son régime. Déjà le 10 avril dernier, un responsable israélien avait confié au quotidien israélien Maariv que « si les Iraniens agissent contre Israël depuis le territoire syrien, c’est Assad et son gouvernement qui en paieront le prix ». « Le gouvernement, avec Assad lui-même, disparaîtra tout simplement ; nous recommandons que l’Iran n’agisse pas contre nous », avait-il poursuivi. Ces propos intervenaient au lendemain de nouvelles frappes israéliennes contre la base militaire T4 située à l’est de la province de Homs, qui avait fait 7 morts du côté iranien. Selon le Wall Street Journal, l’opération visait un système de lancement de drones iraniens et un système de défense antiaérien iranien Tor.


(Lire aussi : Israël passe à la vitesse supérieure contre l’Iran)


L’armée israélienne a aussi effectué des frappes en Syrie le 29 avril contre la base militaire de la 47e brigade de l’armée syrienne dans la province de Hama où les Iraniens étaient soupçonnés par l’État hébreu d’avoir entreposé des missiles sol-sol. Suite à cette opération, le président syrien s’était empressé de dénoncer « l’escalade des agressions contre la Syrie ».
 « Israël a les moyens et va probablement mettre ses (nouvelles) menaces en application », estime M. Horowtiz. Toutefois, « nous n’assisterons sans doute pas à des frappes continues sur les forces du régime alors que le but n’est pas vraiment de renverser Assad mais de le “responsabiliser” », décrypte-t-il. Selon lui, « le but sera d’infliger des pertes significatives aux forces du régime, possiblement à son aviation, sans pour autant entrer de manière plus continue dans le conflit syrien, pour changer le calcul d’Assad et de ses alliés russes quant à la présence iranienne ».

Dissuader Téhéran
Le timing des propos de M. Steinitz hier n’est pas anodin, alors que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu doit rencontrer le président russe, Vladimir Poutine, demain à Moscou. Le bureau du chef du gouvernement israélien a précisé que les deux dirigeants devraient aborder « les développements régionaux » tandis que le président américain, Donald Trump, a jusqu’à samedi pour rendre sa décision de se retirer ou non de l’accord sur le nucléaire iranien. Dans ce contexte, « la crise syrienne sera sûrement au centre de l’agenda » pendant cette visite, note M. Horowitz.
Israël est sur le qui-vive et cherche à empêcher à tout prix une riposte iranienne sur son territoire depuis la Syrie, alors que des troupes iraniennes sont postées non loin de ses frontières. En vertu de l’accord de désescalade passé en novembre dernier entre les États-Unis, la Russie et la Jordanie, une zone tampon de 20 kilomètres de la frontière israélienne a été établie dans le Sud-Ouest syrien à la frontière entre Israël et le Golan syrien.

Téhéran a également menacé à plusieurs reprises de s’en prendre directement aux territoires de l’État hébreu. Suite à l’opération israélienne le 29 avril, un haut responsable iranien a déclaré lors d’un déplacement à Damas que l’Iran allait « répliquer en temps et en lieu » suite à « l’agression d’Israël ». L’administration israélienne compte ainsi sur le Kremlin et Damas pour tenter d’imposer des limites à Téhéran en Syrie, une stratégie qui a donné peu de résultats pour le moment.
En dépit de l’escalade fulgurante des tensions entre les acteurs de la région, « ni Israël ni l’Iran ne veulent vraiment d’un conflit ouvert, mais là n’est pas le problème car les risques d’une guerre “non voulue” sont aussi importants », affirme M. Horowitz. « Bien qu’Israël ne veuille pas d’un conflit qui serait coûteux, il semble bien que l’État hébreu adopte une ligne bien plus offensive et soit prêt à prendre plus de risques », observe-t-il.

Le Premier ministre israélien a dénoncé hier les approvisionnements en matériel militaire à la Syrie par le corps des gardiens de la révolution, organisation paramilitaire de Téhéran. « Nous sommes déterminés à arrêter l’agression iranienne à ses débuts, même si cela implique un conflit », a déclaré M. Netanyahu. « Mieux vaut maintenant que plus tard. Les nations qui n’étaient pas préparées à prendre des mesures opportunes contre l’agression meurtrière ont payé des prix beaucoup plus élevés par la suite », a-t-il dit avant d’ajouter que les Israéliens « ne veulent pas d’escalade, mais nous sommes prêts à tout scénario ».
Selon M. Horowitz, « Israël mise sur le fait qu’au final, face à la menace d’un conflit ouvert et sous la pression des Russes et potentiellement d’Assad, les Iraniens se contenteront d’une réponse symbolique... ou ne répondront pas ».


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