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Moyen Orient et Monde - Yémen

Qu’impliquent des pourparlers entre les houthis et Riyad ?

Le gouvernement Hadi ne semble pas, pour l’instant, menacé d’une mise à l’écart de futures avancées diplomatiques.

Des rebelles houthis défilant à Sanaa le 19 décembre 2017. Khaled Abdullah/Reuters

La rumeur circulait depuis le début de l’année, elle a été confirmée il y a quelques jours : des pourparlers pour régler le conflit yéménite seraient bel et bien en cours. Depuis deux mois, une délégation censée représenter les rebelles houthis rencontre secrètement à Mascate, capitale du sultanat d’Oman, des représentants saoudiens. À la tête de cette délégation, le porte-parole houthi Mohammad Abdoul Salam, selon des sources politiques et diplomatiques yéménites bien informées. Ces discussions bilatérales sont censées paver la voie à une trêve progressive, avant des négociations de paix officielles.

« Il y a des consultations entre houthis et Saoudiens, sans la présence d’un représentant du gouvernement (yéménite) reconnu par la communauté internationale, et il y a clairement une volonté de la part des houthis et de la coalition de parvenir à un accord », a dit un diplomate à Reuters. Au menu, les intérêts politiques de tous les belligérants, expliquent ces sources. Et pour l’instant, l’objectif de telles rencontres serait de créer un contexte idéal pour des discussions plus approfondies d’ici à l’arrivée du nouvel émissaire des Nations unies pour le Yémen, le diplomate britannique Martin Griffiths. Mais aucun détail n’a filtré sur une avancée quelconque de ces discussions.

Aucun des deux camps n’a réagi aux révélations sur de telles rencontres, mais le gouvernement internationalement reconnu du président Abd Rabbo Mansour Hadi a nié avec véhémence les pourparlers dans un communiqué publié par l’agence de presse officielle SABA, qualifiant le rapport de « mensonges » et de « nouvelles trompeuses ». Il a même exigé des excuses de l’agence Reuters pour avoir diffusé les informations. Du côté houthi, Saleh el-Samad, chef du Conseil politique suprême, la plus haute autorité dirigée par les rebelles à Sanaa, a déclaré que « ceux qui disent que Mohammad Abdoul Salam est en Arabie saoudite cherchent à nous faire du chantage ». « Nous savons que l’Arabie saoudite n’est pas prête pour la paix, et cette décision n’est pas entre ses mains, sinon nous aurions pu nous asseoir à la table et négocier, mais la décision n’est pas entre leurs mains », a-t-il ajouté.


(Lire aussi : Saoudiens et houthis négocient la paix en secret)


Crise humanitaire
Le gouvernement Hadi, exilé à Riyad depuis la prise de Sanaa par les houthis fin 2014, critique de plus en plus ouvertement l’Arabie saoudite, s’estimant mis à l’écart de toute décision politique concernant le Yémen, à l’instar des discussions qui sont supposément en cours à Mascate. Trois rounds de pourparlers, soutenus par les États-Unis, ont déjà eu lieu entre les rebelles soutenus par l’Iran et le gouvernement yéménite soutenu par Riyad : deux fois en Suisse, et la troisième fois au Koweït, en août 2016. Tous trois s’étaient soldés par un échec. Depuis, les violences continuent de faire rage au Yémen, où près de 10 000 personnes ont été tuées. La crise humanitaire est sans précédent. Certaines régions sont au bord de la famine, et plus de 22 millions de personnes ont besoin d’une aide « urgente », selon l’ONU.

Des conditions propices, semble-t-il, pour donner un nouveau souffle à des pourparlers destinés à mettre fin à trois ans de guerre, estime Michael Knights, chercheur au Washington Institute et spécialiste du Golfe, « ne serait-ce que pour discuter de la frontière qui sépare les deux pays, au sud Yémen ». « Sécuriser cette frontière est l’une des priorités de l’Arabie saoudite. Le nouvel envoyé de l’ONU, Martin Griffiths, a parlé de telles discussions et a encouragé la présence des groupes sudistes à un dialogue national », affirme le chercheur à L’Orient-Le Jour. L’absence, pour l’instant, d’un représentant du gouvernement Hadi à ces discussions pourrait s’expliquer par un désir de prudence, les deux camps préférant prendre le pouls, en quelque sorte, de la situation avant un engagement plus approfondi, vu les échecs passés. Et le fait que les rencontres se déroulent à Mascate les rend crédibles, les houthis ayant une délégation permanente dans la capitale omanaise.

Pour l’instant, confirme donc Michael Knights, le gouvernement Hadi n’a pas de quoi s’inquiéter. « Si ces informations sont vraies, on ne devrait pas s’enthousiasmer trop vite. Ce qui importe, c’est que les houthis, les sudistes, le gouvernement Hadi, les Saoudiens, les Émiratis, l’ONU se retrouvent au même endroit pour commencer, à Oman notamment », avance le chercheur, selon lequel les rebelles pourraient être tentés de trouver un consensus avec Riyad avant qu’il ne soit trop tard, et de transformer leurs gains militaires en gains politiques. « Deux choses maintiennent les houthis dans cette guerre : leurs liens avec l’Iran et le Hezbollah libanais et les avantages matériels. La situation économique mondiale pourrait les pousser à changer leur perspective », et à faire preuve de prudence.



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