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Lifestyle - Un peu plus

Faits divers à la libanaise

En trois semaines à peine, il aura suffi du prix du kilo de janérig, d’une bonne femme qui s’acharne sur les présentoirs d’une grande boutique de luxe, d’un règlement de comptes entre une épouse bafouée et une maîtresse délurée, et enfin du téton dévoilé lors d’un show de cabaret de seconde zone, pour que les réseaux sociaux et les messageries instantanées s’enflamment.
À la fois choqués et amusés, les Libanais s’en sont donné à cœur joie. De messages audio en mises en scène photoshopées, de blagues en statuts Facebook, de vidéos en analyses, on aura tout vu, tout entendu, tout lu. Et les Libanais sont drôles. Cette faculté de rebondir en deux temps trois mouvements sur un fait divers est hallucinante. Les janérig se sont transformés en bague de fiançailles ou en objet de crédit bancaire. Les déboires d’un couple adultère ont fait les choux gras de toutes les conversations. Les photos des protagonistes ont circulé, la vidéo de la sœur de la maîtresse a eu des milliers de vues. Et évidemment, comme fréquemment dans notre petit pays, il y a toujours quelqu’un qui connaît un des personnages de ces vaudevilles tristes et sordides ; tout le monde a donc donné des détails croustillants sur cette minibagarre filmée par le voisin du dessus.
Et puis il y a eu le cas Discotek. Avec les pour et les contre. Les bien fait et les walaw. Deux filles dans un show érotique (si on peut appeler ça comme ça), des client(e)s choqué(e)s, de la cire rouge et des excuses plus tard, le petit milieu de la nightlife s’est offusqué de l’injustice. Brûlots par-ci, condamnations par-là, avec le même refrain : le gouvernement n’a que ça à faire ? « Au lieu de fermer une boîte de nuit, allez ouvrir des décharges pour enfin détruire les déchets assassins. » « Si vous voulez faire votre boulot, faites-le partout. » Effectivement, arrêter les zouzou 2ebba en sens interdit est une priorité ; arranger l’état des routes, réglementer les prix et autres problèmes sous lesquels croulent les Libanais est une priorité ; et oser laisser à voir un téton n’est pas un crime de lèse-majesté. Mais on ne peut pas reprocher non plus au gouvernement de faire son boulot. Même mal. Même injustement. Et puis, les élections approchant, tous les employés zélés de l’État, quelle que soit leur position, doivent montrer patte blanche.
Sauf que ces reproches se sont trompés de destinataires. Et nous ? On n’a que ça à foutre ? Se mobiliser pour débattre d’hypocrite chasteté ou d’attentat à la pudeur ? Perdre son temps à déblatérer sur un couple en crise comme la plupart des couples ? Rire parce qu’une cliente vexée sans qu’on sache pourquoi et par qui perd une chaussure dans sa crise de colère ? On n’a que ça à foutre ? Effectivement, pendant une pause déjeuner, on a le temps de perdre son temps. Mais lorsqu’il s’agit de s’indigner véritablement et de se rassembler pour nos droits fondamentaux, il n’y a plus personne. Inscrits aux abonnés absents. On ne va pas rater cette pause déjeuner pour aller manifester, ça ne changera rien. Eh bien, si. Si on apprenait tous à conjuguer nos énergies pour demander des comptes, des vrais, au gouvernement, on pourrait faire bouger les choses. Si au lieu de flipper à l’idée de payer nos impôts (pour rien) dans quelques jours, on entamait une grève. Si au lieu de soupirer quand on voit que la tradition dynastique en matière de politique a de bien beaux jours devant elle, on allait voter pour ceux qui le méritent, on ferait bouger les choses. Mais ça ne sert à rien, entend-on, ce sont les mêmes qui vont revenir. On aura tout le temps de se répandre sur le Net ensuite pour se plaindre.
C’est vrai que nous sommes un peuple désenchanté, mais il n’y a que les peuples qui ont révolutionné l’ordre établi. Il n’y a que nous pour le faire. Comme un 14 mars, il y a 13 ans. On s’est enfui depuis. Parce que parfois, ne rien faire, c’est un mécanisme de défense naturel. Certes, mais ne rien faire, c’est mourir encore un peu plus. Heureusement que dans cette fuite en arrière, notre humour nous sauve… un peu.

En trois semaines à peine, il aura suffi du prix du kilo de janérig, d’une bonne femme qui s’acharne sur les présentoirs d’une grande boutique de luxe, d’un règlement de comptes entre une épouse bafouée et une maîtresse délurée, et enfin du téton dévoilé lors d’un show de cabaret de seconde zone, pour que les réseaux sociaux et les messageries instantanées...

commentaires (2)

hmm! pas tre juste ca . les poltiques de ts genres font bien exciter les reseaux sociaux eux aussi. c dire " que les libanais-surtout chretiens selon certaines analyses decryptees - se sont reveilles finalement de leur torpeur passee ET savent mieux choisir

Gaby SIOUFI

12 h 29, le 17 mars 2018

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Commentaires (2)

  • hmm! pas tre juste ca . les poltiques de ts genres font bien exciter les reseaux sociaux eux aussi. c dire " que les libanais-surtout chretiens selon certaines analyses decryptees - se sont reveilles finalement de leur torpeur passee ET savent mieux choisir

    Gaby SIOUFI

    12 h 29, le 17 mars 2018

  • une illusion.. le sauvetage.... nous vivons dans le déni.

    Nada Maalouf

    01 h 04, le 17 mars 2018

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