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Culture - Exposition

Cinq raisons d’aller voir les 100 portraits de la Saleh Barakat Gallery...

L’actuel accrochage sis rue Clemenceau déroule cinq grands courants de la représentation de la figure humaine.

Une vue d’ensemble à la Saleh Barakat Gallery.

On croyait le portrait passé de mode. Juste confiné dans les vieux intérieurs bourgeois où, trônant fièrement dans leurs cadres à dorures, des figures (parfois aussi des silhouettes en pied) de glorieux ancêtres – peints par des artistes ayant eux aussi connu leur heure de gloire – s’exhibent fièrement sur les murs décrépits. On pensait également le faciès photographique, dans son bon vieux cadre en argent, totalement ringardisé et détrôné par les galeries de selfies et autres albums digitaux de famille. Eh bien non ! Il semblerait que le portrait artistique soit en train de secouer la poussière de sa réclusion aux oubliettes ces dernières décennies pour renaître de plus belle sous les pinceaux, les burins ou encore les caméras de la nouvelle génération d’artistes. Des indices annonciateurs de son retour sur la scène contemporaine ? Les dernières expositions organisées par Saleh Barakat. Outre celle présentant le Tout-Beyrouth artistique et culturel des années 60 et 70 à travers les clichés photographiques signés Waddah Farès, il a récemment organisé (à Agial, sa deuxième galerie de la rue Abdel-Aziz), coup sur coup, deux accrochages de nouveaux artistes ayant une prédilection pour le thème du portrait. En l’occurrence, la très talentueuse Hala Ezzeddine, gagnante de la première saison de Génération Orient, et le non moins intéressant Sacha Aboukhalil. Certains diront qu’une hirondelle ne fait pas le printemps et qu’il ne s’agit là que d’un pari engagé par cet important galeriste de la ville en faveur de la revalorisation de la figure humaine dans l’art (libanais) actuel. D’autant qu’il n’hésite pas à mettre à contribution sa propre collection pour soutenir son choix…

Quoi qu’il en soit, l’accrochage de 100 portraits tirés de sa collection personnelle est à découvrir. Car il retrace l’évolution de ce genre artistique depuis l’académisme des pionniers de la peinture libanaise, tels Habib Srour, César Gemayel, Youssef Hoyek ou Khalil Saliby, passés maîtres dans la représentation idéalisée du sujet bourgeois, jusqu’à la libération de l’expression, du tracé et surtout du sujet, induite par les modernes dans les années cinquante. Et poursuivie, avec encore plus de force et d’audace, par les contemporains.

Visite balisée…
Si l’exposition aurait gagnée à être accompagnée de notes informatives, sa scénographie en elle-même balise toutefois le parcours du spectateur sur cinq étapes.

La première est, bien évidement, consacrée aux « classiques figures de notables », portraits de commission dans lesquels excellait, notamment, Habib Srour. Ce qui ne l’a pas empêché de tourner son chevalet vers les moins nantis, les bédouins en particulier, dont il aimait reproduire la puissance des traits et des regards, s’inscrivant de la sorte comme l’un des précurseurs du portrait social.

Place ensuite aux cimaises consacrées aux modernes. Où, entre les silhouettes de personnages de Paul Guiragossian et de Farid Aouad, entre autres, l’on découvre, avec un certain étonnement, des portraits « arabisants » de la première période de Salwa Raouda Choucair… Une section qui s’étend, un mur plus loin, sur le mode de l’autoportrait d’artistes tels Helen el-Khal, Yvette Achkar, Oussama Baalbaki, Marwan Sahmarani, sans oublier l’audacieuse Huguette Caland qui, dès les années soixante, n’a pas hésité à exprimer pleinement, sans tabous, à travers l’art, son intérêt pour l’érotisme des corps…

Politique, social, universel…
Direction ensuite le portrait politique, auquel s’adonne largement une nouvelle garde d’anarchistes du pinceau. Et dont le représentant le plus connu reste Ayman Baalbaki (sa série d’Anonymous encagoulés domine d’ailleurs puissamment l’accrochage)… Il se prolonge ensuite sur le thème du portrait social. Un genre plus ardemment défendu par les artistes femmes comme Rima Amyuni ou Tagreed Darghouth et ses peintures d’employées de maison, ou la jeune Hala Ezzeddine (gagnante de la première saison de Génération Orient) et ses prodigieux regards d’enfants défavorisés…
Le parcours se clôture, enfin, sur un pan qui démontre, s’il le faut, que le portrait n’est désormais plus une représentation figée et idéalisée d’un individu. Mais qu’il est devenu, dès les années 60, avec des artistes comme le peintre syro-berlinois Marwan Kassab Bachi, notamment, avec ses « faces paysages » souvent anonymes, l’expression de l’universalité des êtres comme des sentiments. Ou encore, avec Sobhan Adam, l’expression d’états d’âme et de… vie monstrueusement humains.

Saleh Barakat Gallery
Face Value: Portraiture
(A Gallerist’s Personal Collection)
Jusqu’au 3 mars.


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On croyait le portrait passé de mode. Juste confiné dans les vieux intérieurs bourgeois où, trônant fièrement dans leurs cadres à dorures, des figures (parfois aussi des silhouettes en pied) de glorieux ancêtres – peints par des artistes ayant eux aussi connu leur heure de gloire – s’exhibent fièrement sur les murs décrépits. On pensait également le faciès photographique, dans...

commentaires (2)

Ce papier est magnifique. Il donne envie de foncer direct à la galerie Saleh Barakat.

Marionet

23 h 19, le 30 janvier 2018

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Commentaires (2)

  • Ce papier est magnifique. Il donne envie de foncer direct à la galerie Saleh Barakat.

    Marionet

    23 h 19, le 30 janvier 2018

  • L’art de peindre n’est pas seulement l’expression d’un sentiment, ou d'une perception, mais aussi le résultat d’une intelligence. Entrer dans l'univers d'un tableau, c'est entrer dans un monde en couleur, intemporel qui suggère la réflexion, l'émerveillement.

    Sarkis Serge Tateossian

    14 h 33, le 30 janvier 2018

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