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Liban - Polémique

Les « non-solutions » au problème des déchets mardi en Conseil des ministres

Le plan d'agrandissement des deux décharges déjà controversées de Costa Brava et de Bourj Hammoud sera présenté par le CDR.

La question de la gestion des déchets devrait être au cœur de la réunion du Conseil des ministres demain. Patrick Baz/AFP

Pour sa dernière réunion de l'année demain mardi, le Conseil des ministres discutera de questions environnementales par excellence, notamment le dossier de la gestion des déchets (reporté la semaine dernière) et de l'organisation des carrières. Les deux dossiers ont un potentiel explosif considérable : les deux décharges mises en place par le gouvernement seront saturées courant 2018, bien avant donc le délai des quatre ans qui leur avait été alloué (elles ont été créées en 2016) ; et les carrières fonctionnent en plein chaos et font l'objet de nombreuses plaintes portées autant par les exploitants que par les habitants des régions fortement touchées par le problème.

Ces deux gros dossiers font partie des 67 articles déjà à l'ordre du jour de la précédente réunion du Conseil la semaine dernière, mais qui n'avaient pas été abordés faute de temps. Ils seront de toute évidence discutés mardi au cours de cette réunion qui aura lieu au Grand Sérail.

Concernant les déchets, et s'il faut en croire l'agence al-Markaziya, le ministère de l'Environnement n'ayant pu proposer à temps d'alternatives aux deux sites de décharges côtières, le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) « est parvenu à une solution temporaire prévoyant l'agrandissement des deux décharges actuelles de Bourj Hammoud et de Costa Brava, afin de garantir la poursuite sans discontinuité en 2018 du ramassage des ordures ». Le ministre Tarek el-Khatib n'était pas joignable hier pour de plus amples informations.

Pour sa part, le ministre d'État à la Planification, Michel Pharaon, exprime des inquiétudes d'ordre environnemental concernant ce projet d'agrandissement. À L'Orient-Le Jour, il souligne que « ce qui sera débattu mardi (demain) en Conseil des ministres est l'agrandissement de ces deux décharges côtières pour qu'elles soient opérationnelles pour les quatre années à venir, au rythme actuel ». « Or, des points d'interrogation persistent sur les raisons pour lesquelles ces sites sont devenus sursaturés au bout d'une année, alors qu'ils étaient supposés durer quatre ans » dans leur formule actuelle, dit-il.

La proposition du CDR, que le Conseil des ministres débattra demain, comporte aussi la création d'une usine de tri et de compostage des déchets organiques à Costa Brava, ainsi que l'agrandissement des usines déjà existantes de Amroussié et de la Quarantaine. Les travaux seront effectués « par les opérateurs actuels », qui sont Jihad el-Arab pour Costa Brava et Dany Khoury pour Bourj Hammoud. « Or, en tant que député de Beyrouth, je dois dire que notre revendication est de déplacer cette usine de la Quarantaine, pas de l'agrandir », assure M. Pharaon, qui fera une déclaration sur le dossier des déchets aujourd'hui.
Les deux décharges font l'objet de critiques et de procès en fermeture depuis leur création. Mais les séances sont régulièrement reportées par les juges, au grand dam des plaignants. La décharge de Costa Brava provoque un afflux d'oiseaux attirés par les ordures, qui constituent une menace pour le trafic aérien de l'aéroport à proximité. À Bourj Hammoud, la construction d'un brise-lames supposé empêcher la pollution de la mer par les nouvelles cellules, ainsi que le traitement de l'ancien dépotoir, datant de la guerre civile et fermé en 1997, n'a toujours pas eu lieu en raison d'un différend avec les sociétés pétrolières qui possèdent des canaux installés en mer à cet endroit. Dans ce contexte, quelles conséquences aurait l'agrandissement de ces décharges controversées ?

(Lire aussi : Hariri a-t-il les moyens de sa politique ?)

Agrandir les décharges ou les tombes ?

Les critiques commencent d'ailleurs à fuser avant même l'approbation de ce plan présenté comme « la seule solution si l'on veut éviter les déchets dans les rues »... Face à cette « non-solution », les critiques ne viennent pas seulement de la société civile. Hier, c'est le député Ibrahim Kanaan, du bloc du Changement et de la Réforme (relevant du parti fondé par le président de la République) qui a vertement critiqué cette option. Celui-ci a estimé sans détour que « l'agrandissement des décharges est un agrandissement des tombes », en référence au danger qu'elles représentent pour l'environnement et la santé.

« Depuis le début de la crise des déchets (en 2015-2016), nous avons tenu des réunions à la commission des Finances et avons rédigé un rapport de 20 pages après concertations avec toutes les parties concernées, a déclaré M. Kanaan. Nous sommes arrivés à la conclusion que les entrepreneurs avaient des protecteurs dans les équipes gouvernementales successives. C'est la structure politique qui protège les mafias des déchets. » Il a rappelé que la position du Courant patriotique libre (CPL) a toujours été favorable aux usines de traitement des déchets et non aux décharges. « La solution au problème des déchets ne peut passer que par la construction d'usines, qui relève de la responsabilité du gouvernement en collaboration avec les municipalités, a-t-il poursuivi. Les Libanais doivent demander des comptes à ceux qui ont approuvé ce plan (de mars 2016), quand nous proposions les usines. » Et le député de conclure : « Je demande que ce dossier soit séparé de la politique, et ce d'autant plus que le financement des usines peut être assuré par l'Union européenne. Il est impératif de sortir de ce cercle vicieux, la santé publique ne peut être matière à surenchère. »

Autre dossier épineux à l'ordre du jour du Conseil des ministres : les carrières. Selon les informations d'al-Markaziya, le Conseil devra étudier le recensement effectué par le Haut Conseil des carrières (présidé par le ministre de l'Environnement) en collaboration avec le ministère de l'Intérieur. Ce recensement a été effectué sur fond de plaintes concernant une « politique des deux poids, deux mesures », qui favorise certains exploitants de sites au détriment d'autres, et suscite des problèmes entre les habitants et les exploitants dans plusieurs régions, en raison du chaos qui règne et des distinctions dans l'octroi de permis ou de renouvellement de permis. De nombreux abus résultent en effet de l'exploitation de carrières en vertu de permis de « bonification de terrains » ou de « transport de stocks », qui sont utilisés en réalité pour l'extraction de sable et de gravier de manière illégale et détournée, ce qui a favorisé les pots-de-vin avec une ampleur inédite, selon des sources de l'agence.

(Lire aussi : Hamadé : Une relation diplomatique avec la Syrie ne change rien aux vérités historiques)

« Impair » dans la relation avec l'Arabie

Par ailleurs, durant la réunion, le ministre de l'Éducation, Marwan Hamadé, doit soulever « l'impair » que commet, selon lui, son collègue des Affaires étrangères, Gebran Bassil, en retardant, sans motifs clairs, la réception d'une copie des lettres de créance de l'ambassadeur d'Arabie saoudite, Walid Yaacoub, arrivé le 20 novembre dernier à Beyrouth pour rejoindre son poste. « Quels que soient les prétextes invoqués à cet effet, il est inacceptable que l'on mette en péril des relations qui peuvent affecter les 250 000 Libanais qui résident et qui travaillent à Riyad », a déclaré M. Hamadé à L'OLJ, déplorant le fait qu'« après l'impair diplomatique commis avec le Vatican (la nomination d'un ambassadeur franc-maçon), on en commette un autre à l'égard d'un pays qui soutient le Liban depuis son indépendance ».

Des sources diplomatiques citées par notre chroniqueur diplomatique, Khalil Fleyhane, dans notre édition du 13 décembre, avaient affirmé redouter une nouvelle crise entre le Liban et l'Arabie saoudite, dans la mesure où l'échange d'ambassadeurs entre les deux pays n'a pas encore dépassé l'étape de la nomination. Le palais Bustros n'a toujours pas donné suite à la demande d'audience de M. Yaacoub, et Riyad n'a pas non plus encore accepté les lettres de créance de l'ambassadeur du Liban, Fawzi Tabbara. Sauf que dans le cas de M. Tabbara, le retard serait dû au fait que Beyrouth a tardé à envoyer les documents qui accompagnent normalement une demande d'accréditation.

 

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Pour sa dernière réunion de l'année demain mardi, le Conseil des ministres discutera de questions environnementales par excellence, notamment le dossier de la gestion des déchets (reporté la semaine dernière) et de l'organisation des carrières. Les deux dossiers ont un potentiel explosif considérable : les deux décharges mises en place par le gouvernement seront saturées courant 2018,...

commentaires (5)

Messieurs Tarek el-Khatib, et tous les responsables de cette catastrophe écologique, accrochez cette photo de la montagne d'ordures en bordure de mer et joliment couverte de vert...bien en vue dans votre salon...après l'avoir encadrée, comme preuve de votre volonté et capacité de préserver notre environnement ! Irène Saïd

Irene Said

13 h 59, le 18 décembre 2017

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Commentaires (5)

  • Messieurs Tarek el-Khatib, et tous les responsables de cette catastrophe écologique, accrochez cette photo de la montagne d'ordures en bordure de mer et joliment couverte de vert...bien en vue dans votre salon...après l'avoir encadrée, comme preuve de votre volonté et capacité de préserver notre environnement ! Irène Saïd

    Irene Said

    13 h 59, le 18 décembre 2017

  • LA PHOTO DE LA HONTE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 01, le 18 décembre 2017

  • LES DECHETS A LEUR PLACE NATURELLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 27, le 18 décembre 2017

  • Nous avons un non-gouvernement composé de non-ministres, dont le plus brillant est Tarek el-Khatib, jamais joignable quand on veut lui poser des questions sensibles concernant son soi-disant "ministère de l'environnement". Et n'oublions pas le fameuc C.D.R., non-efficace dès le début de la crise des déchets...en 2015 !!! Une question: pourquoi plusieurs ministres pour s'occuper du problème des déchets...sachant que le Libanais en général, à plus forte raison des ministres, n'arriveront jamais à s'entendre sur un sujet ? Au rythme ou cela continue, l'été prochain arrivera et au lieu d'une mer bleue et scintillante, nous aurons une mer d'ordures ! Félicitations et MERCI, les non-Responsables ! Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 57, le 18 décembre 2017

  • de la folie, on ne trie pas encore nos dechets. On jette tout ensemble. Alors que le tri pourrait nous economiser au moins 70% des dechets qu'on jette et qui pourrait etre recyclé (30% de matiere organique et 30% de matiere recyclable). Faut voir qui a interet a ce que nos dechets aient une grosse masse, qui d'autre que nos politiciens verreux. A cause de cela on mange du caca et on se douche avec du pipi chaque jour

    George Khoury

    08 h 26, le 18 décembre 2017

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