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Lifestyle - Salon du Livre francophone

Le meilleur de la cuisine libanaise en deux livres, deux approches et dix questions

La couverture de « Manger libanais » de Kamal Mouzawak. Illustration de Zeina Abi Rached

Ils ont un rapport particulier avec notre gastronomie. Chacun avec son histoire, voire même ses (belles) histoires de rencontres, d'idées, de concepts, de saveurs et de recettes. Liza & Ziad Asseily, d'une part, et Kamal Mouzawak, de l'autre, viennent de sortir « leur » livre sur la cuisine. Les premiers ont associé leur savoir-faire dans la restauration en créant Liza Paris en 2005 et Liza Beyrouth en 2013.

Comme ils l'écrivent dans leur édito, « Ziad dirige la cuisine et le développement des restaurants, et Liza s'occupe de "l'amour des gens qu'elle donne, et reçoit avec élégance et génie" ». Leur livre « Liza, à la libanaise », cuisine et art de vivre (Ducasse édition) respire l'élégance et le raffinement, tant dans le concept, la mise en page, les photos que les 75 recettes partagées. Un régal des yeux d'abord. Kamal Mouzawak, « food activist » autoproclamé et fier de l'être, est le porte-parole dans le monde des producteurs, des agriculteurs et d'un Liban organique, simple et convivial. Fondateur de Souk el-Tayeb, le premier marché fermier au Liban, il est également derrière les différents Tawlet, qu'il qualifie de « cuisines communautaires » et des Beit ou « maisons communales ». La cuisine pour lui est certes une question de produits, à respecter selon les saisons, mais aussi de personnes, des femmes surtout, qui partagent leur savoir-faire et celui de la région d'où elles viennent. Son ouvrage, rehaussé des photos de Ayla Hibri et des illustrations de Zeina Abi Rached, est, comme tout ce que fait Kamal, simple, spontané, clair et autour de l'humain.

La sortie des deux ouvrages en France et au Liban presque simultanément est une coïncidence intéressante qui permet de souligner encore plus ce qui les sépare et ce qui les rapproche.

 

La hindbé selon « Liza, à la libanaise ». Photo Rina Nurra

 

« Liza, à la libanaise, cuisine et art de vivre », de Liza et Ziad Asseily (Ducasse édition)

1) Quel est le concept du livre ?
On y décrit une journée à la libanaise, du petit déjeuner au déjeuner de famille et dîner de fête entre amis, en passant par le street food. L'idée est de faire découvrir notre cuisine à travers notre mode de vie et tout ce que nous aimons du Liban. C'est bien sûr avant tout un livre de recettes, mais aussi une invitation au voyage et à la découverte de notre pays.

2) Un livre de recettes libanaises de plus ? En quoi celui-ci est-il différent ?
Ce sont certes des recettes parfois traditionnelles mais aussi une interprétation de notre cuisine, et le résultat de 12 années de restauration à Paris et 4 au Liban. Nous avons eu envie de partager cette expérience et cette autre vision de la cuisine libanaise.
Notre but n'est pas d'être différent à tout prix, mais surtout de diffuser notre amour du Liban et de rendre cette cuisine plus adaptée au mode de vie d'aujourd'hui. Les gens mangent plus sain, de plus en plus végétarien, aiment les choses simples avec du goût. Les recettes que nous présentons répondent à tous ces critères.

3) Les photos sont très présentes, pourquoi ce choix très visuel ?
Les photos et les reportages rendent un livre plus vivant, plus incarné. Nous voulions que le lecteur ressente des émotions en le parcourant et surtout qu'il ait envie de venir au Liban. Voilà notre premier objectif. Ce qui attire chez nous, c'est cette hospitalité, cet art de recevoir. Le Liza n'est pas seulement des recettes, mais une esthétique, la mise en avant de nos talentueux designers. C'est aussi ce qu'on a voulu montrer à travers ce livre.

4) À qui vous adressez-vous ? Des Libanais ? Des étrangers ? Des jeunes, des moins jeunes ? Des cuisiniers ou des esthètes ?
On s'adresse à tout le monde. Bien évidemment, quand nous avons eu la chance d'être approché par l'équipe de Ducasse éditions, c'était une opportunité de diffuser notre livre en France, en Europe, et même dans le monde. Nous avons envie que le monde entier connaisse notre cuisine. Être une sorte d'ambassadeur de notre pays, attirer le plus de monde. Jeunes et moins jeunes, esthètes ou cuisiniers peuvent prendre du plaisir à feuilleter ce livre ou à s'essayer à cette cuisine. Certaines recettes sont plus compliquées que d'autres, mais nous avons essayé autant que possible de faire simple.

5) À combien se vend-il et où pouvons-nous le trouver ?
Il va se vendre à 35 dollars américains dans toutes les librairies (Antoine, Stephan, Virgin) et bien entendu au restaurant Liza Beyrouth. En France, on le trouvera à Liza Paris et dans toutes les librairies.

6) Vous avez signé le livre en France avant le Liban et vous l'avez fait avec une maison d'édition française. Est-ce que cela signifie que les Français s'intéressent plus à la cuisine libanaise ?
Nous avons signé en France avec une maison d'édition française parce que nous avons commencé le Liza à Paris il y a 12 ans déjà, et nous vivons entre les deux pays depuis longtemps. Je pense que les Français sont aujourd'hui de plus en plus ouverts à notre cuisine... On peut manger végétarien, sans gluten, sans lactose, les mezzés ont toutes les vertus et, en plus, ce mode de consommation de partage est rentré dans leurs mœurs. Toute la nouvelle tendance à Paris se compose de petites entrées à partager... Beaucoup de nouveaux concepts méditerranéens levantins, ces dernières années, se sont implantés à Paris et ont ouvert la voie. Nous étions là depuis longtemps et ce n'est que maintenant que notre cuisine prend tout son essor. D'où l'intérêt des éditeurs français et étrangers de faire des livres sur la cuisine libanaise.

7) C'est davantage un livre à regarder ou à consulter ?
J'espère sincèrement qu'il est à consulter, à essayer les recettes et à les réussir... Et puis, bien sûr, le feuilleter, le regarder et avoir envie de voyager.

8) Quel a été l'apport de l'équipe technique, photographes et graphistes, dans le livre ? Qui sont-ils ?
Nous avons eu la chance d'être entourés de professionnels très ouverts, curieux, à l'écoute de ce qu'on voulait. Il était hors de question de faire ce livre si la photographe et l'éditrice ne venaient pas passer une semaine au Liban. Pour tout shooter, comprendre et nous suivre dans nos délires, manger aussi dans nos endroits préférés, être reçus royalement par nos amis, visiter le pays et connaître notre restaurant à Beyrouth. Rina Nurra, une photographe d'origine sarde, très talentueuse, a compris que nous voulions une esthétique moderne, qu'il fallait travailler vite et, bien sûr, montrer le maximum d'images en peu de temps. Alice Gouget, responsable éditoriale, a posé des millions de questions à mon mari et à moi-même sur tout ce qu'elle voyait. Elle a réussi à synthétiser toutes ces informations et à aller à l'essentiel. Le graphiste Pierre Tachon, qui travaille essentiellement pour Alain Ducasse, a apporté son œil d'expert tout en respectant les codes. Ainsi, nous avons déjeuné avec lui au Liza Paris, pour qu'il ressente cette ambiance très claire et moderne, et pour rapprocher son expertise de notre vision. Toute l'équipe a réussi à produire un livre qui nous ressemble et ça, c'était un vrai challenge.

9) En quoi la cuisine libanaise peut devenir un geste politique, résistant ?
Le seul moment où les Libanais, sunnites, chiites, maronites, orthodoxes ou druzes, sont d'accord, c'est autour d'un repas. Si la kebbé est délicieuse, tout va bien !... Le fait de diffuser notre cuisine partout dans le monde et de devenir cette cuisine de demain braque d'une autre manière la lumière sur notre pays. Nous ne sommes pas uniquement un pays qui a été en guerre, avec d'innombrables problèmes à résoudre et une classe politique déplorable. Nous avons des talents reconnus internationalement et qui rehaussent l'image du Liban à l'étranger, que ce soit Rabih Kayrouz, Kamal Mouzawak, Élie Saab, Ibrahim Maalouf et tant d'autres. Ils sont les ambassadeurs du Liban dans le monde, ils sont la résistance, ils sont les architectes du Liban de demain.

10) Cette cuisine peut-elle rivaliser avec les plus grandes (française, japonaise, italienne, etc.) ? Si oui, comment ?
Oui, cette cuisine peut rivaliser avec les plus grandes, parce qu'elle est riche et variée. D'ailleurs, de plus en plus de grands chefs s'y intéressent. Nous essayons de la diffuser au mieux et ces livres vont nous aider à aller plus loin. En plus, nous sommes les rois du marketing ! Enfin, les plus grands chefs utilisent à présent nos produits dans leur cuisine, du sumac au jus de grenade, au sésame...

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« Liza à la libanaise, cuisine et art de vivre », de Liza et Ziad Asseily (Ducasse édition).
Signatures : le samedi 4 novembre au Salon du livre (Stand Librairie Antoine) à 19h00 et le dimanche 12 novembre au restaurant Liza Beyrouth de 16h30 à 20h00.

« Manger libanais » au Sud. Photo Ayla Hibri

« Manger libanais », de Kamal Mouzawak (éditions Marabout)

1) Quel est le concept du livre ?
C'est un road trip à travers le Liban, dans les différents Tawlet et Beit, et les recettes des cuisinières ! Depuis Beyrouth, vers Saïda, vers la campagne du Sud, le Chouf, la Békaa, les montagnes du Nord, Baino, Tripoli, Batroun... Une boucle entière que nous suivons pour aller à la rencontre des femmes, de leurs terres, leurs cuisines, leurs traditions et leurs histoires.

2) Un livre de recettes libanaises de plus ? En quoi celui-ci est-il différent ?
Rien ne raconte une tradition aussi bien que la cuisine... De toutes les expressions traditionnelles, le costume, la musique, l'architecture, la danse, rien ne traverse le temps et l'espace aussi bien que la cuisine, et rien n'exprime une identité, des racines et une histoire aussi bien que la kebbé du Nord ou la friké du Sud. C'est donc une histoire du Liban à travers ses femmes et ses hommes, et leur cuisine.

3) Les images sont très présentes, photos ou illustrations, pourquoi ce choix très visuel ?
Pour raconter avec les yeux d'abord, car de nos jours, avec Instagram et d'autres réseaux sociaux, on « lit » les images. Et puis aussi parce que c'était juste ce qu'on voulait faire, sans y avoir trop pensé !

4) À qui s'adresse-t-il ? Des Libanais? Des étrangers ? Des jeunes, des moins jeunes ? Des cuisiniers ou des esthètes ?
Il s'adresse à des personnes curieuses d'un pays, de ses femmes, de ses hommes et de leurs traditions... En allant à la rencontre de l'autre à travers un medium facile à partager, inclusif, et un sujet comme la cuisine, il parle autant à un Libanais qui voudrait en savoir plus sur Georgina, sa région ou son kebbé, ou un étranger qui cherche à connaître cette inconnue.

5) À combien se vend-il et où pouvons-nous le trouver ?
Vingt-neuf euros en France et 31,9 euros au Liban. Il sera en vente dans toutes les librairies et à Tawlet.

6) Vous avez signé le livre en France avant le Liban et vous l'avez fait avec une maison d'édition française. Est-ce que cela signifie que les Français s'intéressent plus à la cuisine libanaise ?
Il faudrait leur demander ! C'est la maison d'édition Marabout qui est venue vers moi, et j'étais enchanté... Je devais trouver un concept pour le livre. L'idée du « meshwar », un road trip, à la rencontre des gens, des lieux et des goûts, m'a paru évidente.
J'espère pouvoir bientôt produire un livre avec un éditeur libanais... L'important est de partager des histoires positives, constructives et qui montrent le meilleur de ce que nous sommes.

7) C'est plus un livre à regarder ou à consulter ?
D'abord à lire, pour les aventures de chacune des héroïnes !

8) Quel a été l'apport de Zeina Abi Rached et Ayla Hibri dans le livre ?
Toutes les personnes qui ont travaillé dans ce projet et toutes les étapes sont d'une égale importance. Les recherches d'abord avec les cuisinières et l'équipe de Souk el-Tayeb, les photos de Ayla, les illustrations de Zeina, la belle mise en page de Be-Poles et la gestion de tout ce projet par l'équipe de Marabout.

9) En quoi la cuisine libanaise peut devenir un geste politique, résistant ?
Toute expression peut être un geste politique et résistant quand elle mène à un changement. La seule façon de changer le monde est de le faire à travers les petites actions du quotidien. La cuisine perpétue une identité, notre identité. Elle renforce le pouvoir des femmes, génère des revenus aux agriculteurs, aux producteurs locaux et aux cuisiniers.

10) Cette cuisine peut-elle rivaliser avec les plus grandes (française, japonaise, italienne, etc.) ? Si oui, comment ?
Il n'y a pas de grande et de petite cuisine. La cuisine est une expression sincère et authentique du « ici et maintenant ». Des patates qui cuisent sous la bouse de vache (matmoura), c'est l'expression la plus sincère de Laqlouq ; un baklava des plus sophistiqués (pâte feuilletée) et des produits chers (samné, pistaches, sucre...), et des techniques d'échange avec le monde (ici l'Empire ottoman) sont une expression sincère et authentique de Tripoli. L'une n'est pas plus grande que l'autre.
La cuisine libanaise est une cuisine de différences, de mélanges. Un patchwork, tout comme ce pays, sa géographie, sa situation, ses gens, leurs origines, leurs religions, leurs influences... Une cuisine « Hi-Kifak-Ça va » ! Plus c'est mélangé et mieux c'est !

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« Manger libanais », de Kamal Mouzawak (éditions Marabout).
Signatures : à Beyrouth, le dimanche 5 novembre au Salon du livre (Stand Librairie Antoine) à 17 heures, le vendredi 17 novembre à Tawlet à partir de 13 heures et le samedi 18 novembre à Souk el- Tayeb, de 11 heures à 13 heures. À Paris, le mardi 14 novembre à Liwan, le samedi 2 décembre à la librairie Voyageurs du monde et le jeudi 7 décembre au Bon Marché.

Ils ont un rapport particulier avec notre gastronomie. Chacun avec son histoire, voire même ses (belles) histoires de rencontres, d'idées, de concepts, de saveurs et de recettes. Liza & Ziad Asseily, d'une part, et Kamal Mouzawak, de l'autre, viennent de sortir « leur » livre sur la cuisine. Les premiers ont associé leur savoir-faire dans la restauration en créant Liza Paris en 2005...

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