Salaires gelés, réductions d'effectifs en vue... Les fonctionnaires français se sont mobilisés mardi, journée de grèves et manifestations, pour dire leur "ras-le-bol", ouvrant un nouveau front social pour le président Emmanuel Macron que les contestations pour l'instant n'ébranlent pas.
Au moins 400.000 agents publics ont pris part aux manifestations, dont 45.000 à Paris (26.000 selon la police), selon de premières estimations du syndicat CGT, portant sur 70 manifestations parmi les 130 prévues, "dont les plus importantes".
Après les récentes manifestations contre les ordonnances réformant le droit du travail, celles des retraités ou encore des chauffeurs routiers, la fonction publique est vent debout contre la suppression annoncée de 120.000 postes d'ici à la fin du quinquennat, le gel des rémunérations ou encore la remise en cause de son statut.
Dans les cortèges, les manifestants disaient leur lassitude, évoquant, comme François Schill, 51 ans, directeur d'une école maternelle de Strasbourg (Est), ces "fonctionnaires au front tous les jours" : dans les hôpitaux, la police, chez les pompiers.
"Macron, regarde ta Rolex, c'est l'heure de la révolte" : à Saint-Nazaire, Nice ou ailleurs, le président Macron était souvent la cible du mécontentement.
Pour la première fois depuis dix ans, l'ensemble des syndicats ont appelé les 5,4 millions d'agents du service public, des infirmières aux instituteurs, à se mobiliser. Un appel unitaire qui "reflète plus qu'un malaise dans les fonctions publiques", a souligné Jean-Claude Mailly, patron du syndicat Force ouvrière.
Les grèves des fonctionnaires, qui représentent environ 20% de l'emploi en France, se traduisaient par des fermetures de services publics, notamment crèches et établissements scolaires.
Le ministère de l'Éducation nationale annonçait 17,5% de grévistes chez les enseignants, contre 35 à 50% selon les syndicats. A Marseille, dans le sud-est de la France, les trois quarts des cantines étaient fermées et 80% des crèches, selon la mairie.
Dans le ciel, 30% des vols ont été annulés préventivement en raison de la grève des agents de l'Aviation civile, qui emploie majoritairement des fonctionnaires.
(Lire aussi : "Certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux de chercher du travail" : nouvelle saillie de Macron)
"Malaise"
Fait inédit depuis 2009, une dizaine de syndicats de praticiens hospitaliers (médecins, pharmaciens, dentistes) se sont joints à l'appel du secteur paramédical (infirmiers, aides-soignants).
Le Premier ministre Édouard Philippe a dit lundi "assumer pleinement les mesures prises", assurant que les fonctionnaires n'étaient "pas du tout déconsidérés" et "même essentiels dans le fonctionnement de notre pays".
Les fonctionnaires, "souvent traités de feignants et de profiteurs", ont "besoin de respect", a rétorqué Philippe Martinez, numéro un du syndicat CGT, avant le départ de la manifestation parisienne.
"Il y a une mobilisation importante (...) Il faut entendre ces inquiétudes", a de son côté reconnu le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner.
Une opinion partagée par Frédéric Dabi de l'institut de sondage Ifop: "les fonctionnaires ont le sentiment qu'ils sont stigmatisés et qu'ils font les frais de la politique du gouvernement".
"Aucun agent public ne verra son salaire baisser", a promis le ministre chargé de la Fonction publique qui a salué mardi le travail de ces "héros du quotidien".
Cette journée d'actions vient s'ajouter aux divers mouvement - des opposants à la réforme du code du travail aux retraités - qui ont surgi ces dernières semaines contre les projets du gouvernement, sans parvenir à contraindre pour l'instant ce dernier à revoir fondamentalement ses projets.
Lundi soir, pour la première fois depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à la présidence, tous les syndicats nationaux se sont réunis près de Paris pour tenter d'accorder leurs violons afin de faire pression sur le gouvernement, mais les divergences demeurent très fortes. Une nouvelle réunion est prévue le 24 octobre.
Pourtant, plusieurs organisations voient leur base demander des actions plus fermes, et la pression générale semble monter.
Selon un sondage Harris Interactive diffusé lundi, près de six Français sur dix (57%) déclarent soutenir les grèves et les manifestations contre les ordonnances réformant le Code du travail, auxquelles ils sont de plus en plus défavorables.
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