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Liban - Permutations

Indépendance de la justice : « Mettez-moi à l’épreuve », lance Jreissati

Le CPL est actuellement testé dans sa volonté de réforme.

Le train des permutations et nominations judiciaires est déjà en marche et devrait en principe aboutir incessamment, début octobre selon les pronostics.
Cette date butoir serait techniquement justifiée par le fait que l'un des dix membres du Conseil supérieur de la magistrature, Tannous Mechleb, doit partir à la retraite dans les prochaines semaines, d'où l'urgence d'adopter le décret des permutations avant son départ.
Les permutations et nominations vont toucher l'ensemble du corps de la magistrature, soit près de 542 permutations, dont 21 nominations de jeunes juges fraîchement diplômés. Dans les milieux judiciaires concernés, on espère que cette procédure sera vite et bien expédiée et ne connaîtra pas le sort de ses précédentes qui n'ont pu être finalisées qu'après de longues semaines, voire des mois de marchandages politiques.

En dépit des pratiques d'ingérence politique consacrées à travers le temps, certains hauts magistrats veulent bien croire à la volonté de réforme affichée par le Courant patriotique libre, notamment en matière de respect de l'indépendance de la justice. Pour eux, ces permutations constituent « un vrai test de la détermination du sexennat à joindre l'acte à la parole ». Certains vont même jusqu'à estimer que le bras de fer qui a lieu actuellement entre le Conseil constitutionnel – dont la décision d'abroger la loi sur le financement de la grille des salaires serait soutenue par le président Michel Aoun – et le chef du Parlement Nabih Berry autour de leurs prérogatives respectives pourrait être un avant-goût d'un changement escompté au niveau du quatrième pouvoir.

 

(Pour mémoire : Chucri Sader demande la terminaison de ses services)

 

La censure politique
Le vent de la réforme et du changement a-t-il commencé à souffler ?
« Mettez-moi à l'épreuve et vous verrez », a lancé hier le ministre de la Justice Salim Jreissati dans un entretien à L'OLJ. « Selon la loi, le projet est définitif et obligatoire mais n'interdit pas la possibilité de négociations avec les ministres qui doivent en définitive contresigner le décret », rappelle M. Jreissati qui n'écarte cependant pas l'éventualité de la « censure politique ».

Du point de vue procédural, le CSM propose une ébauche de projet qu'il soumet au ministre de la Justice. Si les deux parties ne parviennent pas à s'entendre, le projet peut quand même être adopté à la majorité des membres du CSM, soit 7 membres sur dix, dont la décision est « définitive ». Sauf que, et c'est là où le bât blesse, les permutations et nominations ne sont effectives qu'après adoption d'un décret qui doit être contresigné par les ministres de la Justice, de la Défense, des Finances, par le Premier ministre et le président de la République.

Autant de parties qui, dans les coulisses, ont leur mot à dire, voire leurs observations en termes de quotas à distribuer sur base des critères confessionnels, d'allégeance ou de sympathies politiques. « Il suffit que l'un d'entre eux appose son veto sur le décret pour que le train des permutations soit entravé », rappelle le fondateur et directeur exécutif de l'Agenda Légal, Nizar Saghiyeh.
Ce ne sera pas le cas cette fois-ci, rétorque M. Jreissati qui assure que son « répondant politique », le CPL, ne lui a pas demandé des bienveillances particulières et n'a pas avancé de noms favoris.
« Je m'engage à respecter la règle du jeu qui consiste à ce qu'il y ait une autorité de nominations (entendre le CSM) et une autorité de censure exercée par le ministre de la Justice ». Et d'ajouter, en réponse aux imputations d'ingérence de la part des parties politiques : « Je ne vais pas m'amuser à rentrer dans le bazar. Je n'ai aucune autre prétention que l'application du principe de la rotation, nécessaire après une période de 5 à 6 ans passés dans un même poste », dit-il.

Pour le ministre, la logique est d'« éviter les îlots et d'assimiler un nom au poste et un poste au nom ». « Il faut désormais éviter les centres du pouvoir et les noyaux durs constitués par les différentes formations politiques, dit-il, jurant au passage que le CPL, un courant encore jeune, n'a malheureusement pas de magistrats dans ses cercles. »

 

(Pour mémoire : Un train de permutations et nominations quasi monochromes en Conseil des ministres)

 

Le principe d'inamovibilité
La rotation est à ne pas confondre toutefois avec le principe de l'inamovibilité souvent bafoué par les politiques pour mieux sanctionner les magistrats « insoumis » ou « indépendants de l'autorité politique ».
« On ne peut muter un juge sans son consentement, sinon la pratique des mutations arbitraires devient une sanction ou à défaut une épée de Damoclès brandie au-dessus des têtes des magistrats », commente M. Saghiyeh.
La lutte pour investir les postes-clés au sein de l'appareil judiciaire, comme les parquets, l'instruction et les chambres de mise en accusation, est connue. Ce sont autant de tremplins habilitant les politiques à exercer leur influence sur le pouvoir judiciaire en l'exploitant dans l'arène politique.

Devant l'interférence légendaire des politiques dans les nominations, les membres du CSM, dont 8 d'entre eux sont désignés par le gouvernement, ont fini par saisir le fonctionnement de ce cercle vicieux, explique M. Saghiyeh : pour que leur projet soit accepté, ils entament des tractations non officielles avec les politiques surtout que la distribution des quotas communautaires, une coutume bien enracinée, les oblige à négocier avec eux. Une fois que les juges candidats à un poste donné ont compris que les politiciens sont la clé de leur réussite professionnelle, ils se sont mis à arpenter les coulisses des décideurs. Le bazar s'est ouvert. Est ensuite venu le tour du citoyen qui a également saisi la règle du jeu et compris que pour être dans les bonnes faveurs de tel ou tel juge, il faudra qu'il rende également visite au « parrain politique » de ce dernier, pour obtenir gain de cause dans une affaire précise, explique le juriste. Il tient toutefois à préciser que cette dynamique préjudiciable n'est heureusement pas avalisée par tous les magistrats, dont une bonne partie continue de lutter contre ce cercle infernal qui nuit à l'ensemble du pays.

« L'important est non seulement de désigner des juges compétents en droit, mais ils doivent également être dotés d'une culture générale et d'une sensibilité sociale qui les habilitent à accompagner les développements et à se distinguer par des verdicts et des jugements éclairés et adaptés », conclut un magistrat réformiste.

 

Pour mémoire 

Affaire Chucri Sader : échange à fleurets mouchetés entre Jreissati et Fenianos

 

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commentaires (3)

""et une autorité de censure exercée par le ministre de la Justice"" sans prejuger de quoi que ce soit , au cas ou cette "autorite de censure " aurait le pouvoir de rejeter une decision du CSM, ALORS LA, nous en revenons a escompter sur : 1-l'impartialite du ministre de la justice 2-l'honnetete de celui-ci en d'autres termes nous en revenons au point zero/depart.......et ce serait etre trop opimniste et naif

Gaby SIOUFI

10 h 25, le 28 septembre 2017

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Commentaires (3)

  • ""et une autorité de censure exercée par le ministre de la Justice"" sans prejuger de quoi que ce soit , au cas ou cette "autorite de censure " aurait le pouvoir de rejeter une decision du CSM, ALORS LA, nous en revenons a escompter sur : 1-l'impartialite du ministre de la justice 2-l'honnetete de celui-ci en d'autres termes nous en revenons au point zero/depart.......et ce serait etre trop opimniste et naif

    Gaby SIOUFI

    10 h 25, le 28 septembre 2017

  • LES LIBANAIS ONT GOUTE A PROFUSION CETTE SAUCE AMERE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 13, le 28 septembre 2017

  • Ah, la décision du Conseil constit avait la bénédiction du PR. Je me disais aussi que les Sages prenaient de ces libertés!

    Marionet

    10 h 02, le 28 septembre 2017

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