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Liban - Patrimoine

Le Liban saisit la justice pour recouvrer la tête de taureau en marbre du temple d’Echmoun

Le ministère de la Culture a engagé une démarche auprès des États-Unis pour récupérer la précieuse pièce.

La tête du taureau d’Echmoun.

Le Liban a officiellement engagé une démarche, à travers le ministère de la Culture, pour se voir restituer par les États-Unis la tête de taureau sculptée en marbre du temple phénicien d'Echmoun.
« Nous avons tous les documents descriptifs et photographiques, et d'autres éléments de détails pour étayer solidement les preuves que cette sculpture appartient au Liban », souligne Anne-Marie Afeiche, conservatrice du musée national de Beyrouth, indiquant que l'œuvre fait 327 cm de hauteur, 295 cm de largeur, et qu'il lui manque la partie inférieure des oreilles.

Provenant des fouilles du temple d'Echmoun, à Bustan el-Cheikh, situé à trois kilomètres au nord de Saïda, la pièce qui date du IVe siècle avant J.-C. a été repérée par un des directeurs du Metropolitan Museum de New York (MET), puis saisie par les autorités américaines. Elle était jusqu'à récemment exposée au MET, prêtée par un couple de collectionneurs américains qui dit l'avoir acquise en 1996 auprès d'un marchand d'art londonien. Or la tête de taureau figure dans la liste des 600 objets découverts par Maurice Dunand sur le site d'Echmoun, entre 1962 et 1979, et entreposés pendant la guerre du Liban, dans une salle souterraine du château des croisés, à Byblos, à la demande de l'émir Maurice Chéhab, alors directeur général des antiquités. En 1981, le dépôt a été pillé et les 600 sculptures et éléments d'architecture, dont la tête de taureau, ont disparu, sortant du pays illégalement.

L'affaire de la tête de taureau « pillée » remonte à décembre dernier, quand, au cours d'un voyage à Dubaï, Mme Afeiche rencontre un des directeurs du Metropolitan Museum de New York, qui lui signale la présence à l'exposition du MET d'une tête de taureau sculptée en marbre, originaire du temple phénicien d'Echmoun. De retour à Beyrouth, Mme Afeiche informe la DGA, qui confirme que la sculpture est bel et bien celle « dérobée » en 1981. Une demande officielle du ministère de la Culture et de la DGA est alors transmise aux autorités américaines pour que l'œuvre soit restituée au Liban. Toutefois, à la mi-juillet, le couple de collectionneurs Lynda et William Beierwaltes, propriétaires de la tête de taureau, décident de saisir la justice pour récupérer la sculpture. La DGA décide en conséquence de mandater un cabinet d'avocats pour faire valoir ses droits.

 

(Pour mémoire : Bataille à New York autour d'une antiquité libanaise à la provenance douteuse)

 

Un ensemble monumental destiné au culte du dieu guérisseur
À la demande de Maurice Dunand, le Suisse Rolf Stucky, ancien directeur de l'Institut d'archéologie classique de Bâle et ancien pensionnaire de l'IFPO à Beyrouth, avait publié la fouille documentaire du temple d'Echmoun. Lors d'une conférence donnée au musée de l'Université américaine de Beyrouth, en 2009, il avait souligné qu'un nombre important d'inscriptions phéniciennes provenant de Bustan el-Cheikh, étaient apparues sur le marché des antiquités de Beyrouth, dès 1900. « Leur état de conservation était extraordinaire », et « plus surprenante était l'uniformité textuelle ».

Ces inscriptions indiquaient que Bodashtart, roi des Sidoniens, petit-fils du roi Echmounazar, avait construit le temple pour son dieu guérisseur Echmoun. Le sanctuaire était posé près d'une grotte d'où coulait une source d'eau. Le site, dont les premières traces datent de la fin du VIIe siècle avant J.-C., a connu plusieurs phases de construction. Jusqu'à la fin du VIe siècle, il comprenait un temple à ciel ouvert comportant un autel servant aux sacrifices et une enceinte pour séparer le sacré du profane. Au sein de ce « jardin sacré » (ainsi désigné par les auteurs antiques), les archéologues ont découvert de nombreux ex-voto en terre cuite et pierre calcaire importés en majeure partie de Chypre. Les uns représentent des hommes à la taille mi-humaine, adorateurs ou porteurs d'offrandes. Les autres, plus petits, déclinent des statuettes féminines de nourrice, de musicienne ou de danseuse. Vers 530 avant J.-C., la source ayant tari, la grotte fut intégrée dans un podium dont probablement le roi Echmounazar II était le commettant. La structure, composée de quatre murs en bloc de taille avec un remplissage de terre et de galets, n'a pas résisté ; elle s'est écroulée. Seul l'angle ouest est conservé.

Avec une orientation légèrement différente, un deuxième podium « de grande envergure » et tout en marbre fut alors élevé par le roi Bodashtart. « La construction extérieure suivait de près l'ordre ionique de la Grèce contemporaine », précise Rolf Stucky, et la cella – dont les colonnes portaient de chapiteaux à quatre protomés de taureau – gardait la tradition orientale. Là, le marbre, la recherche poussée du « goût à la grecque » font leur apparition. L'homme debout, nu ou vêtu, coiffé à la façon grecque domine.
Vers la fin du même siècle, arrive le « Temple Boy » où une myriade de statues de jeunes garçons nus, âgés de un à cinq ans, assis ou accroupis, ont été déterrées. Seuls les corps de deux fillettes sont documentés dans le fichier de Dunant.

La présence d'un grand nombre d'éléments architecturaux de facture ionique prouve, par ailleurs, que, vers 370 avant J.-C., deux bâtiments en marbre attique furent construits sur le podium de Bodashtart. Et, selon le spécialiste suisse, « il ne fait pas de doute que des architectes et sculpteurs grecs furent responsables de l'exécution des travaux. Des spécialistes accompagnaient la matière brute en Phénicie et y formaient – avec des apprentis locaux – des ateliers pour accomplir les demandes, les sarcophages, la statuaire et les éléments d'architecture ». « C'était le sanctuaire phénicien le plus splendide du premier millénaire et le mieux conservé », dit-il.

Mais le démantèlement progressif du site, la guerre civile, l'invasion israélienne et la main de l'homme venu pêcher les trésors pour les mettre en vente ont mutilé une bonne partie du grand monument.

Le Liban a officiellement engagé une démarche, à travers le ministère de la Culture, pour se voir restituer par les États-Unis la tête de taureau sculptée en marbre du temple phénicien d'Echmoun.« Nous avons tous les documents descriptifs et photographiques, et d'autres éléments de détails pour étayer solidement les preuves que cette sculpture appartient au Liban », souligne...

commentaires (2)

ELLE RESSEMBLE A BEAUCOUP D,AUTRES TETES DE TAUREAUX QUE NOUS SUPPORTONS DANS CE PAYS...

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 47, le 05 août 2017

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Commentaires (2)

  • ELLE RESSEMBLE A BEAUCOUP D,AUTRES TETES DE TAUREAUX QUE NOUS SUPPORTONS DANS CE PAYS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 47, le 05 août 2017

  • Terrible la vanité humaine, à vouloir s'approprier une part de mémoire collective, une part d'histoire, à vouloir devenir Dieu , du temps, passé et à venir...

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 43, le 05 août 2017

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