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Moyen Orient et Monde - Interview express

Démission de Pierre de Villiers : « la première grosse erreur du quinquennat de Macron »

Michel Goya décrypte pour « L'Orient-Le Jour » les tenants et aboutissants du conflit entre Emmanuel Macron et l'ancien chef d'état-major des armées, Pierre de Villiers.

Le 8 mai dernier, lors de la rencontre entre Emmanuel Macron et le chef d’état-major des armées, le général Pierre de Villiers, aux côtés de François Hollande. Philippe Wojazer/AFP

Le chef d'état-major français Pierre de Villiers, qui avait critiqué les 850 millions d'euros d'économies réclamés cette année aux armées, a présenté hier sa démission au président Emmanuel Macron. Un fait historique sous la Ve République. Ancien colonel et spécialiste des questions de défense, Michel Goya décrypte pour « L'Orient-Le Jour » les tenants et les aboutissants de ce conflit.

Q – Emmanuel Macron s'était engagé, pendant sa campagne, à augmenter le budget de la défense à 2 % du PIB d'ici à 2020. Trois mois plus tard, le chef de l'état-major démissionne. Comment en est-on arrivé à une telle situation ?
R – Cette décision a été provoquée par la trahison et l'humiliation dont a fait l'objet Pierre de Villiers. Bien qu'elle entre en contradiction avec les promesses de campagne d'Emmanuel Macron, cette nouvelle offensive du ministère de l'Économie (Bercy réclame 850 millions d'économie aux armées) n'est en soi pas surprenante. Elle a lieu chaque été. Cependant, je vois mal comment Pierre de Villiers aurait pu accepter sa reconduction à la tête de l'état-major, le 1er juillet, en étant informé d'une telle coupe budgétaire. Il ne l'aurait jamais fait.
De plus, les récentes annonces concernant 2018 sont loin du changement promis. L'augmentation du budget de la défense de 1,5 milliard d'euros avait déjà été décidée sous le quinquennat de François Hollande. Les montants alloués aux opérations extérieures seront similaires à ceux de 2017. Le président est clairement revenu sur sa promesse d'aider les armées. Et il a jugé bon de remettre de l'huile sur le feu dans son discours du 13 juillet, dans lequel il humilie le « premier des militaires » devant ses hommes, au ministère de la Défense, en lui demandant de se taire. Ce n'était pas nécessaire. C'est la première grosse erreur de son quinquennat.

Le nouveau chef de l'état-major, François Lecointre, a-t-il été choisi pour sa « Macron-compatibilité » ?
J'ignore pour quelles raisons il a été choisi, mais il est forcément « Macron-compatible ». La relation entre le chef des armées (le président de la République) et le chef de l'état-major repose sur une très grande confiance. On aurait pu penser qu'Emmanuel Macron allait nommer quelqu'un de docile, or François Lecointre est quelqu'un de très courageux intellectuellement. Ce n'est pas quelqu'un qui va se taire et appliquer sagement les consignes. On peut donc s'attendre à une poursuite du combat de sa part. Les armées traversent une crise profonde. Il a accepté de monter au front, il doit améliorer leur situation.

Quelles peuvent-être les conséquences de la coupe budgétaire de 850 millions d'euros réclamée aux armées ?
Trois secteurs peuvent être affectés par une telle annonce. On pense tout d'abord au recrutement. Cela dit, un budget a déjà été validé pour cette année, donc il ne devrait pas être concerné à court terme. Ces économies vont d'abord impacter l'entraînement des militaires : les pilotes de l'armée de l'air vont disposer de moins d'heures de vol, tandis que le temps passé sur le terrain par leurs collègues de l'armée de terre sera réduit. Mais ce n'est rien par rapport aux conséquences matérielles de cette annonce. Les commandes de nouveaux équipements vont devoir être reportées. On va ainsi obliger les militaires à travailler avec du matériel ancien, ce qui réduit grandement leur efficacité. Cela vient s'ajouter à la fatigue des soldats, éprouvés par l'opération Sentinelle (protection du territoire national). En période de menace terroriste, ce n'est clairement pas souhaitable et pose des questions concernant la sécurité du territoire.

 

 

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Le chef d'état-major français Pierre de Villiers, qui avait critiqué les 850 millions d'euros d'économies réclamés cette année aux armées, a présenté hier sa démission au président Emmanuel Macron. Un fait historique sous la Ve République. Ancien colonel et spécialiste des questions de défense, Michel Goya décrypte pour « L'Orient-Le Jour » les tenants et les aboutissants de...

commentaires (6)

C'est vraiment incompréhensible ! De nos jours seule la voix du fort est entendue. L'Allemagne est entendu pour sa force économique la Russie pour sa puissance militaire tout comme les États Unis et la chine. Si nous n'avons ni force économique ni puissance militaire, on serait entendu pour nos beaux yeux ou nos fromages. C'est vraiment la vache qui rit là!

Alexandre Hage

15 h 50, le 20 juillet 2017

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Commentaires (6)

  • C'est vraiment incompréhensible ! De nos jours seule la voix du fort est entendue. L'Allemagne est entendu pour sa force économique la Russie pour sa puissance militaire tout comme les États Unis et la chine. Si nous n'avons ni force économique ni puissance militaire, on serait entendu pour nos beaux yeux ou nos fromages. C'est vraiment la vache qui rit là!

    Alexandre Hage

    15 h 50, le 20 juillet 2017

  • Si ces coupes budgétaires vont réduire les activités militaires françaises en les rendant moins efficaces , comment donc pourra t il faire pour aider ses "partenaires" africains ou moyens orientaux ?? Ah il est mal là , très mal le gamin ..

    FRIK-A-FRAK

    11 h 48, le 20 juillet 2017

  • Lorsque l'amateurisme gouverne le France, 5ème puissance mondiale, membre permanent du Conseil de Sécurité avec droit de veto grâce au général de Gaulle... Ce spectacle donquichottesque vu de là où repose le Général, est lamentable pour ne pas dire affligeant.

    Un Libanais

    10 h 41, le 20 juillet 2017

  • QUAND LA MATURITE MANQUE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 22, le 20 juillet 2017

  • Emmanuel Macron a eu tort d'humilier le général de Villiers et au delà de sa personne l’armée française. Sa posture autoritaire : " je suis le chef" reflète son immaturité.

    Tabet Ibrahim

    08 h 41, le 20 juillet 2017

  • “La philosophie ne consiste-t-elle pas, après tout, à faire semblant d'ignorer ce que l'on sait et de savoir ce que l'on ignore ?” de Paul Valéry Extrait de L'Homme et la coquille

    FAKHOURI

    08 h 07, le 20 juillet 2017

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