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"On vit pire que des bêtes": à Paris, des migrants campent sous l'autoroute

"Le bruit, la saleté, même les animaux ne supporteraient pas. On est des réfugiés pourtant, on n'est pas là pour profiter du système", explique un jeune Afghan.

Des migrants se lavent sur le trottoir de la porte de La Chapelle, le 29 juin 2017. AFP / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT

 "On vit pire que des bêtes": près du centre humanitaire pour migrants ouvert à Paris, Ibrahim dort dans le bruit des klaxons, comme un millier d'autres Afghans, Erythréens et Soudanais, à l'endroit même où une vaste évacuation avait déjà eu lieu début mai.

Leur but, à tous, est d'entrer dans ce centre, principal dispositif de transit en France qui a permis à 12.000 migrants de ne pas dormir dans la rue depuis son ouverture en novembre. Mais avec l'accélération des arrivées, la création de places d'hébergement en aval peine à suivre.

"Le bruit, la saleté, même les animaux ne supporteraient pas. On est des réfugiés pourtant, on n'est pas là pour profiter du système", explique le jeune Afghan, en montrant son campement de fortune: une bâche, une tente, à quelques mètres du carrefour routier de la porte de La Chapelle, où se jettent l'autoroute et le périphérique.

C'est là que depuis plusieurs semaines un campement s'est réinstallé, sous les voies, malgré les conditions précaires. L'association France terre d'asile y a décompté "1.178 personnes" la semaine dernière, soit "200 de plus par semaine". "Plus on attend, plus la situation est dégradée", estime Pierre Henry, le directeur général de l'association, jugeant une évacuation "obligatoire".

Le 9 mai, un peu plus de 1.600 migrants avaient déjà été évacués au même endroit. C'était, alors, la plus grosse opération de mise à l'abri en six mois.

Sept semaines plus tard, la situation est tendue. Détritus dans les rues, trois points d'eau seulement et quelques toilettes... "Les gens vivent au milieu des déchets, se sentent comme des déchets eux-mêmes, c'est atroce", déplore Solange Van Beest, en mission d'observation pour le centre Primo Levi d'aide aux réfugiés.
Et certains riverains ne sont pas en reste: "on n'en peut plus de la saleté!", lance Jean-Noël, qui habite la tour voisine.

Il est six heures du matin et le campement s'éveille doucement. Un homme se débarbouille avec une bouteille d'eau. Un autre prie en silence. Des sacs de couchage s'alignent sur 200 mètres.

 

(Lire aussi : Un groupe anti-migrants veut bloquer le travail des ONG en Méditerranée)

 

'La déception, c'est la vie'
Face à la saturation du centre parisien, associations et collectifs réclament l'ouverture de centres similaires ailleurs en France. La maire de Paris Anne Hidalgo a écrit en ce sens au ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, et réitéré ce message mardi auprès du Premier ministre Edouard Philippe.

A 07h00, une centaine d'hommes attendent devant les grilles. "C'est difficile pour nous de rentrer dans notre pays, il y a la guerre. Ici, c'est la sécurité, les droits de l'homme", témoigne Musa, un Soudanais. "Mais ce qu'on veut, c'est un toit".

Jeudi, le préfet de région Michel Cadot a reconnu une situation "pas satisfaisante", qui "appellera indéniablement une recherche de solution". Mais cela passe aussi par "une plus grande efficacité" des renvois de migrants vers le pays européen où ils ont laissé leurs empreintes, a-t-il averti.

Une position qui irrite les associations. "Les gens sont perdus dans un labyrinthe administratif", s'agace Yann Manzi de l'association d'aide aux migrants Utopia 56, en dénonçant la politique gouvernementale sur les "points de fixation": "C'est dingue! Les gens sont là, occupons-nous d'eux".

Mirweiz, à Paris depuis deux mois, prend la chose avec philosophie. "J'aurai une place", dit le jeune Afghan. "Mais il y a une question qu'on se pose tous: pourquoi c'est si difficile de demander l'asile en France?"

L'entrée du centre est placée sous la garde des forces de l'ordre, alors que des tensions violentes ont éclaté la semaine dernière. Pour éviter leur répétition, le centre privilégie désormais les maraudes en repérant les plus vulnérables. Jeudi, 80 personnes ont pu entrer par ce biais. Mirweiz s'y attendait. "La déception, c'est la vie", dit-il, près du terre-plein où des bénévoles du collectif Solidarités Wilson préparent un petit-déjeuner.

Ce rendez-vous, vers 9H, est attendu. "On vient tous les jours", explique Emmanuelle Tronche, la coordonnatrice. Mais "on n'a pas eu assez hier", dit-elle. "Des gens avaient faim à la fin de la distribution".

 

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